Les clés de l'agilité (2/5)

Les clés de l'agilité (2/5)

Et si on parlait process ? Réunions, entretiens individuels, suivi et pilotage de la performance ... que font différemment les entreprises les plus innovantes ?

2 - Les process

Tendances

La tendance la plus généralisée - et sûrement la plus importante à noter car elle contraste avec le fonctionnement d’entreprises plus traditionnelles - est la disparition progressive des réunions. La plupart des meetings sont perçus par les entreprises numériques et agiles comme des nuisances superflues, destructrices de valeur, pénibles pour les collaborateurs et sont à éviter comme la peste. 

De fait, les startups tentent au maximum de réduire leur taille, leur fréquence et leur durée - voire les suppriment complètement. Elles préfèrent s’en tenir au strict minimum, c’est-à-dire les réunions nécessaires pour cristalliser l’esprit d’équipe, pour tenir tout le monde au courant des dernières nouvelles et celles, plus courtes et plus réduites, qui permettent de prendre des décisions opérationnelles pour la journée ou pour la semaine.

Les fameux “daily stand-up” sont de bons exemples de cette tendance. Il s’agit d’une réunion quotidienne où tous les membres d’une petite équipe produit (une squad) sont invités à se rendre, mais qui n’est pas décalée si l’un d’entre eux est absent. Elle ne dure que 5 à 15 minutes, a lieu à la même heure tous les jours et par le même canal (présentiel ou en ligne pour les équipes distribuées). Leur objectif est de permettre aux collaborateurs de faire un point de coordination sur les tâches en cours, les difficultés rencontrées et le programme du jour. Une réunion courte, active, qui crée de la valeur pour ses participants.

D’autres, plus proches dans leur tailles et leurs enjeux d’une grande entreprise traditionnelle (comme Airbnb), ont tout de même décidé de rendre leurs réunions productives et créatrices de valeur en s’inspirant des méthodes d’Amazon. Chez le géant du e-commerce, les présentations Powerpoint sont interdites. Chaque réunion est encadrée par un owner (responsable), qui rédige un mémo de 2 à 6 pages distribué à chaque participant pour une lecture silencieuse lors des 10 premières minutes de la réunion. Ce mémo présente la décision à prendre au cours de la réunion et les éléments importants pour le faire, à l’aide d’une structure problématique et narrative :

  • Auparavant, les choses ressemblaient à …
  • Mais entre temps, il s’est passé …
  • Nous devrions donc faire …
  • Pour que dans le futur, les choses puissent ressembler à ... 

Une autre tendance notable à l’oeuvre dans les startups est la propagation d’une culture du feedback systématisé. Il ne s’agit pas là de revues bisannuelles de la performance d’un collaborateur, mais bien d’une hygiène permanente de la prise de pouls de ses équipes. 

Cela a plusieurs vertus : 

  • le feedback permet de désamorcer les situations conflictuelles avant qu’elles n’arrivent et donc de créer plus d’engagement et de rétention au sein de l’équipe ;
  • le feedback permet aux individus de développer leurs compétences et de s’améliorer en continu (comme le produit dans la méthode agile).

Enfin, les entreprises numériques ont tendances à piloter la performance de leurs équipes et à gérer les objectifs business des collaborateurs dans une vision beaucoup plus dynamique qu’auparavant. Ce sont les OKR (Objectives & Key Results) et les OGSM (Objectives, Goals, Strategies & Measures) qui servent de méthodes phares du planning stratégique, du niveau de l’entreprise jusqu’au niveau individuel.

Exemples

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Alan est la première assurance-santé digitale. Avec plus de 75 millions d’euros levés depuis sa création en 2016 et des dizaines de milliers d’assurés, Alan fait sans aucun doute partie de la fine fleur des startups françaises. Et chez Alan, pas de réunions

Tous les meetings sont remplacés par des prises de décisions écrites. L’écrit a plusieurs vertus, selon les managers d’Alan : 

  • Il permet de travailler à distance et de manière asynchrone ; 
  • Il permet de corriger certains biais naturels (tendance de certains à moins parler, à donner raison à celui qui parle le plus fort ou qui parle en dernier) ;
  • Il est engageant et clair ;
  • Il permet à quiconque n’était pas présent au moment T de récupérer l’information ;
  • On peut y revenir pour vérifier ce qui a été dit, commenter ou continuer le débat ;
  • Il s’adapte au temps de chacun et permet une plus grande productivité.

Seulement quelques réunions subsistent chez Alan, comme une réunion de moins d'une heure tous les mois, avec l’ensemble des collaborateurs ; qui permet de partager les dernières nouvelles du business ou du produit, de présenter les nouveaux venus, et à chacun de poser des questions générales sur la culture de l’entreprise ou son avenir.

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Chez Alan, la culture du feedback est également éminemment présente. Elle se construit autour d’une valeur que les fondateurs d’Alan ont puisée dans un livre sur le management : la Radical Candor, c’est-à-dire la transparence radicale. Les moment où se cristallise le feedback sont les one-on-one, échange privilégiés et réguliers entre un manager et son managé. La question primordial du “coach” de circonstance : “Comment est-ce que je peux t’aider à grandir et à apprendre plus ?”

Pour Alan et beaucoup d'autres startups :

  • Le feedback n’est jamais personnel : on donne un avis sur une action donnée, à un moment donné, dans un contexte donné. La théorie sous-jacente est celle du SBI (Situation-Behaviour-Impact). On ne porte jamais d’avis sur l’essence de la personne.
  • Le feedback est un muscle : les nouveaux venus sont entraînés le plus tôt possible et le plus fréquemment possible à donner leur avis, mais aussi à accepter l’avis des autres, afin que cela devienne un réflexe.
  • Le feedback est un cadeau : une personne qui donne un feedback prend le temps de considérer le travail effectué par un autre et de lui donner des pistes d’amélioration. Cela doit toujours être vu comme un témoignage d’affection, ou du moins de respect.
  • Le feedback est radicalement transparent : on peut dire tout ce que l’on pense, de manière très directe.
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Alan, comme beaucoup d’autres startups, est également adepte de la méthode des OKR, initiée par Peter Drucker, Andy Grove et John Doerr. En résumé, les objectifs et résultats clés sont définis au niveau de l’entreprise, puis des petites équipes (squads) sont formées avec toutes les compétences requises pour atteindre ces objectifs. Cela permet à chaque individu de composer sa propre scorecard (cf. zoom outil Les scorecards chez Comet).

La méthode OKR est une méthode de management qui définit des objectifs associés à la mesure de résultats clés. Ils peuvent être associés à un groupe ou à un individu. Le O (Objectives) indique où vous souhaitez aller, et les KR (Key Results) indiquent si vous y êtes parvenu, et sinon pourquoi.

En général, il ne faut pas plus de  3 à 5 OKR par groupe ou par individu, sous peine de perdre son focus. On mesure leur complétion de 0 à 100%, en visant en général 60 à 70% de complétion (sinon, le KR attendu n’était pas assez ambitieux).

La visée finale des OKR est d’atteindre un alignement des objectifs et résultats attendus, de l’entreprise jusqu’à l’individu. Ainsi les KR des managers doivent être repris dans les objectifs de l’équipe.

Exemple : Une équipe de football américain jouant le Superbowl

Au premier niveau, OKR du General Manager 

  • Objectif : Rapporter de l’argent aux investisseurs
  • Key results : Gagner le Superbowl, remplir le stade à 88%, vendre le joueur star avec 10M$ de plus-value 

Au second niveau, OKR des :

1. Head Coach

  • Objetif : Gagner le Superbowl
  • Key results : être premier au classement d’attaque NFL, ...

2. Head of PR

  • Objectif : Remplir le stade à 88%
  • Key results : mettre en avant les joueur stars, …

Et au troisième niveau, OKR du joueur star

  • Objectif : Gagner le Superbowl
  • Key results : marquer X touchdown par match en moyenne, ...
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À retenir

  • Dans les équipes agiles et transverses, les réunions sont évitées. On préférera une culture de l’écrit, plus productive, asynchrone et adaptée à de nouvelles manières de travailler.
  • S’il est nécessaire d’établir des réunions, celles-ci peuvent être rendues plus productives : soit en en faisant de petits points opérationnels tournés vers des objectifs de court terme et quotidiens, soit en les préparant de manière satisfaisante en amont, avec une personne en charge de la réunion (mémo + timekeeper + résultats).
  • Le feedback est un élément essentiel de la manière de fonctionner des équipes agiles. Il suppose surtout la mise en place d’une culture qui l’accepte et qui lui fasse de la place. Les outils pour le récolter ou le promouvoir sont nombreux.
  • Pour piloter les objectifs et la performance de l’entreprise ou de l’équipe, des éléments simples de planning stratégique sont souvent mis en place. Il s’agit d’OKR, qui alignent les objectifs de l’équipe avec ceux des individus, et se comprennent simplement.
Maxime Girard

Product Marketing | Data, AI, Web3

5 ans

C’est important de prendre le temps pour traiter ces sujets…

Andrea Romoli

🚀 Facilitatore LEGO® SERIOUS PLAY®, Design Sprint & Design Thinking 🔍 Problem Solver | Innovator | Strategy Enthusiast 🌟 Helping Companies Navigate Innovation

5 ans

Bravo Younes ! J’attends la suite 👍

J’ai appris plein de choses, merci Younes

Ambroise de La Gorce

Entrepreneur & Product guy - previously (co)founded 5 startups and continuing to build!

5 ans

Hâte de voir la suite !

Serhii Halchuk

Strategic B2B Marketing Leader | IT/SaaS Growth Expert | Building High-Performance Digital Marketing Teams & Systems

5 ans

👍

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