Métamorphose
Cet article (Le véritable échec de Nicolas Hulot. Les Echos. Eric Le Boucher. 12/07/2018) me laisse perplexe tant par le fond exprimé que par la forme utilisée. En effet s’agit-il vraiment d’opposer économie et écologie? De quelle économie parle-t-on?
Je ne peux m’empêcher de penser que le mot croissance du PIB, libéralisme, productivisme, et par conséquent hyper-consommation sont sous-jacents de la pensée de l’auteur dans cet article... nous serions alors dans une incitation à croire qu'une seule économie ne serait possible, que nous serions logiquement obligé de nous y plier, et par là même, "d'adapter" tout ce qui fait humanité et nature sur cette terre à la pensée globale d'une économie de marché libérale et productiviste. Bref, par raison ou par aveuglement, une seule voie de progrès serait possible et nous devrions la suivre à tout prix. Absurde. La vraie question serait plutôt: "Quelle économie devrions nous inventer pour quelle soit compatible avec l’urgence écologique et une transition durable?" Avec son corolaire, celui des indicateurs qui permettront d’en mesurer les résultats. Cela est tout à fait possible, et nous en avons les capacités sur un temps long d'une vingtaine d'années.
La Cause Animale nous alerte philosophiquement sur cette nécessaire altérité et sur notre responsabilité , en tant qu'être humain, nous rappelant l'essence même de l'humanisme. Elle nous propose d'inventer de nouveaux modèles de vie et de régulation positive des activités humaines, en total respect de tout ce qui vit sur cette terre. S'agit-il alors de décroissance ou de métamorphose? Chacun son chemin, mais les modèles anciens sont devenus obsolète et le temps de la sagesse est bien venu."Cela n’a plus de sens d’opposer le non-spécisme et l’humanisme." (Corine Pelluchon)
Vu sous cet angle, l’approche s’éclaire, et devient totalement différente. Au lieu de contraindre l’écologie aux objectifs économiques, avec les conséquences que l'on vit aujourd'hui, ou au contraire d’éradiquer l’économie au profit de l’écologie, on propose ici une métamorphose de notre économie, une transformation systémique progressive de nos activités humaines.
"Or, comme le dit Montaigne dans l’Apologie de Raimond Sebond, au Livre 2 des Essais, chaque espèce peut considérer que, de son point de vue, elle est supérieure aux autres. Certes, la vie de votre animal n’a pas la même importance que la vie de votre épouse. Mais, au lieu de parler de hiérarchie, il vaut mieux parler d’altérité." (Corine Pelluchon : «La cause animale est la cause de l’humanité». Libération 16/01/2017)
Dans cette logique les mots ont un sens et formatent la pensée collective. Ils sont ici l'expression même des indicateurs de cette économie métamorphosée. Le mot efficience remplacerait le mot efficacité, l’IDH remplacerait le PIB, le RSE ne serait pas seulement la Responsabilité Sociale des Entreprises mais deviendrait Résultat Social et Environnemental, la Ressource Humaine deviendrait Richesse Humaine, la performance boursière serait remplacée par la performance de frugalité, le Revenu Universel deviendrait la juste rémunération de toutes activités humaines qu'elles soient productives, sociales, intellectuelles, bénévoles, culturelles...., l’autonomie alimentaire remplacerait la production agricole. De nouvelles formes de "marchés" telles que le troc, le recyclage, l’autonomie énergétique, seraient les vecteurs de progrès. La recherche scientifique serait orientée vers le bien-être, le respect de toute vie sur terre et la simplification des flux de biens et de personnes...
Vu sous cet angle, la réponse au dilemme (conflit) entre économie et écologie devient évidente, parce que cette perspective en fait des alliées et non pas des concurrentes. Mais aussi supprime toute opposition entre décroissance ou croissance (celle du PIB), puisque ces mots n’auraient plus de sens au regard des futurs paradigmes et des futurs objectifs. On sortirait enfin de cette idée qui a fait la vertu du productivisme, celle qui considérait que la croissance du PIB assurait le plein emploi et le bonheur des gens; ce fût le cas des 30 glorieuses, la promesse à court terme du productivisme étant largement atteinte sur le court terme, satisfaisant les besoins sociaux et les aspirations de vie des populations, pour le malheur du rapport Meadows qui prédisait les dérèglements environnementaux et l'épuisement des ressources et qui préconisait déjà des formes de décroissance, par opposition à la sacro sainte croissance du PIB. Mais aujourd’hui, force est de constater que les mêmes moteurs de performance économique ne satisfont plus de façon objective le bonheur humain, la croissance ne générant plus l’emploi nécessaire à assurer aux gens les revenus suffisant à payer leurs besoins élémentaires, l'apparente élévation du niveau de vie mondial masquant des disparités insoutenables et des catastrophes environnementales aujourd'hui visibles. Mais aussi, ces moteurs, élevés au rang de croyances oligarchiques, enferment les gens dans une dépendance de systèmes devenus opaques et incontrôlables (transports ferroviaires, accord commerciaux internationaux, normes, production d’énergie, réseaux alimentaires...) par leur gigantisme et leur complexité, et rendent aveugles et sourds les dirigeants économiques et politiques aux dégâts sous-jacents. Nous avons même réussi à générer un système éducatif mondial dont le seul but est « l’employabilité » de nos jeunes !?
Voir la thèse de Damien Detcherry, dont je partage l'analyse, même si le chemin de la métamorphose diffère un peu... encore que cette question du pouvoir est essentielle.
Nous le savons bien au fond de nous, le bonheur de l'Homme se trouve dans l'harmonie avec la Nature.
Pour le coup, le débat, la rupture, la dichotomie, entre bonheur de l’Homme et respect de l’environnement deviennent obsolètes.... Les deux sont en train d’être détruits. Nous le savons bien au fond de nous, le bonheur de l'Homme ne peut se trouver que dans l'harmonie avec la nature. Toutes les sagesses du monde nous l'enseignent, les Lumières nous l'avaient dit, la révolution industrielle l'a oubliée, le libéralisme et l'hyper consommation l'ont enterré. Aussi, et je dirais enfin, la cause de l’écologie n’est plus seule, elle est aussi la cause humaine.
Il nous faut donc entrer positivement dans cette nouvelle façon d'appréhender les activités humaines. Inventer cette nouvelle économie, avec ces nouveaux indicateurs n’est pas une mince affaire, la problématique du pouvoir s’imposant préalablement, en particulier dans les démocraties éclairées. C'est bien aussi une affaire de choix politique, sinon quoi? Et ce choix vers la métamorphose trouvera son tremplin dans les forces populaires, si la ligne est claire, si on allie social et écologie, économie et écologie, et si on montre dans les actions de proximité, dans l'exemplarité, que tout cela va vers le mieux. La promesse du productivisme économique, qui est maintenant totalement épuisée, peut être avantageusement remplacée par la promesse de ce qu'on pourrait appeler par symétrie "un écologisme économique". Que dire? Nous en avons l’intelligence collective, nous avons la conscience que cette crise majeure est aussi une opportunité, et nous ne partons pas de rien. Comme ces expériences réussies dans l’Economie Sociale et Solidaire, dans ces Innovations Territoriales, dans ces économies de la fonctionnalité, Darwin à Bordeaux, Ayen en Corrèze ou les fermes des zadistes de Notre Dame des Landes... Il suffit de le vouloir, il suffit de ne plus participer à l'économie productiviste, il suffit de le faire ensemble. Le peuple français a toujours été un pionnier, le sera-t-il une nouvelle fois? Je lui fait confiance, il en a le talent, pourvu que l'envie lui vienne.
Je remarque au passage, menant par ailleurs des travaux concernant le management humaniste (entreprise libérée, management bienveillant, etc...) et concernant l’innovation territoriale, que les organisations ou les entreprises engagées dans ces voies sont aussi celles qui sont le plus engagées pour la cause environnementale. Sans développer ici cette approche, ce serait trop long, c’est ce qui m’a conduit à parler d’innovation frugale et de révolution tranquille (métamorphose?), rejoignant ainsi les approches positives et constructives de gens emblématiques comme Cyril Dion (Demain), ou de gens moins connus et qui agissent au quotidien sur nos territoires comme FX Leuret (Soliha) ou Benoit Dandine (Positive Action) ou Marie Emanuelle Favé (Ouishare) ici en Aquitaine, et pleins d’autres encore qu'ils me pardonnent, pour la recherche de ce chemin d’équilibre basé sur le mieux-être, la bienveillance, la responsabilité individuelle, le pragmatisme opérationnel, le partage, l’efficience et le total respect de l’environnement.
Encore un peu d’effort, et nous sortirons de cette dichotomie destructrice économie-écologie pour entrer dans cet autre-chose impossible à décrire avec le sens actuel des mots que nous utilisons (croissance, décroissance, durable, ...). Changement de paradigme ou métamorphose? ou les deux?
M'enfin!
Jean-Louis Blouin - 30 Aout 2018.
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6 ansPour que nos enfants restent émerveillés le plus longtemps possible et transmettent cet émerveillement 🤩
President Biotech Dental Group
6 ansAlain ! Sorry
President Biotech Dental Group
6 ansBrillante analyse jean louis - merci pour ces mots qui forgent et enracinent les opinions qui doivent être les nôtres