La renaissance du nucléaire
L’énergie est ce dont se nourrissent nos machines. La croissance du PIB mondial représente la croissance du nombre de machines dont nous disposons pour travailler à notre place. L’essentiel de l’énergie consommée aujourd’hui et depuis 150 ans est d’origine fossile. Le pic d’extraction de ces énergies dites fossiles est désormais dépassé et leur consommation se heurte à la pollution atmosphérique et au réchauffement climatiques qu’elles engendrent. L’avenir économique du monde ne peut plus dépendre du pétrole, du gaz et surtout du charbon parce que nous devons les réduire, soit sous la menace d’un désastre climatique, soit sous la contrainte des quantités encore extractibles.
La transition énergétique est donc en marche et, à par l’Europe de l’ouest, le reste du monde s’engage de plus en plus résolument dans le développement de l’énergie nucléaire, pilotable et présentant la plus faible empreinte écologique tout en étant de très loin la plus puissante, la plus efficace et la moins létale de toutes.
Toute l’Europe de l’ouest ? Non, plus depuis la semaine dernière, puisque le Parlement hollandais vient d’adopter une motion en vue de définir les meilleurs moyens pour soutenir les entreprises qui désireraient développer le nucléaire sur son sol.
Début d’exploitation commerciale de nouveaux réacteurs, démarrage de nouveaux chantiers de construction de centrales, acceptation politique de nouveaux projets de centrales, prolongation de licence d’exploitation pour plusieurs décennies de réacteurs existants, annonce de redémarrage de centrales japonaises, décisions politiques ou juridiques favorables à l’industrie nucléaire partout dans le monde, et comme on vient de l’écrire, même en Europe de l’ouest, émergence des SMR (Small Modular Reactors) avec soutien politique massif, pas un jour ne passe sans qu’un nouvel argument ne s’amoncelle pour invalider les théories encore vivaces de déclin et de l’extinction du nucléaire civil.
A ce titre, citons le tout récent Energy Outlook de BP, dont les principaux messages sont :
1) La demande globale d’énergie va continuer de croitre, quel que soit le scénario, en raison de l’augmentation de la prospérité et de l’amélioration du niveau de vie dans les pays émergents.
2) La structure de la demande d’énergie devrait se modifier, l’électricité jouant un rôle grandissant dans la consommation globale d’énergie. L’augmentation de l’emploi de l’électricité serait particulièrement importante dans le cas d’une électrification plus rapide des transports routiers.
3) La demande de produits pétroliers va baisser de 45% à 70% sur les 30 prochaines années quel que soit le scénario envisagé.
4) L’énergie nucléaire va croitre dans les 30 prochaines années. Les capacités nucléaires installées augmenteront de 100 à 160% suivant le scénario envisagé. La part du nucléaire dans le mix énergétique progresse en Chine, en Inde, dans le reste de l’Asie et en Afrique dans tous les scénarios. Le développement des nouvelles centrales nucléaires devrait être équivalent à celui de l’âge d’or des années 70-80 dans le scénario reposant sur la mise en application de mesures politiques visant à limiter la hausse de la température globale de moins de 2° d’ici la fin du siècle, et plus important que jamais dans un scénario où on y ajoute un changement de comportement et de préférence des consommateurs induit par une prise de conscience collective du défi posé par le changement climatique.
Enfin, un institut de recherche climatique chinois qui travaille en très étroite collaboration avec le gouvernement chinois vient de publier une feuille de route pour parvenir à l’objectif climatique le plus ambitieux que le monde ait jamais vu. Ce plan prévoit notamment le quadruplement des capacités nucléaires entre 2025 et 2060, ce qui représente le double de la flotte de réacteurs actuelle des Etats-Unis, de loin la plus grande du monde.