Les différents types de prélèvements mammaires

Les différents types de prélèvements mammaires

La biopsie d’une lésion du sein est un geste courant des radiologues spécialisés en imagerie sénologique. L’objectif est l’obtention d’un diagnostic cyto/histologique d’une anomalie mammaire permettant une réduction des chirurgies inutiles des lésions bénignes et une meilleure prise en charge des lésions malignes. Pour ce faire, toutes les lésions classées BIRADS 4 (A, B, C) et 5 doivent faire l’objet d’un prélèvement, ainsi que, dans certains cas, les lésions BIRADS 3 (contexte de traitement hormonal, procréation médicalement assistée, évaluation préopératoire, contexte oncogénétique). Les kystes BIRADS 2 peuvent faire l’objet de ponctions évacuatrices si ceux-ci sont symptomatiques.

Plusieurs types de biopsies, toutes guidées par l’imagerie, sont possibles. Le choix de la technique de guidage est fait prioritairement en fonction du mode d’imagerie permettant de voir le mieux la lésion tout en gardant à l’esprit l’importance de l’accessibilité de la modalité d’imagerie et des coûts de la procédure. Dans la majorité des cas il s’agira d’un guidage par échographie, parfois par mammographie voire par IRM.

Toute biopsie de sein sera précédée d’une information orale de la patiente, d’une asepsie cutanée et d’une anesthésie locale. La gestion avant biopsie des traitements anti-agrégants et anticoagulants suit les recommandations de la société d’imagerie de la femme (SIFEM) reproduites ci-dessous.

 

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D’après les recommandations de la société d’imagerie de la femme (SIFEM)

Biopsie mammaire guidée par échographie :

  • Microbiopsie : aiguille de calibre 14G ou 16G à débattement automatique, notamment pour les anomalies de type «masse», avec au moins 3 prélèvements minimum si possible (SENORIF, taux de faux-négatifs très bas avec 3 prélèvements). Également utilisable dans le bilan d’extension ganglionnaire des cancers du sein (16-18G). Des photos d’échographie seront réalisées avec aiguille en place dans la cible selon 2 clichés orthogonaux. Ce type de biopsie représente la très grande majorité de l’ensemble des biopsies mammaires réalisées.

Les performances diagnostiques sont très bonnes (taux de faux négatifs variant entre 0 et 9% 1)). Il existe cependant un faible risque de sous-estimation des lésions notamment dans le cas de lésions de type microcalcifications ou de lésions sclérosantes complexes pour lesquelles une macrobiopsie sera préférable (la présence d’hyperplasie canalaire atypique sur microbiopsie est associée à la présence de carcinome in situ ou carcinome infiltrant dans plus de 56% des cas). Un diagnostic de carcinome in situ est « upgradé » sur l’histologie de pièce de tumorectomie dans 16 à 55,5% des cas (1).

 

  • Macrobiopsie avec système d’aspiration : aiguilles de plus gros calibre entre 8 et 10G, utilisée pour le diagnostic de lésions « non masse » visibles en échographie, en cas de discordance radio-histologique après une première microbiopsie, de lésions volumineuses pour avoir un échantillonnage représentatif ou au contraire de petites lésions (≤ 5mm) afin de diminuer le risque d’une erreur de ciblage). On peut également utiliser la macrobiopsie sous guidage échographique en remplacement de la chirurgie pour l’exérèse de lésions bénignes sans atypie déjà analysées en microbiopsie après validation en RCP et décision partagée avec la patiente (lésions B3 de type papillome, cicatrice radiaire, néoplasie lobulaire in situ, métaplasie cylindrique atypique (2)). Les limites de cette technique alternative à la chirurgie sont la taille lésionnelle de 20 mm maximum et une distance d’au moins 5 mm à la peau. La lésion sera fragmentée par la procédure et il n’y aura pas de marge histologique.

 

  • La cytoponction à l’aiguille fine, plus rarement réalisée, est également possible, notamment pour confirmer la bénignité d’une lésion mammaire ou pour explorer les ganglions axillaires. Cette technique est réalisée uniquement dans certains centres car elle nécessite l’analyse du rélèvement par un médecin spécialisé en cytologie. Dans ces conditions, la sensibilité de la cytoponction ganglionnaire (Se 72,2%, IC95% 63,9-79,3%) est équivalente à celle de la microbiopsie (Se 83,3%, IC95% 70-91,4%, p = 0,13) (4) à l’exception du cas particulier du bilan d’extension d’un carcinome lobulaire infiltrant où il faudra privilégier la microbiopsie dont la sensibilité est bien meilleure (86% contre 55%, p< 0,001(3,4)). En cas de kyste du sein symptomatique, on pourra également proposer à la patiente une évacuation du contenu liquide par ponction à l’aiguille fine.

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Comparaison entre aiguilles de macrobiopsie 7G, aiguille de microbiopsie 14G et aiguille de cytoponction 21G (1) d’après O’Flynn et al.Clin Radiol 2010 ).
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Exemple de lésion mammaire BIRADS 5 diagnostiquée par microbiopsie sous échographie a. Tomosynthèse de face gauche : lésion spiculée de l’union des quadrants externes ; b. Correspondance avec une cible échographique de forme irrégulière hypoéchogène atténuante ; c. Microbiopsie sous échographie avec aiguille en place selon deux incidences orthogonales. Diagnostic histologique de carcinome infiltrant de type non spécifique.

 

Biopsie mammaire guidée par mammographie :

Sur table dédiée (patiente allongée sur le ventre) ou sur système adapté au mammographe (patiente allongée ou assise), associé au système de macrobiopsie avec aspiration. Concerne essentiellement les foyers de microcalcifications, les distorsions architecturales non visibles en échographie. Entre 6 et 12 prélèvements en 8 ou 10G sont nécessaires. Le système de biopsie assisté par aspiration a été développé pour pallier aux limites de la microbiopsie. Il est notamment indiqué quand des prélèvements plus conséquents sont nécessaires notamment dans les cas de microcalcifications et distorsions architecturales, ce qui permet de réduire significativement les taux de faux négatifs (1,3 à 3,3 % (5)).

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Foyer lâche de microcalcifications d'environ 3 cm de l'union des quadrants supérieurs du sein droit, classé ACR 4, dont l’analyse histologique a montré « un foyer de mastose associé à une petite cicatrice radiaire de 3mm, l’ensemble étant au contact de calcifications. Absence d’atypies. »

  

Biopsie mammaire guidée par IRM :

Concerne les lésions visibles seulement en IRM, sans traduction sur la mammographie ou sur l’échographie (n’est donc réalisé qu’après un bilan de second look car on retrouve une cible échographique ou mammographique dans environ 60% des cas). La macrobiopsie de sein par guidage IRM consiste à réaliser une nouvelle IRM avec injection de produit de contraste, en abord de profil externe (plaque à trous) en ciblant le rehaussement pathologique avant de procéder à une macrobiopsie avec système d’aspiration (entre 6 et 12 prélèvements). Le guidage des biopsies par IRM reste peu fréquent car cela nécessite un temps d’examen prolongé pour la technique d’imagerie qui reste probablement la plus difficile d’accès (avec une cotation CCAM défavorable) et est pratiquée uniquement dans les centres d’imagerie spécialisés en imagerie sénologique. Elle est néanmoins indispensable, notamment pour la prise en charge des patientes à haut risque de cancer du sein chez lesquelles l’IRM peut être la seule modalité d’imagerie permettant de mettre en évidence l’anomalie.


Pose d’un clip :

Un marqueur post biopsie ou « clip » peut être posé au décours des procédures de biopsie mammaire, indépendamment du mode de guidage. Le clip est un petit objet, souvent métallique, de quelques millimètres, totalement inerte, sans complication, dont les références sont conservées (traçabilité des dispositifs implantables obligatoire). Il en existe de différentes formes afin de pouvoir distinguer les différentes cibles en cas de biopsie multiple.

 

Les principales indications de la pose d’un clip regroupent les cas de :

  • biopsies de microcalcifications très étendues pour repérer le lieu de la biopsie,
  • biopsies d’un petit foyer de microcalcifications dont l’exérèse peut être totale lors de la macro biopsie,
  • de très petites lésions « masse » ≤ 5mm ou de lésions endo canalaires dont le geste biopsique peut modifier l’aspect et être plus difficiles à retrouver si une chirurgie s’avérait nécessaire.
  • au décours immédiat d’une procédure de biopsie pour une volumineuse lésions acr 5 et/ou si présence d’adénomégalies (suspicion de ttt néo adjuvant).
  • après macro biopsie d’exérèse sous échographie.

 

La biopsie mammaire est un geste bien toléré, fiable avec un taux global de faux négatif estimé entre 1,2 et 6,7% (le taux de faux négatif de la chirurgie est également variable entre 0 et 8% (1)), le plus souvent sans complication associée. Les complications les plus fréquentes sont : douleur modérée, hématome (risque diminué par un pansement compressif pendant 48h en général), migration de clip, infection (rare, surtout chez patientes diabétiques et en cas de ponction de kyste sébacés).

Les prélèvements réalisés sont adressés au laboratoire d’anatomo-pathologie qui envoie ses conclusions aussi bien au médecin référent de la patiente qu’au radiologue préleveur (ce qui fait l’objet d’une facturation à part).

Le radiologue s’assurera de la concordance entre l’image radiologique et son classement BIRADS avec le résultat histologique. Les cas de discordance doivent faire l’objet d’un nouveau prélèvement, généralement de plus gros calibre voire d’une chirurgie et d’une discussion avec le clinicien.

 Article rédigé par le Docteur Emmanuelle CAUDERLIER d' Imagerie Cardinet

Bibliographie

1-   O’Flynn EAM, Wilson ARM, Michell MJ. Image-guided breast biopsy: state-of-the-art. Clinical Radiology 2010; 65: 259.

2-   Rageth CJ, O’Flynn EAM, Pinker K et al. Second International Consensus Conference on lesions of uncertain malignant potential in the breast (B3 lesions). Breast Cancer Research and Treatment 2019; 174: 279.

3-   Référentiel diagnostique et thérapeutique SEIN-SENORIF 2021-2023

4-   Jackman RJ, Nowels KW, Rodriguez-Soto J, Marzoni FA, Finkelstein SI, Shepard MJ. Stereotactic, Automated, Large-Core Needle Biopsy of Nonpalpable Breast Lesions: False-Negative and Histologic Underestimation Rates after Long-term Follow-up. Radiology 1999; 210: 799.

5-   Jackman RJ, Burbank F, Parker SH et al. Atypical ductal hyperplasia diagnosed at stereotactic breast biopsy: improved reliability with 14-gauge, directional, vacuum-assisted biopsy. Radiology 1997; 204: 485.

Morgane Kammer

Ingénieur commercial | Mammotome | Danaher | Medical Device | Breast cancer

1 ans

Félicitations Dr emmanuelle cauderlier ! Article très intéressant.

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