Le secret des leaders en 12 points
Quels points communs entre des personnalités aussi différentes que Barack Obama, Gandhi, Didier Deschamps, Steve Jobs, Christine Lagarde… ? Chacune s’est imposée à un moment comme un leader dans son domaine respectif. Leurs compétences techniques n’ont assurément rien à voir, ni l’environnement dans lequel elles ont agi en tant que leaders. Pour déceler leurs points communs, il faut certainement rechercher dans les qualités humaines qu’elles pourraient partager et qui définiraient en quelque sorte « l’ADN » du leader, à supposer que cette notion ait le moindre sens du point de vue de la génétique.
En près de deux décennies chez AXA , j’ai eu l’occasion d’observer et d’interagir avec beaucoup de leaders. Dans des styles différents, ils m’ont souvent inspiré et montré des voies possibles pour avancer. Désormais, j’ai fréquemment l’occasion d’échanger avec des managers plus jeunes et de partager avec eux ce que je pense avoir compris du leadership. J’espère que ces quelques réflexions leur donneront envie d’approfondir les ressorts du leadership et de progresser en tant que leader.
Avant d’être une caractéristique d’un individu, le leader est d’abord une fonction au sein d’un groupe de personnes – on n’est pas un leader tout seul comme un Robinson sur son île. Les raisons qui conduisent quelqu’un en particulier à une position de leader peuvent être par essence très diverses voire parfois inattendues (par exemple : le leader accidentel qui le devient en fonction de circonstances spécifiques). Néanmoins, il me semble qu’il y a chez de nombreux leaders que j’ai pu rencontrer ou simplement observer, chez AXA ou ailleurs, un certain nombre de qualités communes. J’ai essayé de les résumer en 12 points qui me paraissent les plus importants.
Le leader n’est pas forcément le plus intelligent (ce serait beaucoup trop simple et tristement rationnel…), ni le plus charismatique (cela pourrait être dangereux si ses qualités se limitent à celle-ci…), ni le plus fort ou le plus grand (malheureusement pour certains 😉, ce serait arbitraire…). Le talent du leader repose avant tout sur un équilibre entre de nombreuses qualités dont aucune ne suffit, à elle seule, à faire de lui un leader. C’est la combinaison de ses qualités qui explique à la fois la rareté et la force du vrai leader.
L’Ambition
Si cette qualité a parfois mauvaise presse, notamment en France où le rapport à la réussite individuelle est parfois ambivalent, l’ambition n’en est pas moins nécessaire au leader. C’est un peu l’essence dans le moteur du leadership. Point de grande chose sans désir ardent d’y parvenir. Et si l’amour-propre n’y est pas étranger, on peut certainement cohabiter avec lui si l’ambition individuelle rejoint une ambition collective et si l’ambitieux a le bon goût de ne pas trop faire l’étalage de lui-même. Qui reprocherait à Kylian Mbappé son ambition individuelle si elle est au service de la victoire de l’équipe ?
Le Besoin des autres
Le leader est un être social qui n’existe pas sans les autres. C’est le groupe qui fait le leader et je suis d’avis que le grand leader a besoin des autres, non seulement pour accomplir ses grandes œuvres – c’est la face pratique de la chose - mais surtout parce qu’il se nourrit de ses relations aux autres. Un homme ou une femme qui réalise de grandes choses seul(e), peut être tout à fait digne d’admiration (un artiste, un savant…) mais il ou elle n’est pas un leader.
La Capacité de travail
Être leader, cela peut apporter beaucoup de satisfaction et d’épanouissement, mais cela tombe rarement du ciel. Souvent, il a fallu beaucoup d’efforts pour y arriver et autant de labeur pour s’y maintenir. Quels que soient ses talents personnels, le leader est souvent un travailleur acharné. Le fait que certains leaders paraissent publiquement si naturels et confiants ou s’expriment de manière tellement simple ne doit pas le faire oublier. « Comme il est difficile d’être simple » disait Vincent Van Gogh.
La Résistance physique
Nous l’avons vu avec la capacité de travail, le leader ne peut rester avare de lui-même. Cette générosité de travail et d’engagement envers les autres a un coût personnel et elle nous rappelle que le leadership emporte à la fois le corps et l’esprit. Le leadership est une énergie vivante qui se consume mais aussi se régénère par l’usage.
Le Courage
Il faut avoir du courage pour penser différemment et l’exprimer, pour ne pas se réfugier dans le confort de la pensée majoritaire. A quoi sert un leader s’il voit le monde de la même façon que la majorité des autres personnes ? Il faut aussi du courage dans le rapport à l’échec : c’est un fait, les leaders font globalement plus d’erreurs que les autres parce qu’ils tentent plus de choses qu’ils ne sont pas sûrs d’atteindre.
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La Confiance en soi
C’est incontestablement un point fort du leader. Il ne s’agit pas d’une forme de prétention par laquelle le leader, sûr de sa propre supériorité, serait a priori convaincu que rien ni personne ne peut lui résister. La confiance en soi, ce n’est pas une certitude, c’est juste une « croyance » que l’on peut réussir quelque chose de difficile ("Know you can"), voire d’un peu au-delà de ce que nos qualités nous permettraient « normalement » d’atteindre. La confiance en soi ne se décrète pas mais se travaille et se nourrit de beaucoup d’autres choses : le travail, le plaisir, l'expérience, le soutien des autres…
L’Empathie
C’est, selon moi, une des dimensions les plus humaines, les plus subjectives et les plus importantes du leadership. L’empathie alimente le rapport du leader aux autres, le respect d’autrui et de ce que ce dernier ressent. Beaucoup de grands leaders ont cette capacité à faire que la personne en face d’eux se sente, à ce moment-là, importante dans ce qu’elle est. Dans le monde des affaires, l’empathie contribue aussi à la vision stratégique : comprendre les besoins du client, ce qu’il ressent, comment il veut que nous lui parlions, c’est le graal que beaucoup d’entreprises recherchent.
La Maîtrise du fond
La pensée théorique sur le leadership relègue parfois l’expertise technique au second rang, ce qui rend le leadership peut-être plus mystérieux, plus insaisissable, plus romantique… Mais c’est à mon avis une vision un peu trompeuse. Le leader d’une compagnie d’assurance n’est pas interchangeable avec le leader d’une équipe de football. Tous les deux ont des défis techniques différents à appréhender, à analyser, à surmonter et l’un ne serait probablement pas un bon leader à la place de l’autre. Si l’on considère qu’un des rôles du leader est de prendre un certain nombre de décisions, le leader doit bien savoir de quoi il parle, et s’appuyer à bon escient sur l’expertise, les connaissances et l’expérience qu’il peut chercher en lui-même ou dans son environnement.
Le Plaisir à ce que l’on fait
Si l’ambition est l’essence dans le moteur du leader, le plaisir en est l’huile, ou inversement. Le plaisir donne l’envie de faire les choses et de l’énergie ; il est visible, ce qui donne aussi envie aux autres de se mettre en mouvement. Le plaisir se rapproche également de l’idée d’être « bien dans sa peau ». Difficile d’être un bon leader quand on ne se sent pas bien, d’abord pour soi-même parce que cela demande plus d’efforts, et ensuite pour les autres, parce qu’en bons humains que nous sommes, nous sentons ces choses-là. Il suffit que le patron arrive en réunion en faisant la tête, et tout le monde le remarquera et la dynamique collective s’en trouvera affectée. Si le leader est le visage de ceux qu’ils représentent, mieux vaut qu’il soit souriant !
La Sagesse
Le concept paraîtra un peu démodé et rappellera à certains les penseurs antiques de nos cours de philosophie. Plus prosaïquement, si l’on accepte de confier métaphoriquement les clés de l’autobus à un leader, nous préfèrerons que celui-ci ait la tempérance de ne pas conduire de manière dangereuse et ne succombe pas à la tentation de la performance à tout prix.
La Communication
Je ne reviendrai pas sur le débat : le leader doit-il nécessairement être extraverti ? De nombreux exemples montrent l’inverse. En revanche, un leader qui ne s’exprime pas, je pense que cela n’existe pas. Pour donner envie de le suivre, le leader doit nécessairement dire ce qu’il a dans la tête (ce que l’on appelle de manière un peu galvaudée « sa vision ») et le faire de manière simple et compréhensible. Le discours va souvent au-delà des mots : les experts de la communication nous l’ont confirmé, ce que nous gardons en mémoire quand nous écoutons quelqu’un – en l’occurrence un leader – c’est davantage ce que nous avons ressenti en l’écoutant que le fond de ce qu’il nous a dit.
La Vision stratégique
Faire reposer sur le leader l’intégralité de la vision stratégique est pour moi un mythe. Mais dans des environnements tourmentés, difficiles à comprendre, l’idée peut paraître séduisante de croire qu’une seule personne puisse avoir la réponse à toutes les questions et montrer la lumière dans l’obscurité. Le leader est un contributeur, un catalyseur, un révélateur d’une vision stratégique qui n’a de toute façon de sens et de portée que si elle est fortement en cohérence avec le collectif. Une chose est cependant certaine, le leader doit être capable d’exprimer la vision stratégique, de la raconter et de la rendre attirante.
* * *
Ces qualités, je les ai observées chez un certain nombre de leaders qui m’ont inspiré chez AXA ou en dehors du groupe. Chacun pourra compléter cette liste à sa guise, mais vous conviendrez avec moi que celui ou celle doté(e) de l’ensemble de ces talents est déjà fort bien pourvu(e) pour avancer sur le chemin du leadership. Le leader n’est pas un surhomme ou une surfemme ; même si le talent de certains est grand, c’est d’abord parce que nous sommes humains que chacun peut être un leader !
Partner at August Debouzy - Corporate | M&A | Private Equity
1 ansMerci Nicolas! c'est aussi une très bonne grille d'analyse de nos leaders!
Merci Nicolas, très pertinent. J’ajouterais peut-être une 13ème qualité : le pragmatisme. C’est à dire le fait d’être ancré dans le réel. On a déjà vu des leaders hors-sol…
Délégué Coordinateur Syndical CFE-CGC et élu du CSE AXA Santé Collectives.
1 ansExcellente analyse. Très complet !
Secrétaire Générale AXA France - Membre du Comité Exécutif d’AXA France
1 ansBravo Nicolas, et merci de partager ces réflexions avec ton réseau ! J'ajouterais une phrase que j'aime beaucoup : le leader peut marcher en tête, mais il peut aussi marcher au milieu de ses troupes, ou même clore la marche.
Retraité de Lyonnaise des Eaux et du ministère de l'équipement
1 ansMerci Nicolas en plus du plaisir d’entrer en contact avec toi, je te remercie vivement de ton propose sur le leader, ta vision. Tu le dis avec des mots simples dont on a parfois oublié la profondeur, sagesse , par exemple, sa connaissance du sujet, le courage et le travail. Tu es loin du discours du consultant qui veut former des leader « hors sol ». Chez Axa il y a une belle lignée de leader derrière Mr Bebear! Bonne route et ceux qui travaillent avec toi on bien de la chance Pierre