Le système des transports du 21e siècle sera multimodal… ou ne sera pas (décarboné)...
À l’occasion d’un débat organisé par le think tank @TDIE il y a quelques semaines, j’ai eu l’occasion de rappeler un certain nombre de faits très concrets concernant les poids respectifs de la route et du ferroviaire, principales composantes du système des mobilités terrestres en France.
La route est - et restera ces prochaines décennies - la colonne vertébrale des transports et des déplacements dans notre pays : la France compte 1,1 million de kilomètres de routes et 28 000 kilomètres de réseaux ferroviaires. Elle irrigue aussi sans équivalent, et très profondément, les territoires.
Comme le souligne @BROTO André, dans son excellent ouvrage récemment paru aux @Éditions Eyrolles, 40 idées reçues sur les transports, « la très grande majorité des Français (et même des Franciliens) est amenée à faire de longs déplacements quotidiens, pour divers motifs, le plus fréquent étant le trajet vers le lieu de travail ». 2 salariés sur 3 travaillent en dehors de leur commune de résidence ̶ ce sont les « navetteurs » ̶ et leur part est passée de 58 à 64% entre 1999 et 2013.
Or malgré les dizaines de milliards d’euros consacrés au financement du ferroviaire ces dernières décennies, la part du véhicule individuel dans les voyages intérieurs est restée étonnamment stable entre 1990 et 2018 (82% vs. 81%). Cette prépondérance est constatée partout ailleurs dans l’Union européenne (et en augmentation, qui plus est : de 78% en 1995, à 80% en 2019).
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Ignorer cette réalité, c’est non seulement oublier que l’économie française se déplace essentiellement par la route (le fret est à 88% routier, 10% ferroviaire, et 2% fluvial), mais aussi fermer les yeux sur une réalité sociale éclatante, qui veut que de Brive-la-Gaillarde à Cahors, en passant par Nogent-le-Rotrou, des millions de Français ne connaissent ni TGV, ni métro, ni tramway, mais quasi exclusivement la route, pour la majorité de leurs trajets.
La prise de conscience de cette réalité, incontournable, des pratiques devrait conduire à construire un avenir des mobilités résolument multimodal. Tout comme les RER métropolitains et le fret ferroviaire, auxquels l’Etat a décidé de consacrer 100 md€, le réseau autoroutier français présente intrinsèquement un formidable potentiel de report modal – à travers des solutions telles que les lignes de cars express ou le covoiturage, pour les voyageurs, ou encore les corridors électriques, de type ERS (Electric Road System), pour le transport de marchandises – hélas aujourd’hui prodigieusement sous-exploité.
Les contours d’un grand système multimodal des transports terrestres, capable de porter la révolution écologique des mobilités nécessaires à l’avenir de la planète, sont ainsi identifiés. Il ne reste qu’à œuvrer enfin collectivement à son avènement, par-delà les oppositions obsolètes, héritées du 20ème siècle. En somme, le 21ème siècle sera multimodal – ou ne sera pas (décarboné).