La soutenabilité financière de la réforme de la formation et de son CPF (monétisé)

La soutenabilité financière de la réforme de la formation et de son CPF (monétisé)

Le Ministère des finances a lancé récemment une inspection (de l'IGAS) concernant la loi votée en aout 2018 (loi du 5 septembre 2018) afin de déterminer la « soutenabilité financière » de la réforme de la formation et de l'apprentissage.

Sur le versant du Compte Personnel de Formation monétisé nous allons tenter de lui fournir quelques éléments comptables

  • Le Compte Personnel de Formation dispose de 900 millions d'euros de cotisation chaque année pour 32 millions de bénéficiaires (18 millions de salariés, 3 millions de chômeurs, 6 millions de fonctionnaires, 3 millions de travailleurs indépendants et 2 millions de bénévoles).
  • Une simple division (pour les seuls salariés du secteur privé soit 18 millions de personnes) donne un budget potentiel de 50 euros par an et par salarié
  • Sur le compte CPF de chacun des salariés est inscrit depuis 2019 la somme de 500 € par an (800 € en cas d'absence de diplôme) que la personne travaille à temps partiel ou à temps complet

L'Etat a donc créé un flux annuel de droits à la formation à hauteur de 9 milliards par an face à 900 millions de cotisation (soit 10 % des sommes collectées chaque année)

Mais le décompte ne s'arrête pas là puisqu'il faut bien comptabliser les anciens droits depuis 2004

  • Le CPF reprend les droits anciens du CPF (4 années de CPF en heures soit 96 heures par personne) soit au taux (faible) de 15 € par heure : 1 440 € par salarié
  • Le CPF reprend aussi les droits au DIF accumulés par les salariés durant 10 années (2004-2014) soit 120 heures en moyenne pour un total de 1 800 € par salarié (ces heures seront perdues pour 10 millions de salariés si non signalées cette année 2020)
  • Le stock de CPF monétisé est donc de 9 milliards d'euros au titre de 2019, 14 milliards d'euros au titre des années 2015 à 2018 et environ 18 autres milliards d'euros pour les anciennes heures de DIF
  • Le total représente donc une trentaine de milliards d'euros avec des fonds permettant (au mieux) de dégager 1 milliard d'euros de droits réels à la formation chaque année

La soutenabilité du CPF monétisé est parfaitement utopique et 3 solutions s'offrent désormais aux pouvoirs publics

  1. Espérer que jamais plus de 5 % des titulaires d'un Compte CPF ne réclameront leur dû et ne souhaiteront se former au cours de la même année (certains devraient attendre une vingtaine d'année, 2040, pour espérer se former durant une vingtaine d'heures)
  2. Compter sur d'énormes participations d'autres financeurs au CPF des salariés : le salarié lui-même (on imagine l'agent de propreté prenant 2 ou 3 mois de son salaire au SMIC pour financer sa formation de lutte contre l'illettrisme), les entreprises (dans notrepays où le niveau des charges sociales est prohibitif c'est peu probable) ou encore des financeurs miracles (la région, pôle emploi, le département, la ville, un émirat du Golf...)
  3. Ranger le CPF au rayon des gadgets sociaux du pays, un ex-voeu pieux (le DIF) devenu un vaste déversoir social (de bons sentiments éducatifs) et une promesse intenable dont l'IGAS poura démontrer sans grande peine l'insoutenabilité financière (tout autant que technique et sociale d'ailleurs).


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