Taux d'actualisation et estimation des dégâts liés au changement climatique
Simplement dit, le taux d’actualisation représente notre préférence pour le présent, ou à quel point nous dévaluons le futur. Ainsi, si je propose de vous donner 100€ aujourd’hui, à partir de quelle augmentation de cette somme accepteriez-vous que je vous la donne demain ? 105€ ? 101 € ? Au moins 200 € ? Plus vous demandez une augmentation de la somme pour accepter de la recevoir plus tard, plus on considère que vous préférez le présent au futur, et plus le taux d’actualisation est élevé. On peut dire que « le taux d’actualisation mesure cette dépréciation des valeurs futures » [1].
Une même somme d’argent a plus de valeur aujourd’hui que dans le futur, tout simplement parce que vous pouvez la placer aujourd’hui et percevoir des intérêts. Ainsi, si je vous donne aujourd’hui 100€ et que vous les placez à un taux de 3% par an, dans un an vous disposerez de 103€. On constate donc que 100€ aujourd’hui ne reviennent pas au même que 100€ dans un an.
On ne peut ainsi pas parler d’une somme d’argent sans indiquer la date à laquelle elle est disponible. Pour comparer des sommes d’argent – qui peuvent par exemple représenter les avantages et désavantages d’un projet – il est nécessaire de se ramener à une base commune, classiquement de l’argent du présent. Si on ramène une somme qu’on va acquérir dans le futur (Fn) au présent (F0), on fait de l’actualisation, et on utilise la formule :
Dans cette formule, on considère que le taux d’actualisation i est constant, et n est le nombre d’années à l’issue desquelles on accédera à la somme [2]. Ainsi, 1€ dans 25 ans vaut 0.61€ (taux de 2%), 0.3€ (5%), 0.15€ (8%) aujourd’hui [1].
Utiliser un taux élevé implique que les effets à long-terme auront aujourd’hui une valeur faible. Cela peut conduire à ne pas investir dans des projets ayant de forts rendements dans longtemps, dans le cadre de la protection de l’environnement par exemple.
Certains débats sur l’estimation du coût des dégâts futurs liés au changement climatique ou à d’autres perturbations anthropiques dépendent du taux d’actualisation choisi. Ainsi, d’après Thomas Piketty [3] le débat entre les économistes Stern et Nordhaus concernant l’évaluation de la baisse du PIB mondial à l’horizon 2100 liée aux dégâts infligés à l’environnement dépend de ce taux. Stern défend un taux de 1 à 1.5% par an alors que Nordhaus opte pour un taux de 4 à 4.5% par an (proche du rendement moyen du capital). La valeur actuelle d’une baisse de PIB en 2100, en PIB d’aujourd’hui, sera beaucoup plus faible avec le taux de 4%.
Pour résumer, le taux d’actualisation représente notre préférence du présent et le fait qu’une somme d’argent possédée aujourd’hui peut être placée et rapporter des intérêts. La question du niveau de ce taux est un point important dans le calcul de coûts futurs, notamment dans le cas de ceux engendrés par le changement climatique.
[1] Le développement durable, retenir l’essentiel. A. Berger, C. De Perthuis & N. Perin, 2018, Nathan.
[2] Cours « Calcul économique : méthodologie de choix de projets d’investissement dans l’entreprise » (AgroParisTech 2ème année), Michel Nakhla [2]
[3] Le capital au XXIème siècle de Thomas Piketty. 2013. [3]
(Nouvel Observatoire de l’Innovation Sociale et Environnementale)
Léo HOUAIRI
Very interesting read. Interesting how a similar concept exists in Reinforcement Learning (a branch of ML where an agent is rewarded for every step it takes in an environment while aiming for a goal. Notably the method used for AlphaGo or AlphaStar) except we call it discount factor. It's a variable used to let RL frameworks favor (or not) benefits now rather than in the future.