Le déséquilibre significatif dans un contrat de bail commercial. Plus de questions que de réponses ?

Le déséquilibre significatif dans des contrats d'affaires – notion juridique qui intrigue. C'est une arme qui paraît redoutable pour la protection de « la partie faible » dans une relation commerciale.

Le principe est exposé à l'article L. 442-6 I 2° du code de commerce qui énonce : « Engage la responsabilité de son auteur et l'oblige à réparer le préjudice causé le fait, par tout producteur, commerçant, industriel ou personne immatriculée au répertoire des métiers de soumettre ou de tenter de soumettre un partenaire commercial à des obligations créant un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties ». La Cour de cassation a déjà rendu quelques décisions emblématiques afin de préciser le champ d'application de ce texte et la définition du déséquilibre. Ainsi, à l'occasion de l'arrêt le Galec du 25 janvier 2017 a admis le déséquilibre entre le prix de la prestation et le service rendu, exclu du champ d'application de l'article 1171 du code civil.

Un arrêt de la 3e chambre civile du 15 février 2018 ( n° 17-11.329 ) vient de donner une nouvelle précision. Pour les juges de la haute juridiction « seules les activités de production, de distribution ou de services entrent dans le champ d’application de l’article L. 442- 6 I 2° du code de commerce ». Dans cette affaire le litige portait sur le renouvellement d'un bail commercial contenant une clause de fixation du loyer à un minimum garanti.. Le preneur a assigné le bailleur en déséquilibre significatif devant la juridiction compétente en la matière. La requête est rejetée et la cour de cassation a confirmé ce jugement. L'activité de bail commercial ne relève pas de l'activité de production, de distribution ou de service.

Quelle peut être la solution ? Peut-être que le droit commun peut s'appliquer en terme du bail commercial, qui est un contrat d'adhésion. Or le deuxième alinéa qui exclu l'adéquation du prix au service rendu limite considérablement cette solution. L'exclusion du bail commercial du champ d'application de l'article L.422-6 peut être interprété comme une tentative de protection du statut du bail commercial, puisque c'est un contrat qui est déséquilibré dans son principe. Le bailleur ne peut pas délivrer congé au locataire qu'à l'expiration d'un délai de 9 ans, la révision du prix peut intervenir seulement tous les 3 ans et doit impérativement être motivée. Le congé ouvre droit à l'indemnité d'éviction. C'est un contrat très protecteur du preneur et le bailleur sera souvent tenté de « rééquilibrer » la convention par les différentes clauses. Parfois au risque de déplacer le déséquilibre de son côté. Bien évidemment qu'il doit y exister un mécanisme de rééquilibrage judiciaire. L'article L.442-6 s'applique à « tout producteur, commerçant, industriel ou personne immatriculée au répertoire des métiers ». Notamment le 4° du I de ce texte dispose : « ...d'obtenir ou de tenter d'obtenir, sous la menace d'une rupture brutale totale ou partielle des relations commerciales, des conditions manifestement abusives concernant les prix, les délais de paiement, les modalités de vente ou les services ne relevant pas des obligations d'achat et de vente ». Et même si une location immobilière d'est pas ni vente ni prestation de service au sens stricte, cette formulation de l'article, est-ce une exclusion volontaire de la part du législateur ou une erreur de rédaction ? Quoi qu'il en soit, il est plus qu'étrange pourquoi les parties à un bail commercial ne pourraient pas bénéficier de la protection contre le déséquilibre dans leur relation commerciale.



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