Merci pour ce moment!

Ca y est: on y est! C'est le 8 mars! Mes réseaux sociaux fleurent bon la journée des droits des femmes, et mes contacts y vont de leurs dédicaces, pensées, messages de soutien, tandis que les entreprises se fendent d'une rose, d'une attention spéciale. C'est beau, merci.

Ne croyez pas que je crache dans la soupe: 1. je fais partie des femmes bien loties (je suis blanche ET Suissesse ET instruite ET financièrement à l'aise) 2. ça fait toujours plaisir, une petite fête, un peu comme la Sainte Aline (le 20 octobre, si vous voulez m'envoyer des fleurs) 3. c'est une belle occasion de se rattraper, pour celles qui ne bénéficient ni de la Saint-Valentin, ni de la Fête des Mères...

Et puis honnêtement, c'est chouette: pendant les quelques jours qui précèdent, tout comme le jour J, les médias invitent plein de femmes, leur donnant la parole et l'antenne (merci) pour aborder leurs difficultés, les enjeux, leur rôle, etc. et, du coup, on se rend compte qu'il y en a, des femmes qui s'expriment dans les médias. Le 8 mars, en tout cas. Parce que le reste de l'année, des femmes, on n'en trouve pas, ma bonne dame... Sauf pour parler des femmes. Sur les autres sujets, du 9 mars au 7 mars suivant, c'est quand même plus "facile" de trouver des hommes. Je me demande même si ce n'est pas un peu comme dans Harry Potter: peut-être qu'il y a une base de données d'intervenantes féminines qui n'apparaît, non pas qu'auprès d'une seule catégorie de personnes, mais qu'une seule journée par an, une espèce de voie 9 3/4 des expertes...

Parce que, honnêtement aussi, je me gausse (comme la courbe) du sens de cette journée vu de ma petite lorgnette de femme blanche en Suisse, justement. De la cour de récréation, aux bancs de l'Université, en passant par les postes de cadres jusqu'aux Conseils d'administration, en regardant du côté de la politique, du monde académique, des différents secteurs de l'économie, en prenant cela du point de vue des salaires ou des comportements, les 8 mars se suivent et se ressemblent... Les salaires inférieurs, les comportements misogynes, les biais de perception, les clichés, les discours: 364 jours par année, tout cela fait partie des données admises. Pour plein de bonnes raisons. Officiellement. Alors le 8 mars, on offre une rose, une citation, on se souvient que la femme, à défaut d'être l'avenir de l'homme, pourrait bien être son pendant, son alter ego.

La semaine du 8 mars, on se dit qu'il y a encore du boulot, que les quotas, se serait peut-être pas mal, que l'équité des salaires, faudrait s'y mettre, que c'est vrai, certaines attitudes sont inacceptables. Et puis, le 9, on se lève, et on a déjà la tête au lapin de Pâques, prochaine date sur le calendrier.

Finalement, les femmes, c'est un peu comme la transformation digitale: on sait bien qu'on devrait faire un truc, mais c'est pas la priorité; et puis, est-ce que ça rapporte vraiment?, c'est quoi, les risques?, et si les femmes prenaient l'avantage (entre l'intelligence artificielle et les femmes, c'est choisir entre la peste et le choléra!)? et si on laissait les autres faire d'abord? Les femmes, c'est un peu comme la transformation digitale: ce n'est pas tant une question d'outils à mettre à disposition, qu'une question de culture... et c'est peut-être pour ça que de plus en plus de femmes s'investissent justement dans le digital: nous avons tant en commun et encore tellement de travail à faire.

Allez, comme dirait ma chère maman: bonne journée à toutes les femmes, je retourne à mon mercredi avec les enfants, à mon repas et à ma lessive, merci pour ce moment et vivement la journée des droits des hommes!