Ma vie ne tourne plus autour de l'autisme (même si ça a été le cas)

Ma vie ne tourne pas autour de l'autisme. Je ne SUIS pas autiste. Je suis qui je suis, et l'autisme de type Asperger fait partie des briques de ma personnalité et de mon quotidien. 

Si je me définis en tant qu'autiste, mon chemin devient étroit et difficile. Parce que si c'est ce que je suis, alors pour continuer à l'être il faut que je vive pleinement tout ce qui y est associé. C'est presque comme si je me forçais à être malheureuse, à avoir du mal à vivre certaines choses. Bien sûr des fois ça peut arranger :-) mais globalement... Quelle tristesse ! Et quel paradoxe aussi ! On parle de profils qui ne rentrent pas dans les cases, mais si on commence à se créer nos propres cases... à quoi sert notre "combat" et notre quête du bien être ? 

Pourquoi je parle de tout ça ? Parce qu'il y a un cri en moi, de plus en plus fort. OUVRIR LES PORTES !!! CASSER LES MURS !!! Au lieu de continuer à en construire, tout en prétendant que ce sont les autres qui nous enferment. 

NON, nous ne sommes pas si différents ! Chacun est unique, chacun, pas seulement les atypiques. Et au fond, nous avons tous juste le même rêve, la même aspiration : arriver à être soi-même à chaque instant, dans tout ce qu'on fait, et être respecté et aimé pour ça. Pour ce qu'on est. Simplement. 

Oui, chez certains ce désir est plus fort, plus conscient. Et oui, pour certains il est nécessaire, dans la société d'aujourd'hui, de créer dès dispositifs un peu particuliers pour les aider à s'intégrer. Et c'est génial ! Vous savez pourquoi ? Parce qu'un jour, dans pas si longtemps, on fera la même chose pour tout le monde : on prendra aussi en compte l'individualité et le côté unique et différent de chacun. Quel que soit son profil. 

(Petite parenthèse ici car c'est le moment: bien sûr, pour certains, l'autisme ou toute autre forme de différence est très dure à vivre en ce moment même. Toute ma compassion et tout mon amour vont vers vous. Et sachez que je parle en votre nom aussi parce que même quand le "handicap" ou la "différence" prend beaucoup de place dans notre vie, qui on est réellement ne devrait jamais en prendre moins, et c'est mon souhait le plus cher que cette partie de chacun, cette vérité de chacun, perce toutes les coquilles et toutes les bulles, et brille de tout son potentiel). 

Toute ma vie j'ai cherché à répondre à cette question : qui suis-je ? Et jamais rien ne m'a satisfait pour assez longtemps. Asperger a répondu à énormément de questions, oui, mais ça concernait le comportement, certains traits de la personnalité, certaines réactions... Mais pas "qui je suis". Je me suis rendue compte que "qui je suis" changeait tout le temps, en fonction du moment, des circonstances, de la situation, des personnes... Et qu'au lieu de le vivre comme un problème, il est peut être possible d'en faire une force. Et se reposer sur cet autre quelque chose au fond qui reste toujours, toujours le même... et toujours en paix. Et c'est par cette chose là que le lien avec le monde est fait. C'est en ça que nous sommes tous pareils. Alors je suis ça, qui vit dans le flot de l'instant présent. 

Et là il n'y a plus de murs. Non, les traits autistiques ne disparaissent pas. Et oui, il y a toujours des difficultés, des challenges, des choses à faire savoir à propos de l'autisme, un combat (pacifique) à mener. C'est juste que l'objectif et l'état d'esprit de ce combat changent radicalement. 

Je ne défends pas "la cause de l'autisme". Il y a assez de personnes qui le font, et elles ont du mérite et heureusement qu'elles sont là. Moi j'en choisis un autre. Celui de "l'intelligence collective", à défaut d'un meilleur terme pour le moment. 

Parce que tout ce que j'ai écrit plus haut, c'est exactement ça. Ma vision, et celle de mon entreprise, c'est que les "atypiques" d'aujourd'hui ne font que tirer la sonnette d'alarme et nous forcer à faire face à des problématiques auxquelles tout le monde sera confronté demain. Parce que nous avons tous le même désir profond. Parce que nos besoins en réalité sont les mêmes. Et parce que nous sommes tous différents et tous pareils. Tous uniques. 

Concrètement, dans le quotidien, vous allez me voir et entendre faire la distinction entre les atypiques et les autres, expliquer les particularités, y sensibiliser autant de monde que possible. C'est la même logique pour plein de choses : pour se libérer de quelque chose il faut d'abord en prendre pleinement conscience. Pour que la différence ne nous sépare plus, il faut d'abord la voir pour ce qu'elle est, et non pas pour ce qu'on pense qu'elle est, non pas pour ce dont on a peur. 

Quand on voit la différence pour ce qu'elle est, on voit aussi, toujours, les similitudes. On ressent profondément ce qui nous unit tous. Et cela me fait dire que la plus belle façon d'ouvrir son esprit aux autres, c'est de comprendre ce qui nous rend, nous-mêmes, si unique, en profondeur. Partir de soi pour aller vers les autres. En toute logique, c'est le seul chemin possible, mais il est si réprimé aujourd'hui... Alors si nous y revenions ? :-) On dit que les autistes sont auto-centrés. C'est, à mon sens, un immense cadeau, puisque ce chemin de l'intérieur vers l'extérieur est très naturel, et le seul possible. Et encore une fois... tout le monde l'est ! Mais la majorité s'en sent coupable, n'ose pas, n'assume pas... Et c'est bien dommage. 

La seule façon saine d'ouvrir son esprit au monde entier, est de tourner d'abord son regard vers l'intérieur. Et la seule conséquence certaine d'un regard profond et perçant vers l'intérieur, est l'ouverture grandissante de son esprit, de son cœur, et de son action, vers les autres.