En début d’année 2015, BpiFrance a mis en ligne sa « nouvelle doctrine » sous la forme d’une grille d’analyse de l’innovation. Ce document, intitulé « Innovation Nouvelle Génération » incarne un changement d’approche radical et propose un référentiel nourri d’exemples concrets et porteur d’une approche multidimensionnelle de l’innovation. »

Changer de regard sur l’innovation

Cette grille résume la nouvelle vision de l’innovation de BpiFrance.

C’est l’ambition affichée dès le début du document et elle sonne à la fois comme une nécessité et comme un aveu : peut-être était-il temps, en effet, de faire évoluer une doctrine et des règles d’analyse et d’évaluation qui correspondaient à une économie de demande, où les évolutions technologiques apparaissaient comme les drivers principaux de l’innovation (on pourra d’ailleurs voir aussi cet article sur l’évolution de la conception techno-push à celle du market-push).

Mais, au fait, qu’est-ce-que BpiFrance ?

Bpifrance est un organisme français de financement et de développement des entreprises 1. Elle regroupe OSEO, CDC Entreprises, le FSI et FSI Régions. Elle est en particulier chargée de soutenir les petites et moyennes entreprises, les entreprises de taille intermédiaire et les entreprises innovantes en appui des politiques publiques de l’État et des régions. Contrairement à ce que son nom peut laisser supposer, Bpifrance n’est pas une banque de plein exercice mais une compagnie financière car elle ne dispose pas de licence bancaire. Ses ressources proviennent en majorité des marchés financiers (privés), son capital est détenu par la Caisse des dépôts et l’État, ainsi que de sociétaires (entreprises, assureurs, etc.).

Le « nouveau regard »

Bien sur, pour ceux qui s’intéressent au sujet de l’innovation, les premières pages du guide semblent asséner des évidences sur le caractère complexe et multidimensionnel de l’innovation. Comme Kim découvre la lune, on découvre que « l’innovation est le fruit d’un processus global dans lequel la R&D n’est qu’un ingrédient parmi d’autres, à intégrer dans une démarche organisationnelle complexe ».

Nous l’avons vu, cette vision s’est déjà imposée dans la littérature dans les années 80. Finalement, BpiFrance propose d’évaluer l’innovation à l’aune de 2 questions :

• Qu’est-ce que le projet apporte de neuf aux clients, utilisateurs et bénéficiaires ?
• En quoi le projet peut-il différencier l’entreprise de sa concurrence ?

Kim pourrait là aussi dire qu’elle en était sûre et qu’elle avait déjà lu ça quelque part car cette approche rejoint celle des nombreux professionnels du domaine qui, à certaines variantes cosmétiques près, utilisent tous les mêmes critères (caractère de nouveauté sur une zone géographique donnée, valeur apportée aux clients, avantage concurrentiel plus ou moins facile à maintenir dans le temps, …). Plutôt qu’un nouveau regard, on est bien face à une adaptation de la vision de BpiFrance à celle du reste de l’écosystème (entreprises, chercheurs, autres opérateurs publics, …).

D’ailleurs BpiFrance admet qu’elle n’aurait pas soutenu une bonne partie des innovations qui ont marqué le marché ces dernières années (réseaux sociaux, co-voiturage, micro-crédit, organisations agiles, …) car beaucoup d’entre elles ne sont pas « principalement technologiques ».

La grille d’analyse de l’innovation, les formes d’innovation

Plusieurs formes d’innovation « non technologiques » sont recensées :

• l’innovation « d’organisation » (cf. manuel d’Oslo et définition de l’OCDE, déjà cités dans cet article) et l’innovation « managériale » (co-conception et open-innovation)
• l’innovation de « commercialisation »
• l’innovation de « business model »
• l’innovation « sociale » (sociales à la fois dans les finalités et dans les moyens)

Les innovations de « produits/services » et « technologiques » sont par ailleurs conservées.

La révolution n’est pas mince mais il s’agit principalement d’une révolution dans la prise en compte, par un système national de soutien à l’innovation, de concepts déjà largement admis et diffusés.

Quel est le nouveau référentiel proposé ?

Chacune des 6 typologies d’innovations est évaluée selon son intensité. Cette intensité varie de 1 (incrémentale) à 4 (rupture). L’ensemble constitue la grille d’analyse de l’innovation selon BpiFrance.

Chacune des 6 dimensions de l’innovation est évaluée selon son intensité :

Le grand mérite de cette analyse est d’essayer de considérer les innovations sous toutes leurs facettes et de proposer un outil directement opérationnel. D’ailleurs les grilles de questionnement présentes dans le document (p.82 et suivantes) sont à cet égard les pages les plus intéressantes.

Quelle conclusion ?

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