“La Poudrière”, une enquête fouillée et inquiétante sur l’extrême droite en France
L’ultra-droite est de retour, obsédée par la fin de la République. Des attentats se fomentent sur notre sol. Des groupuscules se montent partout ; gagnent la bataille idéologique ; pénètrent les principaux mouvements de contestations dans le pays, saccagent nos institutions, l’Arc de triomphe lors d’une manifestation des Gilets jaunes. Leurs relais sont médiatiques, littéraires, politiques. La thèse du « grand remplacement » de Renaud Camus a irrigué bien au-delà des rangs extrémistes, pour s’imposer dans le débat public.
Ils sont de plus en plus nombreux, sur le territoire, à se radicaliser autour des thèmes du déclin de la France, des crises économiques et sociales, de l’abandon du pays aux musulmans, de la faiblesse de l’État, au point que les services de renseignement pensent désormais inéluctable un affrontement entre communautés, dessinant l’ébauche d’une future guerre civile. Y sommes-nous déjà ? La société craquelle, la « dissidence », elle, s’organise. Alain Soral, Dieudonné, Boris Le Lay et autre prêcheur de haine sont interdits de Youtube Facebook ou Twitter, avant d’être poursuivis en justice et de devenir des martyrs de leur cause. Leurs sites sont fermés, ils en ouvrent de nouveaux. Quand leurs mouvements sont dissous, ils se reforment sous un autre nom. Actions coup de poing contre les immigrés – « kebabs, mosquées, on en a assez ! », camps d’été survivalistes, projets d’attaques, fermes à trolls, propagande numérique, etc. La DGSI craint l’attaque de loups solitaires de l’ultradroite et relève avec inquiétude l’apparition d’une frange de militants identitaires qui leur étaient jusqu’alors inconnus.
Jean-Michel Décugis, Pauline Guéna et Marc Le plongeon les ont rencontrés et font parler ceux qui s’estiment être les « Grands remplacés ». C’est à une plongée inquiétante que nous invitent ici les auteurs de Mimi. Portraits, réseaux, généalogie du combat, entrée dans la clandestinité : le feu couve.
Les militants de l’ultradroite attendent l’ultime confrontation des civilisations
Jean-Yves Camus, chercheur, essayiste et politologue français, spécialiste de l'extrême droite, le 24 janvier 2016, à Paris. LAURENT HAZGUI
Le politologue Jean-Yves Camus a été chargé d’analyser le risque terroriste de l’ultradroite en France. « Une note des renseignements généraux de 2005 estimait entre 2 500 et 3 500 le nombre de militants et sympathisants », fait-il savoir.
Le ministère allemand des affaires étrangères a commandé à l’ONG Counter Extremism Project (CEP) un rapport sur le risque terroriste de l’ultradroite, et confié au politologue Jean-Yves Camus, le directeur de l’Observatoire des radicalités politiques (Fondation Jean-Jaurès), l’analyse de la situation française.
Quel risque l’ultradroite fait-elle courir en France ?
Ce risque est secondaire par rapport à celui de l’islam radical. Le pays n’a connu depuis le début des années 1990 que très peu d’attentats venus de l’ultradroite, d’ailleurs tous déjoués ou manqués, alors que, depuis 2012, 263 personnes ont été tuées par des islamistes radicaux et que des centaines d’autres ont été blessées. L’ultradroite en France a un potentiel militant à peu près constant depuis une quinzaine d’années.
Une note des renseignements généraux de 2005 estimait entre 2 500 et 3 500 le nombre de militants et sympathisants. En 2020, on est toujours autour de 1 000 personnes pour le noyau dur, et 2 000 suiveurs. C’est bien moins qu’en Allemagne, où les services de renseignement estiment le nombre de militants à 33 430, dont 13 000 sont « gewaltorienterte », c’est-à-dire « orientés vers la violence ». En France, Laurent Nunès, le coordinateur national du renseignement, avait indiqué, le 4 octobre, que seulement cinq complots d’extrême droite avaient été recensés en France depuis 2017.
Tous démantelés…
Oui, et ils avaient des niveaux de préparation variables. En juin 2017, près de Marseille, Logan Alexandre Nisin, 21 ans, est arrêté pour avoir projeté de tuer le ministre de l’intérieur de l’époque, Christophe Castaner, et le député LFI Jean-Luc Mélenchon. Il avait mis en place une organisation très intelligemment baptisée « OAS », Organisation de l’armée secrète, ce qui était déjà de nature à éveiller quelques soupçons. Passé par presque tous les groupuscules de sa région, déçu par leur manque de capacité ou de volonté de passer à l’action terroriste, il avait décidé d’agir en toute petite cellule.
La Poudrière (2021)
L’ultra-droite est de retour, obsédée par la fin de la République. Des attentats se fomentent sur notre sol. Des groupuscules se montent partout ; gagnent la bataille idéologique ; pénètrent les principaux mouvements de contestations dans le pays, saccagent nos institutions, l’Arc de triomphe lors d’une manifestation des Gilets jaunes. Leurs relais sont médiatiques, littéraires, politiques. La thèse du « grand remplacement » de Renaud Camus a irrigué bien au-delà des rangs extrémistes, pour s’imposer dans le débat public.
Ils sont de plus en plus nombreux, sur le territoire, à se radicaliser autour des thèmes du déclin de la France, des crises économiques et sociales, de l’abandon du pays aux musulmans, de la faiblesse de l’État, au point que les services de renseignement pensent désormais inéluctable un affrontement entre communautés, dessinant l’ébauche d’une future guerre civile. Y sommes-nous déjà ? La société craquelle, la « dissidence », elle, s’organise. Alain Soral, Dieudonné, Boris Le Lay et autre prêcheur de haine sont interdits de Youtube Facebook ou Twitter, avant d’être poursuivis en justice et de devenir des martyrs de leur cause. Leurs sites sont fermés, ils en ouvrent de nouveaux. Quand leurs mouvements sont dissous, ils se reforment sous un autre nom. Actions coup de poing contre les immigrés – « kebabs, mosquées, on en a assez ! », camps d’été survivalistes, projets d’attaques, fermes à trolls, propagande numérique, etc. La DGSI craint l’attaque de loups solitaires de l’ultradroite et relève avec inquiétude l’apparition d’une frange de militants identitaires qui leur étaient jusqu’alors inconnus.
Jean-Michel Décugis, Pauline Guéna et Marc Leplongeon les ont rencontrés et font parler ceux qui s’estiment être les « Grands remplacés ». C’est à une plongée inquiétante que nous invitent ici les auteurs de Mimi. Portraits, réseaux, généalogie du combat, entrée dans la clandestinité : le feu couve.
“La poudrière”, enquête présentée par Marc Leplongeon sur les minorités agissantes d'ultra-droite