LE LEADERSHIP TEL QU’IL SE PRÉSENTE DE NOS JOURS EST DÉPOUILLÉ DE SES FONDAMENTAUX
Le concept de leadership découle d’une culture anglo-saxonne. Cette notion, actuellement à la mode, est passée dans la tradition francophone seulement ces dernières années, à la suite de l’émergence de la démocratie après la fin des empires coloniaux et de l’affrontement Est-Ouest. La situation actuelle impose à l’Afrique noire la nécessité de faire émerger une nouvelle génération de leaders, capables d’engager des reformes qui pourront conduire notre continent vers un développement axé sur le bien-être de tous ces fils.
Que nous présente-t-on du leadership aujourd’hui ? La majorité des « success story » donne l’impression de façon consciente ou inconsciente de nous vendre et de réduire le concept de leadership au seul fait de la réussite[1] matériel, avant toute chose parcourrons cette définition du leader. C’est un individu qui est capable d’avoir un impact positif dans la vie des autres et de les mener volontairement vers une vision, un but ou un objectif. Il nous parait évident et claire que cette définition ou tout autre que l’on pourrait faire, il ne ressort de façon explicite aucun aspect de richesse physique ou matérielle, de position sociale ou professionnelle, ni encore moins de titre... Si nous voulons en ressortir une forme quelconque de richesse, nous verrons qu’il s’agit de richesse immatérielle, nous voulons dire richesses mentale, morale, intellectuelle et spirituelle axées sur les valeurs et les caractères.
D’où vient-il cette présentation erronée de cette notion ? Eh bien, nous sommes chaque jour submergé de leaders matériels ou matérialistes, il est claire que nous évoluons dans une société capitaliste, régie par la quête permanente du bien-être matériel et financier (la recherche effrénée du gain a fait mettre au oubliette toute morale), où les apparences prennent une part importante sur la réalité, où l’exception se régit en règle, une société dominée par toutes sortes de maux et relayés de façon consciente ou inconsciente par les médias et les « leader[2] » d’opinions, un système dominé des personnes avares et égoïstes, d’où l’aliénation du terme leadership dans sa représentation sociale. Un tel est le sportif le mieux payé du monde, « il est leader », l’autre est le président directeur général d’une organisation, « il est leader », il a créé une entreprise qui possède les plus grandes parts de marché, « c’est un leader », d’ailleurs cette entreprise sera considérer comme entreprise leader sur le marché au seul fait de ses résultats financiers sans en interroger les méthodes. La question qui en ressort de ce constat est celle-ci : est-ce parce qu’une firme possède les plus grandes parts de marché ou qu’une personne accède à un statut social élevé, que l’on peut automatiquement conclure qu’elle est leader par rapport aux autres ?
Cependant, il est utile de noter que le véritable leadership repose sur des valeurs et le caractère de l’individu qui permettent de nous accomplir personnellement, nous parlons d’honnêteté, d’intégrité, de valorisation des autres, d’attitude saine et positive, de motivation, d’esprit d’équipe… Le caractère et les valeurs morales sont à la base de toute réussite réelle. C'est pour cette raison que Norman Schwarzkopf, un général de l'armée américaine disait: « Le leadership est une puissante combinaison de stratégie et de caractère. Mais s'il devait en manquer un, que ce soit la stratégie. »
Notre prétention n’est certainement pas que ceux qui créent des entreprises ou des organisations, qui gèrent des structures ou qui possèdent d’énormes fortunes ne sont pas tous des leaders, il en existe certainement. Cependant, nous affirmons avec toutes l’énergie possible qu’il ne faut pas partir du poste, du titre, de la fortune, ni encore moins de la fonction pour déclarer ou constater le leadership chez un individu. La problématique ici est la façon dont la société présente ses leaders et la perception du leadership chez ceux qui reçoivent le message.
Si l’on s’accorde que le leadership est axé fondamentalement sur les valeurs et les caractères de l’individu, la question est celle de savoir, quel type de leader l’Afrique en général et le Cameroun en particulier, a besoin pour son développement et le bien-être de ses populations ? Nous ne sommes pas les premiers auteurs à se pencher sur la question, des auteurs tels que LOUCHE, DELACHAUX et NIESTLE[3], Waren BENNIS, Michael ARGYLE, Robert Tannenbaum et Warren H. Schmidt[4] et bien d’autres. Il n’est pas question ici de revenir, ni de totalement remettre en question leur pensé, plutôt de partir de leurs travaux afin de proposer une style de leadership qui peut s’adapter à notre continent qui a fort besoin de se développer et de contribuer au bien-être de ses populations à travers la contribution les nouvelles races de leaders, d’entrepreneurs et de managers mettant en place les bonnes pratiques se focalisant sur l’amélioration, l’innovation, et l’épanouissement collectif et social.
Nous allons citer ici certains styles de leadership que nous pouvons retrouver dans notre société, leurs caractéristiques et leurs effets en se focalisant sur l’approche fonctionnelle et l’approche individuelle, nous notons ici le leader charismatique ou autoritaire[5], le leader démocratique ou participatif, le leader paternaliste et le leader consultatif (Kurt Lewin et Rensis Lickert):
- Le leader charismatique ou autoritaire : Le chef établit toutes les directives, chacune en son temps, mais s’abstient de participer au travail du groupe, directif, distant du groupe, donne des ordres. Bon rendement mais mauvaise ambiance, avec une communication à sens unique nous pouvons avoir comme effets une agressivité individuelle, groupe apathique. Efficace en temps de crise (réaction rapide), pour des tâches bien définies, mais bride l’initiative. Chute de rendement ou disparition de l’activité en l’absence du chef. Les décisions sont imposées et ce management peut provoquer des réactions d’hostilité vis-à-vis des objectifs.
- Le leader démocratique ou participatif: Semi-directif, les directives générales font l’objet d’une délibération du groupe. Le chef prône la discussion au sein du groupe, écoute les suggestions, juge objectivement, donne des conseils mais ne participe pas trop au travail du groupe. La coopération est forte, les équipes contribuant véritablement aux décisions dans un climat de confiance. Bonnes relations, participation active des membres, autonomie ; permet la réalisation de tâches peu structurées et impose de bonnes relations entre leader et groupe.
- Le leader paternaliste : plutôt centralisé et jouant sur la distribution de récompenses, de sanctions et sur le rapport individuel entre chaque employé et son chef plutôt que sur l’esprit d’équipe. Les subordonnés sont peu encouragés à prendre des initiatives et le fonctionnement de l’organisation repose sur les capacités et la personnalité du dirigeant.
- Le leader consultatif : faussement participatif car les subordonnés sont consultés sans pouvoir vraiment influencer les décisions. Le travail d’équipe est favorisé et la communication se fait dans les deux sens haut-bas, bas-haut, mais la délégation reste limitée.
A la question posée plus sur le style du leadership adapté au contexte africain, nous apporterons une réponse à celle-ci en nous appuyant sur la théorie de Mac GREGOR qui dans sa théorie distingue deux types d’individu à savoir les individus X qui sont des individus qui recherchent avant tout la sécurité et une définition claire de leur cadre de travail, ils ne sont motivés que par leur rémunération, ils sont partisans du moindre effort, ils sont incapables de prendre une décision, constamment besoin d’être accompagnés, motivés et encadrés ; et les individu Y, contrairement sont caractérisés un effort dans le travail est aussi naturel que le jeu et le repos, l'homme peut se diriger et se contrôler lui-même s'il se sent responsable, l'individu accepte critique, ouvert à la diversité et au progrès, voire recherche les responsabilités, ils disposent de réserves de créativité et d'ingéniosité qui sont inexploitées. Nous nous appuierons aussi sur les besoins des individus en prenant en compte la pyramide d’A.MASLOW[6] (besoins physiologiques, besoins de sécurité, besoins d’appartenance, besoins d’estime et de reconnaissance, et les besoins d’accomplissement personnel ou réalisation de soi) et les diversités ethniques et culturelles qui composent l’Afrique et le Cameroun. Nous présenterons ici trois styles de leadership qui devront faire l’objet d’une adaptation, ajoutés à ceux cités plus haut, ce que nous appelons ici l’approche contingente[7] ou le « mix-approche » qui devra tenir compte de l’environnement dans lequel l’on évolue, des hommes, de leurs besoins, de leur culture, des objectifs, de la vision, des moyens, de leurs capacités, etc. Le leader doit être capable de faire un dosage entre ces différents styles, l’adapter en fonction des circonstances et du contexte. En ajout aux autres styles e leadership nous présenterons le leadership catalyseur[8] et le leadership maternel :
- Le leader catalyseur : c’est un individu focalisé sur le progrès et le développement, qui voit en chaque être humain un potentiel, une ressources sur laquelle l’on peut capitaliser, il a une forte confiance aux capacités humaines, il a confiance au membre de son équipe, veut toujours leur mettre en avant, conseille, forme, coach et encadre si nécessaire sans rebaisser les autres. Un fort désir d’utiliser le plein potentiel des membres de son équipe, il sait que la réussite de chaque projet ou de chaque activité déprend du membre le plus faible.
- Le leader maternel : protecteur, il recherche beaucoup plus l’épanouissement des membres de son équipe, parce qu’il pense que le développement de son activité en dépend. Toujours à l’écoute de tous, il sait que les performances d’un individu dépendent aussi de son effectif ou de ses émotions, fin psychologue les autres recherche en lui du soutien.
- Le leader agitateur ou leader d’opinion : qui à la faculté d’influencer les autres dans leurs différents prises de décisions ou leurs différents actions, capacité de drainer les foules, de mobiliser. Il a une excellente capacité de communication et un pouvoir de persuasion dû à son expérience, son expertise ou la façon dont les autres le perçoivent.
Aujourd’hui, adopter un seul style de leadership et s’en contenter ne suffit plus, le monde est trop dynamique et changeant, les individus ont des caractéristiques différentes en termes de personnalité, de culture, de connaissances, d’égo, de caractère. Il est ainsi préférable d’adapter son leadership à chaque type d’individu. Maintenant, ce qui s’avère comme un impératif est bien plus profond que de se contenter d’un style de leadership. Car ce que nous avons besoin actuellement, c’est des leaders capables « d’aider chacun à réussir ce qu’il est capable de faire, établir une vision pour l’avenir, encourager, guider, établir et entretenir des relations réussies »[9]. C’est pourquoi une approche contingente avec une prédominance de leadership catalyseur est la solution pour ce continent orienté vers le développement et le bien être de sa société.
Certaines idées préconçues sont entrées dans les consciences et les mœurs des africains de façon volontaire ou involontaire comme quoi, les « oreilles du nègre sont situé dans ses fesses », l’Afrique ne peut survivre et exister que par des aides extérieures, cela se voit tous les jours dans nos actions, notre éducation, la façon dont nous considérons et traitons nos frères africains par rapports aux autres, à la façon dont nous considérons ceux qui vivent en occident par rapport à ceux qui sont tous les jours avec nous, malheureusement la liste ne peut être exhaustive. Il est ainsi nécessaire de redonner confiance à l’Afrique et aux africains, leur permettre de prendre conscience de leur potentiel, leur dire qu’ils sont capables de créer, d’innover et surtout que le développement de ce continent dépend d’abord de nous et surtout de la contribution de chaque africain (les autres peuvent venir en appui ou comme soutien si leur contribution est en harmonie avec notre vision) sans tenir compte de son titre, de sa fonctions ou de son appartenance social. Seul le leadership catalyseur et la mise en œuvre des bonnes pratiques que préconise ce dernier est capable de le faire.
[1] La réussite ici se confond au succès peut se définir comme la réalisation progressive d’un idéal de valeur
[2] Le terme leader ici représente un individu qui par son expertise, son statut, son titre, sa position sociale influence les comportements d’une partie de la société.
[3] Dans l’ouvrage « Individu et organisation »(1982)
[4] « How to choose a leadership » patern (1958)
[5] Capacité que peut avoir un individu à sa faire obéir
[6] Motivation and personality, New York Harper and Row 1954
[7] La contingence se définie comme en ensemble d’événements qui peuvent se produire ou non, circonstances fortuites (Larousse)
[8] Substance qui produit une réaction chimique ou accélère le processus sans subir des modifications.
[9] Dale CANERGIE, « comment trouver le leader en vous » (1995)
Responsable commercial et Acheteur chez Force Industrielle
8 ansIntéressant mon cher Casimir. Nous avons plus besoin des leaders contextuels et non des modèles de leaders décrit à des styles uniques.