Les 5 raisons jamais dites qui font que la préparation mentale n’est pas acceptée !

La préparation mentale tarde à s’intégrer dans le monde sportif. On parle de manque d’intérêt, de remise en doute de l’efficacité... Mais voici les vraies raisons 👇

C’est trop puissant 👊

Lorsque je vais à une soirée et qu’on me demande quel métier je fais, les gens font “houa, c’est trop intéressant”. Et après ils s’offusquent : “ah oui mais tu vas rentrer dans ma tête”.

Dans l’imaginaire collectif, le mental fascine mais fait peur. Tout le monde aimerait comprendre comment se développe la confiance en soi ou la motivation. Mais avoir un cousin psychologue ça rend les repas en famille un peu angoissant.

Et il ne faut pas nier que la psycho jouit d’une certaine crédibilité intellectuelle. On s’attend facilement à ce qu’un psy ait une idée du monde. On va écouter sa théorie, on va l’inviter sur un plateau télé pour analyser tel fait de société ou évènement politique. Remarquez que c’est moins le cas pour un préparateur physique.

C’est pourquoi les joueurs savent bien que si on commence à s’intéresser au mental, on va aller vers des méandres dans lesquels ils ont bloqué toute entrée.

C’est trop Yin 🙏

La deuxième raison qui à mon sens bloque l’intégration des préparateurs mentaux est d’ordre genré.

En référence au taoïsme, le monde du sport est très masculin. La plupart des sports ont été créés par des hommes pour les hommes et sont pratiqués par une majorité d’hommes. On met en avant la force, la compétition, l’action, la domination, la dureté. Le sport est donc plutôt Yang.

A l’inverse, la psychologie est plutôt Yin, caractérisée par l’intuition, la réceptivité, la compréhension, l’empathie et la féminité.

En conséquence, un psy ou un préparateur mental, bien que homme et sportif, vient inévitablement casser les codes virils du monde sportif. Il remet en question, par sa seule présence, les critères de sélection basés sur l’agressivité et la force physique pure. Il remet en question les bizutages, l’hétéronormativité et les violences sexuelles. Ce qu'expliquent très bien Sebastien Boueilh avec Colosse aux pieds d'argile ou Ouissem Belgacem .

La littérature scientifique a elle souligné à de nombreuses reprises que le sport était un des derniers baston de l’homophobie mais plus largement, un des derniers baston de la création et du maintien d’une certaine masculinité hégémonique.

Peu de place est ainsi accordée aux consultantes féminines dans les staff, dans l’arbitrage, dans les postes à responsabilités fédérales. Et parler de ses émotions ou de ses besoins est loin d’être la norme.

Ça crée plus de problèmes que ça n’en résout 🤯

Dans la même logique, il faut reconnaitre que les psy sont des machines à trouver des problèmes. Naturellement, je pense que nous avons une logique et une pensée contradictoire.

Je me suis fait cette remarque il y a quelques semaines, lorsque j’assistais à une réunion avec le directeur d’un centre d’aide à l’enfance. Nous devions analyser la situation d’un des services dans lequel des éducateurs se sont plaints de violences à répétition pour leurs proposer, ensuite, une formation adaptée.

La psychologue du service en question était présente. Elle a passé son temps à s’opposer au directeur et à “remettre en question le système”…

Ces remarques étaient intéressantes. Mais étaient-elles pertinentes par rapport à la situation que nous devions gérer? Je ne suis pas sûr.

De fait, un psy privilégie souvent la pensée à l’action. Le Yin plutôt que le Yang.

Or, il faut savoir ne pas remettre tout en question. Il faut aussi savoir proposer autre chose comme outil que juste l’écoute et l'association libre !

Sinon, pourquoi voulez-vous que Le Graët et Deschamps fassent appel à un préparateur mental ? L’équipe de France est performante. Dans leur perception, on risquerait de leurs amener des problèmes alors que tout va très bien. (Je vous invite à lire mon article à ce sujet).

C’est trop exigeant 🧠

Quatrièmement, il faut évoquer la question du “professionnalisme” et du niveau d’exigence.

J’entends encore résonner dans ma tête la voix de Pascal Feindouno lorsque je suis arrivé dans la sélection de Guinée. On s’est retrouvé dans l’ascenseur ensemble et il m’a dit sur un ton sarcastique, avec son accent inimitable : “toi tu es un vrai professionnel”.

C’était ma première expérience dans une sélection internationale, j’étais entouré de joueurs qui jouaient dans les plus grands clubs, qui gagnaient des millions et l’entraineur adjoint me trouvait trop professionnel…

J’ai mis plusieurs jours à comprendre qu’en fait Pascal me trouvait trop exigeant.

Guinée ou pas, il est vrai que le monde du sport ne brille pas par son sérieux et son niveau d’exigence. Certes, il y a des joueurs ultra consciencieux comme Raphael Varane. Mais il y a aussi beaucoup de joueurs qui passent leur temps à jouer aux jeux vidéos, à flâner ou à scroller sur Instagram.

Pour avoir travaillé dans les différents univers du monde sportif, la constante est quand même globalement à la parasse intellectuelle.

Je ne vais pas me faire que des amis en disant ça mais donnez un cours en STAPS et vous verrez (un jour j’écrirai un article sur la filière STAPS!!). Les chefs de service des sports et les profs d’EPS sont toujours pris pour des “branleurs”. Est-ce par hasard ?

Ceci dit, demandez à des profs de lettre d’aller faire un foot, vous risquez de ne pas être déçu !

Il y a trop de charlatans 🙏

Enfin, cela fait 50 ans que la psychologie du sport existe, 15 ans que je suis dans le métier, et nous n’avons toujours pas résolu le problème de la formation. Pire, je me demande si la situation ne s’est pas aggravée.

Il y a toujours les hurluberlu du développement personnel fans de sport qui veulent proposer aux sportifs leurs services, parce qu’ils sont convaincus que ce qui a marché pour eux va marcher pour (tous) leurs clients et pour les sportifs. Et puis si on peut poser un logo du club avec lequel on travaille ça fait toujours bien auprès de la clientèle.

Bref.

Aujourd’hui, se présentent comme préparateurs mentaux un grand nombre de personnes aux formations pour le moins hétéroclites. Je pense notamment à tous ceux qui ont fait une formation en ligne, éligible au CPF, associée à l’image d’une des plus grandes institutions sportives nationale, et le tout certifié par l’état (comble du ridicule). En 20h devant l’écran et 8 outils on vous proposait de devenir préparateur mental ! Quelle supercherie !

Je milite pour la démocratisation de l’entrainement mental. Mais avec qualité.

Quelle crédibilité donner à notre métier si les formations sont si simples et accessibles ?

En conclusion, il est évident que la préparation mentale fascine mais que c’est une discipline encore en construction, au carrefour de plusieurs lignes. On doit donc organiser notre fonctionnement pour gagner en légitimité. Mais on doit aussi apprendre à casser les codes sans faire la révolution.