L'insoutenable légèreté de l'humanité

L'insoutenable légèreté de l'humanité

Une bonne partie de l’humanité semble prendre en pleine face comme une prise de conscience: à savoir son insoutenable légèreté.

Insoutenable légèreté dans son outrecuidance d’avoir oublié sa fragilité initiale et pourtant naturelle: d’être simplement des êtres humains, physiquement et physiologiquement sensibles à ce qui les entoure au même titre que l’ensemble de la matière vivante de notre si petite planète. Sans doute aveuglée, était-elle, par sa place supposée en haut de l’échelle de l’humanité. Manifestement, cette supériorité présumée avait comme un trou dans la raquette, certes tout petit puisque de la taille de l’infiniment petit, le rendant ainsi invisible, inodore, impalpable et imprévisible: un virus. Un organisme simplement vivant, sans intelligence, sans valeurs, sans conscience, aveugle, sans moyen logistique, opérationnel, financier ou de tout autre attribut dont nous avions fini par croire jusque là qu’ils étaient des clés essentielles de supériorité.

Insoutenable légèreté dans son excès de confiance en elle et ses capacité à croire qu’elle pouvait tout maitriser, par la technologie, la science, l’économie, la finance, que sais-je encore? Elle s’est ainsi, pour une bonne partie, égarée en ne se prévenant pas de ce qui est pourtant essentiel: les moyens de sa santé collective. Il est assez cocasse - en fait le bon terme serait dramatique - de constater que nombre de pays sont confrontés maintenant aux mêmes constats: les réserves avaient été diminuées au regard de la certitude qu’il leur serait facile de s’approvisionner juste sur demande.

Et soyons clairs et réalistes, nous en sommes sans nul doute tous individuellement responsables. Car finalement, qui depuis des années, soit au nom d’une influence politique, d’une opposition sociale opposant le privé au public, d’une approche macro-économique, financière et/ou comptable, ou plus simplement parfois de la simple bêtise, a poussé la seringue dans notre propre appauvrissement? En vérité, rien de nouveau dans nos comportements: « Nos concitoyens n’étaient pas plus coupables que d’autres, ils oubliaient d’être modestes, voilà tout, et ils pensaient que tout était encore possible pour eux, ce qui supposait que les fléaux étaient impossibles »*.

Insoutenable légèreté de l’humanité à continuer de ne pas se comporter comme tel, voyant poindre ce qu’elle peut montrer de plus négatif. Des rivalités d’états au travers de mises en concurrence sur les approvisionnements (entrainant parait-il des négociations jusque sur les tarmacs d’aéroport pour tel ou tel équipement médical), aux nouveaux protectionnismes qui s’installent pouvant même aller jusqu’à une certaine forme de nationalisme. Ces comportements n’excluent évidemment pas les individus avec l’apparition de petits trafics, le retour des resquilleurs, des égoïsmes voire des petits racismes quotidiens.

L’humanité est maintenant au moins pour moitié confinée, comme en suspend, et pour un temps indéterminé. Les rues et places sont pratiquement désertes. Les interactions humaines se font maintenant essentiellement au travers de moyens de communication, qu’ils soient dans le meilleur des cas oraux voire vidéo à travers les nombreux moyens de communications à notre disposition. De nouvelles formes d’échanges et de rendez-vous apparaissent ainsi (apéros partagés, tutos, challenges virtuels…). De nouvelles solidarités aussi apparaissent, comme des notes d’espoir. Car peut-être tout ne sera pas perdu:

« Permettez-moi, habitants de ce pays,

Dans ces heures de tourment de l’âme

De vous souhaiter depuis l'enfermement

Une bonne grande fête du printemps !

Tout s’arrangera, tout passera,

Les douleurs et les angoisses disparaîtront,

A nouveau les routes deviendront lisses

Et le jardin, comme autrefois, fleurira.

A notre aide nous appellerons l’esprit,

Nous enlèverons la maladie par la force de la connaissance

Et aux jours de dures épreuves

Nous survivrons en une seule famille.

Nous deviendrons plus purs et plus sages

Ne cède pas à l'obscurité et à la peur,

Reprenons courage et les uns avec les autres

Nous deviendrons plus proches et plus gentils.

Et qu’à la table de fêtes

Nous nous réjouissions à nouveau de la vie,

Que le Très-Haut envoie ce jour-là

Un morceau de bonheur dans chaque foyer ! »**


* La Peste - Albert Camus - 1947

** Alexandre Sergueïevitch Pouchkine - 1827

Bel article . Nous sommes des funambules sur le fil ténu de la Vie et oublieux que nous ne sommes qu’un infiniment petit bien fragile dans l’infiniment grand . Légèreté dictée par l’insouciance la plus favorable analyse de l’humain mais ....

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