Le départ des hirondelles

Le départ des hirondelles

Chaque année, 30 000 retraités quittent la France pour se rendre au Portugal, au Maroc ou en Tunisie. À l’automne, ils échappent à la grisaille pour profiter du climat méditerranéen. Ils laissent derrière eux un logement qui se retrouve souvent en location courte durée sur les plateformes en ligne.

Les retraités français sont parmi les plus jeunes et les plus aisés d’Europe. Sans crédits à rembourser, avec le sourire, on les comprend. Le Maroc, le Portugal ou la Tunisie accueillent ces ressortissants et ils auraient tort de s’en priver mais pour les causes et avec les conséquences qui vont avec et que je m’apprête à décrire ici.

Et la fiscalité dans tout ça ?!

S'il existe des paradis fiscaux, la France pourrait être perçue comme un enfer fiscal. Le Portugal l’a bien compris en accordant pendant longtemps un statut spécial aux retraités européens, avec dix ans d’exonération fiscale sur leurs revenus.

Cependant, C’est bien connu, la nature a horreur du vide. Lorsqu’un avantage fiscal apparaît quelque part, il ne faut pas longtemps pour que des intéressés (et leurs capitaux !) s’y précipitent, favorisant ainsi la formation de bulles. Nos retraités quittent alors la France pour s’installer définitivement ailleurs, à la recherche d’une vie meilleure.

La côte d’Algarve, par exemple

Le district de Faro est historiquement la destination préférée des retraités français au Portugal. Sur les quelque 50 000 Français vivant au Portugal, la moitié se trouve en Algarve, et la majorité d’entre eux sont retraités. Conséquence directe : le prix du mètre carré y connaît une croissance constante à deux chiffres depuis 2016. Aujourd’hui, le prix moyen du mètre carré peut sembler « raisonnable » pour un Français, se situant autour de 3 900 euros/mètre carré.


Oui, mais !

Les conditions de vie au Portugal ne sont pas les mêmes qu’en France. Le salaire minimum est de 820 euros mensuels, et le PIB par habitant est de 27 000 euros, contre près de 40 000 en France. Le taux de chômage des jeunes s’élève à 20 %.

Comme chez nous, sur les côtes françaises, les habitants locaux peinent à se loger. Ils n’ont pas les moyens des retraités européens qui viennent s’installer et contribuent à la hausse des prix. Je ne parle même pas de ceux qui ont flairé le bon filon en construisant des résidences pour de la location saisonnière, gonflant ainsi encore plus les prix.

Alors, “Agora Acabu !”

C’est Antonio Costa, Premier ministre portugais, qui l’a dit. Comprenez : « maintenant, c’est fini ». Depuis janvier 2024, le Portugal n’émet plus de visas « dorés », qui permettaient aux ressortissants européens de ne pas payer d’impôts dans leur pays d’origine tout en étant exemptés d’impôts au Portugal. Cette mesure vise à freiner la spéculation immobilière.

Il faut bien reconnaître que c’était un peu limite !

Pour un pays aussi redistributif que le nôtre, passionné par l’égalité, considérer que les retraités actuels, installés définitivement au Portugal :

  • ne paient plus d’impôts sur le revenu ;
  • ne participent plus à la vie économique française ;
  • n’ont pas contribué de la même manière que les générations qui arrivent ;
  • et contribuent à faire grimper les prix au Portugal, au point de rendre les logements inaccessibles aux locaux.

Pendant ce temps, en France :

  • 4 millions de personnes sont mal logées ;
  • 2,5 millions de personnes sont en attente d’un logement social ;
  • un étudiant sur quatre vit sous le seuil de pauvreté (26 % exactement) ;
  • certains, faute de pouvoir se loger, sont obligés de dormir dans des campings à l’année, en périphérie des grandes villes ;
  • deux actifs sur cinq renoncent à une formation professionnalisante, faute de pouvoir se loger sur place.


Au final, hormis pour les hirondelles, tout le monde y perd dans cette situation

En France, les retraités qui résident en dehors des frontières ne contribuent plus à la vie économique du pays. Pendant ce temps, on estime que des millions de logements en France sont laissés vacants. Ces logements de retraités, souvent vides ou transformés en locations saisonnières, ne permettent pas aux actifs de se loger, ce qui est vraiment regrettable.

Au Portugal, certains commerçants profitent peut-être de ces « touristes supplémentaires » une partie de l’année, mais ce sont les mêmes qui contribuent à la hausse des prix de l’immobilier, rendant l’accès au logement encore plus difficile pour les locaux.

À part ça ?

Je ne dirai rien sur le PLF 2025, sinon pour souligner que le divorce semble être acté entre ce que veulent les Français et ce dont la France a besoin. À trois semaines du scrutin, Kamala Harris et Donald Trump sont au coude à coude, notamment dans les États clés. L’avenir se jouera peut-être en Pennsylvanie. En Angleterre, une étudiante a retrouvé un scorpion dans ses bottes achetées sur Shein… bon, au moins elles ne devaient pas être chères ! Dans la Drôme, deux criminels ont été arrêtés pour avoir volé 80 plaquettes de beurre, quelle idée ! En Bretagne, deux agriculteurs se disputent, et l’un d’eux décide de placer la voiture de l’autre… sur le toit d’un abribus !

Il devait être très énervé cet agriculteur breton !
La citation de la semaine

« Les règles ne sont pas grand-chose sans la façon d’être qui les sous-entend. » — Montaigne

Le reste !

Tout va bien de mon côté, j’espère juste que ça va durer. Cette semaine, je livre deux appartements entièrement rénovés.

En les remettant sur le marché, les loyers ont progressé de 50 %, seul moyen pour les propriétaires de financer les travaux. C’est ça aussi, la crise du logement et les drames humains qui vont avec.

Avant les travaux, c'était bien mais c'était moche !


Après les travaux, c'est toujours bien mais c'est moins moche !

Voilà, c’est tout, bonne semaine 👋

Identifiez-vous pour afficher ou ajouter un commentaire

Plus d’articles de Aymeric Dutrey

Explorer les sujets