Le Bâtiment et le CO2, une proposition de solution

Le Bâtiment et le CO2, une proposition de solution

NOUS & CLIMAT & CO2  =  PROBLEME GENERAL

                    GOUVERNEMENTS & CO2 = PROBLEME & AUCUNE SOLUTION

                                                            Et pourtant

                BATIMENTS & CO2 = PROBLEME FACILE A RESOUDRE

Cet essai analyse la situation et propose une solution au problème irrésolue de la gestion (amélioration) des émissions de gaz à effets de serre associés aux bâtiments belges et à leur usage.

Il définit aussi les pistes nécessaires pour mettre cette solution en place.

Les émissions de CO2 associées aux bâtiments semblent a priori un sujet aisé à appréhender pour un état souverain.

La réalité est hélas différente.

En effet pour tenter de prendre en charge cette problématique la plupart des états européens, et la Belgique particulièrement ont mis en place une série de mesures classiques, de types subside, déductions fiscales, soutient à la production d’énergie verte, etc…

Quels en sont les résultats ? 

Entre 1990 et 2017, la Belgique a réduit de 12% ses émissions totales de CO2

Comment à-t-on fait ? Principalement en arrêtant l’utilisation du charbon (production électrique et aciéries), en le remplaçant par du Gaz et en promouvant la production d’énergie verte et surtout grâce aux efforts des entreprises. Les performances des bâtiments sont restées inchangées. 

Est-ce un bon résultat ? Pas trop.

L’Europe a réduit ses émissions totales de 20% durant cette même période. Si on n’est pas très performants en Europe, c’est quand même mieux que l’Amérique du Nord qui a augmenté de 8% et surtout que l’Asie avec son augmentation de …321%).

La place du bâtiment dans ces résultats est marginale au plus, à savoir que la réduction de consommation des bâtiments ne serait que de 1% au plus.

Chez nous, les outils mis en place par l’État pour les bâtiments ont pourtant coûté des milliards d’euros ; vu leur efficacité toute relative ils ont été abandonnés ou fortement réduits.  Pour être plus précis, ils sont quasi systématiquement abandonnés en fin de législature, car ils ne fonctionnent pas et on nous promet "c'est juré" qu'on fera mieux la prochaine fois. Puis typiquement un an après le nouveau gouvernement, on remet les mêmes techniques en œuvre. 

Certaines mesures nous ont couté cher. La plus flagrante, inéquitable et inefficace fut le support extrême à l’énergie photovoltaïque en Région Wallonne dont le cout à la tonne de CO2 évitée est de plus de 600€. Ce dernier n’a rien couté à l’état directement, il pèse actuellement sur chaque citoyen Wallon à concurrence de ± 600€ / habitant (grosse estimation de 1,8 Milliards d’euros répartis sur 3 millions de wallons). Cet argent n’est pas perdu pour tous puisqu’il est payé in fine aux heureux détenteurs de panneaux (133 000 ménages) qui se sont associé pour garantir leur dû. Depuis plusieurs années, l’installation de panneaux est rentable sans support particulier, pourtant, le propriétaire dont le toit est orienté au Sud est encore soutenu par un mécanisme…

Dans ces conditions super optimales, avec des rentabilités anormalement plus élevées que tout marché réel, la production d’électricité photovoltaïque a effectivement bien progressé, mais à quel prix!

Pourquoi les autres mesures (subsides, réductions fiscales, …) n’ont pas atteint leurs objectifs ?

Il y a plusieurs raisons ; nous pouvons en citer quelques-unes. 

Nous vivons dans un pays au climat assez clément, ni très froid, ni très chand, ce qui a pour conséquence que la performance énergétique n’a historiquement pas eu beaucoup d’impact sur le confort. 

Le propriétaire moyen a plus de 55-60 ans, à cet âge il ne peut plus emprunter et il ne désire plus non plus s’engager dans des opérations à long terme. 

Les plus jeunes endettés avec leur crédits (hypothécaire et voiture), doivent faire des choix entre des investissements qu'ils voient tous les jours et d'autres qui sont cachés dans les murs. Les autres , locataires, n'ont pas de possibilité d'améliorer la performance énergétique de leur logements, ils ne peuvent qu'optimiser leur usage. 

Le propriétaire qui loue, en ce compris le logement social, n’a aucun intérêt à effectuer des travaux onéreux, puisque ce n’est pas lui qui paye les consommations énergétiques. 

Certains travaux ont des retours sur investissement assez longs.

La performance énergétique des bâtiments est généralement inversement proportionnelle aux moyens de leurs propriétaire et locataires.

Les outils proposés par les politiques énergétiques ciblaient toutes des solutions spécifiques, le citoyen n’ayant pas le choix de la solution qui lui convient. 

Quand bien même le bâtiment est énergétiquement bon ou a été amélioré pour l'être, aucun mécanisme ne permet de s'adresser au comportement de l'utilisateur. 

Finalement, les moyens mis en œuvre par l’État ont été rapidement épuisés et étaient bien en deçà de ce qui est/était nécessaire.

Nos bâtiments sont vieux, la plupart ne correspond pas aux standards actuels de performance énergétique (obligatoires pour les nouveaux bâtiments).  

Rien que pour l’habitat familial, on estime qu’il y a quasi 2 Millions de maisons en Belgique qui devraient être améliorées. 

Si l’on estime un cout moyen de 30 000€ par maison, le budget est de 60 milliards d’euros.  Si l'on y ajoute des bâtiments publics, on augmente de 50% la mise.

Ce chiffre est à comparer au Budget de l’État belge de ± 104 Milliards d’euros.

Conclusion au niveau des Bâtiments

Le propriétaire Public ne peut s’endetter plus que la situation actuelle sans sérieusement alourdir la charge des plus jeunes, il doit donc gérer sa capacité d’emprunt entre rénovation et nouvelle construction, l’espoir de voir le bien public s’améliorer rapidement est donc vain.

Il est aussi difficilement explicable au citoyen que l'état seul peut faire ce que lui-même interdit à ses propres citoyens et entreprises, vivre au-dessus de ses moyens. Tôt ou tard quelqu'un doit payer et il est temps d'arrêter de reporter la dette sur les autres, principalement les jeunes.  Nous avons commencé sur cette pente il y a 70 ans (avec les pensions), on peut dire que le temps n'a pas vraiment réglé le problème.

Il est donc mathématiquement simple de constater que l’État ne pourra jamais résoudre ce problème seul et qu’il est particulièrement surprenant d’entendre encore récemment des propositions contraires de la part de certains politiques, propositions qui sont des « copier-coller » des mesures prises par le passé et qui n’ont pas fonctionné. Cette fois-ci c'est même pire, au niveau fédéral et régional on emprunte sur les marchés pour mettre encore plus d'argent public dans les mêmes idées; à croire que plus l'erreur est grosse, moins elle est punissable.

Osons rappeler que les mesures prises doivent être compatibles avec la dynamique et les résultats escomptés (on ne peut raisonnablement espérer que des mesures spécifiques prises pour une législature et dans des micros-environnements soient efficaces globalement et à long terme) et qu’il sera plus aisé de favoriser des changements qui bénéficient à tous plutôt que des changements qui coûtent plus à certains qu’à d’autres.

Rappelons aussi que la consommation d'énergie est certes liée à la qualité du bâtiment, mais elle est aussi fortement liée à son utilisation.

Par ailleurs, les récentes manifestations « pour le climat » montrent que des citoyens s’attendent à ce que l’État résolve le problème pour eux. Mais les « signaux » sont loin d’être clairs.

Les jeunes universitaires qui désirent que les « vieux » se bougent pour garantir leur avenir sont aussi souvent les premiers à négocier une voiture de société lors de leur premier emploi et l’usage d’internet sans limite ne peut être remis en cause, même s’il requiert des centaines de MW de puissance électrique pour en assurer le fonctionnement. 

L’arrêt des centrales nucléaires exigée par certains aura pour effet d’augmenter de 48 à 72% nos émissions de gaz à effet de serre… tout en organisant de facto une dépendance encore plus forte du pays envers les pays producteurs de gaz qui ne partagent pas tous nos valeurs démocratiques et sociales et poser un risque financier.

Le casse-tête est donc vraiment complexe et d’autant plus inextricable que certains exigent le tout et son contraire.

Le résultat est une cacophonie de déclarations, de discussions pour s'assurer que l'on ne fait pas plus que l'autre (autre ville, région, pays, …) et … hormis les efforts des entreprises qui sont visibles, l'absence de résultats est malheureusement flagrante.

Pourtant, si l'on se limite à se dire que le seul élément connu est que notre mode de vie (énergétique) impacte l'équilibre naturel, la raison voudrait que, tout simplement, sans complications ni modèles, l'on opte pour une politique qui a pour but de réduire, voir d'annuler cet impact.

Alors quoi?

La Belgique n’est ni le pire ni le meilleur État, nos citoyens ne sont ni pires ni meilleurs qu'ailleurs ; ce qui se passe chez nous est quasi-universel. Mais pouvons nos décemment accepter cela comme excuse? .

Dans ces conditions est-il encore raisonnable de compter sur nos États pour nous guider et assurer un avenir serein ?

Une fois les solutions « classiques »  épuisées et face au constat d’impuissance de l’État, faut-il quand même se résoudre à la fatalité de mesurettes aussi onéreuses qu’inutiles ?

Pas nécessairement, mais pour ce faire il faut peut-être prendre un peu de recul et philosopher sur l’État, son existence, son devoir, ses objectifs et ses pouvoirs.  

A quoi , à qui,  sert un Etat? 

Une vision de l’État démocratique consiste à dire qu’il s’agit de la méthode organisationnelle mise en place par ses citoyens dans le but de gérer le bien commun et assurer la vie sociale paisible tout en offrant à chaque citoyen une qualité de vie raisonnable.

Selon cette vue on peut arguer que l’État devrait être un organisateur et un facilitateur, pas nécessairement un acteur à tous les niveaux et encore moins un système résultant en une dépendance du citoyen par rapport à l’État et ses élus.

Selon cette approche plus générale, on peut aussi considérer que l’État puisse dans certaines situations être plus efficace comme sous-traitant que comme commanditaire.

Nous pensons que dans la problématique globale du climat et de l’approche qui devrait permettre au « bâtiment » de réduire ses émissions de gaz à effet de serre, il est possible et surtout recommandé d’impliquer l’État sans que ce dernier soit aux commandes.

Cette proposition est-elle révolutionnaire ? Pas du tout, c’est comme cela que la vie économique est déjà organisée ; à savoir que l’État met en place un cadre (infrastructure, fiscalité, droit du travail, environnement) etc…au sein duquel l'economie s’installe, y vit, grandit.  Et puis qu'y aurait-il de révolutionnaire en un état qui aide ses citoyens ?

On peut donc utiliser le même concept de manière plus large pour résoudre notre apparente situation inconciliable entre État, Climat et performance énergétique des bâtiments.

Quelques repères pour voir les choses différemment

Prenons quelques points de repères réalistes :

- le bénéfice de l’amélioration énergétique d’un bâtiment résulte en une moindre dépense énergétique annuelle pour ce bâtiment (ses occupants);

- tout bâtiment génère une dette à l’État (l’impôt sur le revenu cadastral) qui est transmise avec  le bien lors de sa vente;

- l’État est particulièrement performant quand il s’agit de collecter l’impôt;

- Notre pays dispose d'un réseau d'expert énergétiques agréées et d'outils d'aide à la décision reconnus.

Imaginons que tout propriétaire puisse disposer des moyens nécessaires à la « mise à niveau » validée par expert de son bâtiment (cela est techniquement tout à fait réaliste à des taux très compétitifs mais n’entrons pas dans le détail).

Proposons pour ce faire que le propriétaire ne doit pas s’endetter.  Rêve? Pas du tout; une méthode existe.

Réservons une partie (+/-80%) du bénéfice (moindre dépense) énergétique annuel au remboursement de la dette de la « mise à niveau »  du bâtiment (en utilisant le très performant mécanisme de réception des Région) tant que le coût des travaux n’est pas entièrement remboursé.

Imaginons que l’État ait mis en place le cadre légal pour permettre cela (ce qui selon l’administration des Finances est parfaitement possible sans réduire les droits de l’un ou l’autre)

Une solution émerge

Si l'on considère principalement ces repères, on peut immédiatement en extraire des conclusions.

-       Le frein principal, le financement, disparaît même pour les moins nantis

-       Des travaux se font, principalement par des PMEs ( ce qui génère emplois, taxes,…)

-       Propriétaires et locataires bénéficient égalitairement de ces mesures

-       Personne ne paie pour la rentabilité des investissements des autres

-       Les travaux techniquement les plus « rentables » sont favorisés, les autres sont exclus

-       A priori, les plus précarisés au niveau énergétique devraient être les premiers à bénéficier de mesures car le ROI sera meilleur

-       La méthode permet d'optimiser à la fois le Bâtiment et son usage

-       La valeur des bâtiments augmente sans que le foncier n'augmente

-       Pas de complication type ‘tiers investisseur’ lors de la vente de bâtiments (transfert du solde de la dette)

-       La balance CO2,  énergétique et financière du Pays s’améliore 

-       L’état ne décide pas la nature des investissements effectués, seuls les résultats comptent, toute évolution technique est favorisée par essence

-       L’État ne s’endette pas 

-       L’État met ses outils administratifs les plus performants à l’usage du plus grand nombre

Oui mais qui va payer?

Tel qu'énoncé plus haut, le cout de cette amélioration de nos bâtiments sera proche de 90 milliards d'euros.

Le rendement actuel de l'épargne des belges (qui est de plus de 270 milliards d'euros) n'est pas très supérieur à zéro. Les fonds inutilisés en Belgique ou à l'étranger et que les banques n'arrivent plus à rémunérer aux épargnants sont gigantesques.

Il ne semble donc pas irréaliste de pourvoir trouver les fonds nécessaires en leur donnant un taux d'intérêt réaliste. Cette hypothèse a été vérifiée avec l'agence qui gère la dette de l'état. On a donc une solution pour la source des fonds. Quant à qui va payer, c'est assez simple, les fonds et intérêts sont remboursés par les économies d'énergie.

Oui mais si c'est si simple pourquoi ne le fait-on pas, il doit y a voir des "vices cachés"

Nous avons pris la précaution de vérifier avec des professionnels reconnus la faisabilité de ce système (l'agence de la dette, la direction de l'administration des finances, des banques, les administrations de l'énergie…). A ce stade, aucune objection majeure n'a pu être identifiée, seuls quelques ajustements réglementaires sont nécessaires ; ces derniers doivent être implémentés par notre législateur.

Nous avons donc aussi présenté cela à divers niveaux de gouvernements. Nous devons constater qu'à ce stade, personne, ni au Sud, ni au Nord, ni au Centre du Pays ne semble prêt à aborder le problème de manière collégiale (avec les autres). 

Bien qu'il soit donc techniquement possible, si on le veut, de réduire les émissions de CO2 de tous les bâtiments sans endetter l'état, la faiblesse de notre situation repose dans notre organisation, ou plutôt dans la faiblesse de l'Homme à se cantonner au cocon organisationnel et de "Pouvoir" qu'il a construit et au refus de considérer l'usage (le comportement) en conjonction avec l'outil (le bâtiment).

A l'instar de son rôle dans l'organisation de l'Economie, l’État dans son ensemble a un rôle essentiel à jouer en tant que facilitateur, mais, en l'occurrence, pas en tant qu’acteur et encore moins en augmentant considérablement la dette publique. Le citoyen qui désire participer à l’effort global lié à la réduction des émissions des gaz à effets de serre aura ainsi accès à une solution réaliste qui est conforme au Développement Durable (alliant l’environnement, le social et l’économique).

Le mécanisme présenté n'est peut-être pas la panacée, mais il a le mérite d'exister, de résister à la critique et d'offrir une voie alternative là où les autres ont toutes échoués.

Ce qui nous manque est un esprit d'État factuel (des faits et gestes) de nos décideurs qui doivent (ré)apprendre à travailler ensemble pour le bien commun.

Un problème est comme une serrure, l'art est de trouver la bonne clé…. et l'envie de la tourner.


©2019

Marc Noël & Joseph Pirenne

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