La géo-ingénierie pour sauver la nature
Il ne s’agit pas de négliger, ni de vouloir ralentir le développement du parc roulant électrique mais comment ne pas s’interroger sur les risques de miser sur une seule solution pour répondre à la multiplicité et à la diversité des besoins. Imposer aux constructeurs une rapide disparition de la production du parc roulant à énergie fossile, c’est les contraindre à perdre des milliards de dollars d’investissement[1], à faire face à un endettement colossal pour modifier leurs chaines de production, à mettre au chômage des milliers de salariés du secteur et à risquer la ruine de milliers de garagistes. C’est aussi se priver de solutions de motorisation encore indispensables un peu partout dans le monde. Bien des pays se passeront des véhicules électriques. Je vois mal l’un d’eux utilisé sur les routes de montagne du Pérou, même à la fin du siècle. Déjà des pays Européens se présentent très en retard en regard des objectifs affichés par la Commission en matière d’infrastructures pour la recharge des batteries. En théorie, un véhicule électrique à batterie pourrait être de 74 à 77% moins polluant qu'un véhicule à combustion[2] (source). Autre point à noter, théoriquement l'hydrogène pourrait devenir roi si sa production réussissait à ne reposer que sur une électricité 80% moins carbonée qu'un véhicule à combustion –mieux encore qu'un véhicule à batterie[3]. Finalement, on peut s’interroger de savoir pourquoi les Etats ne temporisent pas en attendant la génération du moteur à hydrogène. Le tout électrique, c’est faire exploser une demande donc des besoins de production impossibles à atteindre en l’état de nos ressources techniques et financières (Evaluation de 90 000 à 170 000 milliards de dollars)[4]. Encore ne parle-t-on pas des problèmes de production et de recyclage de matériaux déjà rares et coûteux nécessaires à certains équipements pour le parc roulant (et bientôt volant).
Production, recyclage, innovations en matière de productivité énergétique, mise en place des logistiques, diffusion des bonnes pratiques et… dénonciation des mauvaises … tous ces efforts n’arriveront pas à compenser la production carbone due aux incendies planétaires, à l’augmentation de l’activité volcanique et des activités humaines dans le monde sans oublier le moindre rendement de la photosynthèse et de l’absorbation du carbone par les mers évoqué par les spécialistes. En fait le sentiment que me laisse toutes ces belles hypothèses c’est qu’elles sont là pour rassurer le pékin vert. Dans quelques années on fera un bilan bien en-deçà des objectifs ou des prévisions annoncés et on laissera le bon peuple digérer qu’il faut encore attendre quelques décennies pour améliorer les choses. Certes, la direction actuelle imposée à tous ne doit ni être refusée, ni bloquée, mais réduire le CO² reste une stratégie défensive face aux désastres qui nous attendent. Je ne veux pas croire que ce soit la seule et l’unique « bonne » solution. Par exemple, pourquoi ne peut-on pas parler de geo-engénierie climatique et envisager de retraiter le CO² pour produire massivement de l’Oxygène ?
Les variations massives du taux d’oxygène font partie de l’histoire de la Terre. Ces fluctuations ont participé à l’émergence des formes de vie complexes. Nous devons admettre que l’espèce humaine doit s’attaquer à terra-former son habitat. De la même manière que nous avons su produire de l’eau potable à partir de l’eau de mer, ne devrions-nous pas mobiliser tous nos centres de R&D pour inventer les modes de retraitement du CO² et de production massive d’oxygène ? Deux types de production sont connues. La séparation de l’oxygène de l’air ambiant (Générateur PSA) très utilisé dans le médical consiste à séparer l’oxygène de l'air ambiant sous haute pression, en éliminant l’azote et autres gaz grâce à un tamis moléculaire de zéolithe. Une solution qui n’en est pas une puisque qu’on se contente de traiter l’air ambiant. Puis nous avons l’extraction par catalyse de l’eau de mer qui donne deux molécules d’hydrogène (dont nous avons besoin comme carburant du futur de préférence aux batteries actuelles au lithium) pour une molécule d’oxygène (H2o) toujours bonne à exploiter. Une piste encore embryonnaire car elle demande beaucoup d’énergie alors que l’utilisation du nucléaire pour cette production spécifique reste encore bloquée[5]. Mais allons plus avant.
L’ennemi c’est le Dioxyde de carbone (CO² : un atome de carbone deux atomes d’oxygène) c’est un gaz à effet de serre reconnu comme premier responsable du réchauffement climatique. Pourtant ce même gaz a été utilisé par les scientifiques pour produire avec succès de l’oxygène sur Mars. Alors pourquoi - au lieu de ce sauve-qui-peut général - ne parle-t-on pas des recherches et des hypothèses de travail qui permettraient d’oxygéner la terre et de la « terraformer » plutôt que d’aller voir comment le faire sur Mars ?
Une équipe française développe la piste prometteuse du recyclage du CO² qui pourrait répondre aux besoins à la fois, de maitrise de l’augmentation du CO², et de production massive d’oxygène indispensables d’ici à la fin du siècle. Un défi qu’a relevé l’équipe de Marc Robert du CNRS en mettant au point un nouveau dispositif capable d’extraire de l’oxygène du monoxyde carbone. «La plupart des processus connus utilisent des catalyseurs basés sur des métaux rares et précieux. Nous, nous utilisons la phtalocyanine de cobalt, un catalyseur moléculaire largement disponible », explique ce chercheur. Le procédé utilise de l’eau – qui se transforme en oxygène lors de l’expérience – et de l’électricité. Par ailleurs précise-t-il, « Le processus catalytique fonctionne à pression et température ambiante, donc dans des conditions faciles à mettre en place. » Une innovation qui permet de préparer la prochaine étape : un déploiement à l’échelle industrielle en cours de préparation. La simplicité du dispositif, son efficacité, le fait que les matériaux utilisés soient abondants et que l’électricité provienne à terme d’énergies renouvelables : tout cela crée un vrai potentiel de développement à grande échelle, dans le respect de la planète. « Grâce à ce dispositif, le CO² n’est plus le centre de toutes les nuisances mais une matière première renouvelable, transformée en CO grâce à de l’électricité, elle-même renouvelable. Cela permet d’inclure le CO² dans une économie circulaire, un cercle vertueux. » En effet, le monoxyde de carbone, issu de la réduction du CO² lors du processus d’électrolyse, peut être lui-même transformé, notamment en carburant. « Le monoxyde de carbone a de nombreuses applications dans l’industrie chimique dont c’est une des briques élémentaires essentielles – le méthane – qui peut être réutilisée pour chauffer les habitations ou faire rouler des bus », ajoute Marc Robert. « Ce méthane produit du CO² lorsqu’il brûle… CO² qu’on pourra à nouveau recycler. » Un pas de plus vers une énergie plus propre et renouvelable à l’infini. Contacté par l’auteur, Marc Robert nous précise qu’il vient de créer une start up, Carboneo, qui a pour but de dimensionner cette technologie d'électrolyse du CO² à l'échelle industrielle. Un premier pilote est en construction. Courant 2022, il sera en phase de test et d'optimisation. Marc Robert espère pouvoir arriver sur le marché en 2025 avec des électrolyseurs capables de traiter plusieurs dizaines de millions de tonnes de CO² par site industriel, et ainsi contribuer de façon massive à la décarbonation de l'industrie.
Voilà le message d’optimisme que j’attends, que je pense que nous devrions tous attendre, de voir une union sacrée des nations pour inventer des retraitements du CO² et produire massivement un oxygène qui nous reste indispensable[6]. Depuis des millénaires la nature le faisait pour nous, à notre tour de le faire pour elle.
[1] Des sociétés endettées. Volkswagen est le numéro un mondial avec 192 milliards de dollars de dettes, Daimler Benz est quatrième (151 milliards), Toyota cinquième (138 milliards), Ford septième (122 milliards) et BMW huitième (114 milliards).
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[2] https://korii.slate.fr/tech/technologie-environnement-automobile-electriques-beaucoup-plus-verts-combustion-carbone-cycle-vie
[3] https://korii.slate.fr/tech/technologie-environnement-automobile-electriques-beaucoup-plus-verts-combustion-carbone-cycle-vie
[4] Evaluation de New Energy Outlook 2021 publié par Bloomberg