L’océan, terre d’innovations
La table ronde intitulée Océan : une source d’innovation et de solutions pour le futur de la planète a permis de rappeler toute la grandeur de ce milieu, elle a fait émerger l’ampleur des potentialités sans négliger sa fragilité.
Quatre intervenants issus du monde de la recherche, du secteur privé et public se sont retrouvés ce jeudi à l’occasion de la table ronde intitulée Océan : une source d’innovation et de solutions pour le futur de la planète. À cette occasion, Nabila Gaertner-Mazouni, vice-présidente commission recherche de l’université de la Polynésie française (UPF) et modératrice de la table ronde a rappelé des chiffres qui « donnent le tournis ». Pas moins de 70 % de la si mal nommée Terre est couverte de mers, 75 % de l’océan plonge à plus de 3 000 mètres de profondeur. L’un des principaux « poumons » et « garde-manger » de la planète reste « mystérieux ». Il est peu, voire pas connu. Les sédiments des grandes profondeurs affichent une biodiversité trois fois supérieure à celle des milieux côtiers à en croire Guillaume Mitta de l’Institut français de recherche pour l’exploitation de la mer (Ifremer). Ce qui laisse présager d’innombrables découvertes et innovations.
Bernard Costa, fondateur et président de la société Pacific Biotech a pu témoigner des potentialités de l’océan. « C’est un espace d’innovation tout naturel. » Sa société, après avoir effectué des prélèvements puis l’identification de bactéries vivant en milieu extrême en Polynésie, a mis en production industrielle des molécules d’intérêts (fabriquées par les bactéries). Cédric Ponsonnet, directeur de la Direction des ressources marines (DRM) a indiqué à ce propos tout l’intérêt du biomimétisme. « Il nous faut, en termes d’innovation, prendre exemple sur les écosystèmes. Nous avons bien vu que la monoculture par exemple ne fonctionne pas, elle est attaquée par la nature elle-même. » D’où le lancement d’une aquaculture multitrophique intégrée, une aquaculture qui associe l’élevage de plusieurs espèces.
Pour Christophe Carbou, directeur du pôle innovation de la Technopole de Nouvelle-Calédonie, ce qui à première vue passe pour des contraintes, comme l’étendue des espaces, peut se présenter comme une chance. La Nouvelle-Calédonie par exemple dispose d’une aire marine protégée d’1,3 million de km2, elle est la plus grande aire marine française. Sa surveillance a longtemps posé question. Des solutions innovantes ont pu voir le jour, comme la surveillance par drone.
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Pour permettre cette innovation, l’existence d’un écosystème propice et l’accès à des financements sont des indispensables. L’écosystème est en cours de structuration en Polynésie française avec « Polynésie, Océan d’innovation », la stratégie de l’innovation 2030. Il permettra l’accès aux financements. Guillaume Mitta qui a insisté sur l’importance de lier recherche fondamentale et recherche appliquée a reconnu qu’il existe un fossé sur le chemin de l’innovation. « Il s’agit de ce que nous appelons Vallée de la mort » a ajouté Christophe Carbou. La Vallée de la mort est ce moment entre la fin de la recherche fondamentale et le début d’une possible exploitation. Elle est une phase d’exploration que personne ne souhaite prendre à sa charge. « Le chercheur dit, ce n’est plus de mon ressort, l’entrepreneur répond que ce n’est pas encore du sien. » Cédric Ponsonnet, en complément a mentionné l’émergence de la finance bleue et des crédits carbone.
Enfin, l’ensemble des intervenants, d’une voix commune, a insisté sur la durabilité de toute innovation. « Les écosystèmes tropicaux vont subir les changements climatiques de plein fouet car ils n’expérimentent pas au quotidien de grande variabilité », a explicité Guillaume Mitta. Pour eux et pour le reste de la planète, le respect de l’environnement est de mise. « Protéger la nature avec profit » comme l’a évoqué é en matinée Heiura Itea-Tetaa, présidente de la French Tech Polynésie.
Crédit photo : Delphine Barrais.