La Lettre des Femmes de l'ESR - Mai 2016
L’Edito
L’affaire Baupin - et l’appel des 17 - secoue le monde politique. Si beaucoup affirment que l’onde de choc est liée au caractère symbolique et au devoir d’exemplarité que se doit d’avoir la classe politique, que dire du harcèlement sexuel dans l’Enseignement Supérieur et de la Recherche ?
Qu’il s’agisse d’enseignants, personnels de l’encadrement administratif ou étudiants, le harcèlement sexuel est aussi un mal répandu dans le secteur. Les chiffres sont difficiles à connaître : il n’y a pas de centralisation des procédures disciplinaires en cours. Et pour protéger leur réputation, les universités et écoles ont longtemps nié le phénomène, choisissant souvent de régler les problèmes en interne plutôt que de faire suivre les procédures au pénal…
Comme en politique la singularité du milieu pose question : une sorte de croyance se dégage comme quoi un professeur, vecteur de savoir, et une élève, instruite et connaissant ses droits, ne peuvent être inscrits dans un schéma de ce type. Pourtant les relations particulières (une certaine dépendance même) entre un directeur de thèse et une doctorante sont des relations connues et reconnues comme étant des relations à risque. Dans un entretien au Monde, Vincent Berger, alors président de l’université Paris-Diderot, était radical : « Le duo étudiant-professeur est un duo à risque. A l’intimité intellectuelle s’ajoutent les conditions psychiques d’une emprise intellectuelle du professeur, qui est le sachant, ce qui le met en position d’hégémonie intellectuelle. »
Double peine pour la jeune femme qui, si elle souhaite changer de directeur de thèse, prend le risque de perdre son financement. Sans mentionner le fait que, dans l’enseignement supérieur et la recherche, les procédures en l’espèce font intervenir les paires dans l’instruction et le jugement : nous sommes loin des garanties d’impartialité d’une part et du principe de séparation de l’instruction et du jugement d’autre part. Le silence est alors gardé, la souffrance aussi. Et l’impunité se répand.
Mais les consciences ne se taisent pas et des actions sont menées par différents acteurs.
Un Vademecum - fruit d’une collaboration entre l’ANEF, le CLASCHES et la CPED – a été publié sur le sujet, des universités mettent en place des cellules d’écoute et le Ministère n’est pas en reste avec la circulaire de novembre 2012 à l’attention des responsables d’établissements sur les mesures de prévention et les dispositions à mettre en œuvre lorsqu’ils ont connaissance de faits relevant du harcèlement sexuel.
De plus, suite à la publication du Livre Blanc de l’ANEF s’est déroulée une journée de réflexion sur le harcèlement sexuel dans les établissements d’enseignement supérieur et de recherche. Cet Atelier a été co-organisé avec le CLASCHES et la CPED ; un dossier est disponible.
De la simple injonction à être sexy au harcèlement sexuel, en passant par les remarques déplacées, les violences quelles qu’elles soient, ne doivent pas, dans l’enseignement supérieur et la recherche ni dans aucun autre secteur, être minimisées ou tues.
Et parce qu’il est difficile pour la victime de parler, chacun se doit d’être vigilant et attentif, sans tomber dans la paranoïa, mais en agissant tel un acteur conscient et averti.
Les Portraits
Qui ? Maëlle Giraud
Mission : Etudiante en Master 2 à l’ENSM (Ecole Nationale Supérieure Maritime).
La phrase : « Une femme va se montrer plus astucieuse à bord pour pallier sa différence physique et c’est, de mon point de vue, un atout majeur. »
Mission : Directrice de la Communication et des Partenariats de l’EPF – Référente Egalité Femme/Homme
La phrase : « Nous avons besoin d’ingénieures pour apporter de l’innovation dans nos entreprises, enrichir les points de vues, diversifier les solutions technologiques et modifier les modes de management. »
Qui ? Pascale Cayla
Mission : Fondatrice de l’agence l’ « Art en culture »
La phrase : « J’ai toujours pensé que l’indépendance et le combat des femmes passent par des actions positives qui nous montrent des femmes libres et assumées dans leurs engagements. »
Retrouvez toute la Lettre du mois de Mai 2016 ICI