La crise géopolitique européenne actuelle provoque-t-elle l’accélération de la mutation agricole ?

Il est des accélérateurs de temps qui ne s’annoncent pas. Celui que nous vivons par la crise ukrainienne est de ceux-là. Cette crise fait prendre des décisions dans des champs d’action divers et variés liés à la géostratégie et à la stratégie interne des états quand celle-ci est mise en crise par l’évolution extrême des évènements.

Le marché des intrants témoin de cette accélération imposée

Le monde agricole mondial, européen et français vit depuis plusieurs années une mutation agroécologique indéniable qui allait son petit bonhomme de chemin. 

Ce sont des crises comme celle que nous vivons aujourd’hui de par l’attaque de Poutine sur l’Ukraine qui font que ce n’est réellement plus possible de continuer comme hier dès maintenant : Les prix des intrants classiques explosent et vont rester très haut sur le moyen terme pour ne plus vraiment redescendre, la disponibilité de certains produits va s’avérer compliquée voire impossible dans les temps à venir.

Des alternatives naturelles au centre des attentes agricoles

De nombreux nouveaux acteurs proposant des solutions alternatives naturelles aux intrants classiques grignotent des parts de marchés visibles, les leaders classiques du marché des engrais et phytosanitaires s’obligeant à mettre au point des biocontrôles pour garder le dit contrôle du marché dont ils sont propriétaires depuis des décennies et sur lequel ils n’entendent pas perdre le pouvoir.

Un encadrement réglementaire strict, gage d’efficacité

Les innovations naturelles viennent proposer des alternatives à l’efficacité prouvée (pour la plupart) et validés par la structuration règlementaire : AMM, Marquage CE et CEPP (pour ceux qui souhaitent jouer un vrai rôle dans cette évolution de marché). Tout le monde s ’accordant sur une réalité objective : « On ne peut plus faire comme avant ».

Sauf que dans un marché plutôt conservateur, le consensus sur l’évolution nécessaire trouve mille raisons pour freiner son propre mouvement vers le futur : Les habitudes d’achat et de prescription de la distribution, la crainte de l’inconnu, le temps nécessaire à porter des produits réellement nouveaux, la facilité de continuer comme avant jusqu’à ce que ce ne soit plus possible…

L’accélération forcée synonyme d’innovation

C’est toujours dans ces moments où le temps s’accélère que les cerveaux trouvent l’énergie pour mettre à jour leur logiciel de pensée et que les entreprises face à la nécessité de conserver leur marge ou leur existence pure et simple prennent des décisions innovantes passant le pas qu’elles n’avaient pas encore vraiment oser prendre puisque l’ancien monde présentait encore des solutions historiques.

Des précédents historiques témoins d’innovations

Pour exemple historique, la médecine et chirurgie orthopédique et faciale ont évolué comme jamais lors de la première guerre mondiale ; en effet les armes utilisées produisaient de tels nouveaux dégâts sur les hommes qu’il a fallu repenser la réparation des corps pour espérer redonner vie aux gueules cassées et aux estropiés de toutes sortes. La chirurgie moderne est née de ce conflit.

Le préventif au naturel prend le pas sur la chimie curative

L’accélération du temps oblige à repenser jusqu’à celui-ci. Quand le fongicide ou l’insecticide donnait la solution curative au lendemain matin du problème à résoudre, quand l’engrais chimique rendait plus vert le champ visé au bout de 48h00, quand on savait la dose exacte d’azote à déverser sur la culture pour atteindre le rendement visé, les produits alternatifs obligent à penser préventif, anticipation et préparation de la terre puis accompagnement de la culture dans ses stades physiologiques.

Des solutions agroécologiques pour combiner naturel et rentabilité

Plus proche d’un temps de la nature, ces solutions rendent à la terre sa valeur et aux cultures leur rôle. Ces solutions font grandir l’agriculteur dans sa passion professionnelle tout en lui assurant des résultats tout aussi probants.

Cette crise nous oblige à penser le modèle différemment, à faire confiance à des solutions que les agriculteurs, éleveurs, distributeurs ne réservaient jusque-là qu’en solution accessoire (pour la plupart d’entre eux). Il faut décider de changer maintenant !

Le changement passe toujours par un autre chemin, c’est Albert qui le dit !

« On ne peut pas résoudre un problème avec le même niveau de pensée que celle qui l'a créé » disait un certain Albert Einstein. C’est toujours vrai. On ne résoudra pas le problème agricole d’aujourd’hui avec les idées et les produits qui ont mis ce monde agricole dans cette situation.

Le monde de demain est là et ceux qui ne prennent pas la mesure de cette mutation rapide resteront à jamais dans monde d’hier qui sera vite englouti par l’accélération du temps produite par cette crise.

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Franck Colas, Directeur des Opérations groupe Vertal le 15/03/2022