La pauvreté, valeur de bien-être

La pauvreté, valeur de bien-être

Au côté de Pierre Rabhi début Janvier, j'ai pu mesurer le travail admirable d'une personne lucide, qui creuse des galeries souterraines à la manière d'une taupe aveugle. Avant que notre sol s'ébranle bientôt soudainement, voici trois sagesses sur cette nouvelle civilisation qui naît, discrètement sous nos pieds.

"Désormais, la plus haute, la plus belle performance que devra réaliser l'humanité sera de répondre à ses besoins vitaux avec les moyens les plus simples et les plus sains. Cultiver son jardin ou s'adonner à n'importe quelle activité créatrice d'autonomie sera considéré comme un acte politique, un acte de légitime résistance à la dépendance et à l'asservissement de la personne humaine."

"La terre et les animaux compagnons qui nous ont permis de vivre en ces lieux magnifiques n'ont jamais été considérés seulement comme les moyens de gagner de l'argent dont nous avions besoin comme tout un chacun. Au-delà de simples ressources que notre labeur mettait en valeur pour répondre à nos besoins matériels, nous les considérions comme des offrandes de la vie. Sur ce chemin, nous n'avons au demeurant pas été exempts de soucis matériels, tourments intérieurs, dissensions et divergences ; mais ces difficultés se sont révélées nécessaires pour une meilleure compréhension de soi-même et des autres."

"J'avais vingt ans, et la modernité m'est apparue comme une immense imposture"

"Dans cet itinéraire singulier, construire un lieu de vie structuré, concilier les exigences économiques avec les impératifs écologiques nécessite beaucoup de rigueur. J'entends par "rigueur" le sérieux avec lequel on construit une alternative, avec les moyens dont on dispose et ceux qu'il faut inventer, surtout lorsque l'argent manque. Aussi avons-nous géré notre petite ferme comme une petite entreprise, respectant les règles qu'impose une telle gestion. Mais, contrairement à ce qui se passe dans une entreprise ordinaire, pour laquelle extension est synonyme de réussite, nous avons d'emblée opté pour l'autolimitation. C'est cela qui a été notre réussite, parce que la sobriété est une force. La valeur ajoutée au produit de base s'est construite sur un rapport marchand intégrant le facteur social : rencontres conviviales sur le marché, à la ferme... Ainsi avons-nous évité à tout prix de nous marginaliser, de nous retrancher de la communauté environnante. Pour nous, vivre autrement ne consistait pas à édifier une enclave au sein de cette communauté."

Extraits tirés du livre "Vers la Sobriété Heureuse" (2010, Babel)

Merci Pierre Rabhi pour cette magnifique rencontre, dans un sanctuaire à la fois du goût, de l'éducation et de l'art de vivre ensemble : les Amanins.

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