Mes p'tits mots doux...
Sincèrement, si vous n'avez jamais essayé, sur la plage.. Y'a pas de mots 😊

Mes p'tits mots doux...

La luminosité décroit, l'azur a fait place à l'indigo, puis l'encre. Les vagues n'ont pas modulé leur rythme imperturbable, mais avec la nuit il semble qu’il se soit intensifié, et qu'elles aient pris place à l'avant-scène. Comme pour être aux premières loges, témoins discrets de leur moment. Au loin, clignotent doucement les bouées qui ballotent et les phares de la côte.

Le fauteuil en rotin suspendu se balance doucement, dans un grincement imperceptible, au gré de la brise tiède qui berce leur cocon molletonné. Tout autour, éparpillés sur le sable qui refroidit lentement, leurs quelques vêtements qu'ils ont entrepris de s'ôter mutuellement, lentement, pour se blottir à nu dans cet écrin de coton encagé, dans lequel ils observent l'horizon où passe nonchalamment un voilier. L’instant est à l’image de leur nid : suspendu.


« Mes p'tits mots doux, reprend-elle, ils seraient sur la paume de mes mains, pour qu'à chaque caresse sur ta joue, tu te rappelles comme tu es magnifique... »

Une longue pause. Il a détourné les yeux de la mer, pour préférer se noyer dans la contemplation de son profil, ce dessin à la fois fier et vulnérable.

« Mes p'tits mots doux, poursuit-il alors, ils seraient sur mes lèvres, pour que chaque baiser sur ta peau se mue en un tatouage chatoyant…

- Mes p’tits mots doux, ils seraient sur mon front, pour que chacun puisse savoir que je suis avec l’homme le plus merveilleux du monde…

- Mes p’tits mots doux, ils seraient sur mes bras, pour que lorsqu’ils t’enserrent, tu sois instantanément enveloppée de douceur…

- Mes p’tits mots doux, ils seraient dans ma bouche, pour que lorsque je t’embrasse, tu puisses les boire, et t’enivrer avec… »


Il sourit lentement. Elle n’a toujours pas tourné la tête, mais elle l’observe, pourtant, du coin de l’œil. Les commissures au coin de ses lèvres lui révèlent son humeur espiègle. Son air de défi l’invite à poursuivre : 

« J’ai déjà soif… son sourire s’élargit. Mes p’tits mots doux, ils seraient entre mes côtes, pour t’inviter à en relever du doigt les creux et les bosses, et te faire tourner la tête...

- Mes p’tits mots doux… Ils seraient sur mes seins ». Elle tourne la tête, à son tour, son regard se plantant dans le sien, et comme à chaque fois il se retrouve instantanément condamné, heureux de sa condition éperdue. « Pour qu’à chaque fois que tu les caresses, tu aies envie de les découvrir davantage…

- Mes p’tits mots doux, ils seraient sur mes fesses, pour en appuyer leur rondeur et leur douceur…

- Évidemment, leur douceur ! Puisque ce sont des mots doux ! Je t’aurais cru plus inspiré… »

Elle prend un air dédaigneux, mais qui ne le dupe pas, et elle le sait.

 « Mes p’tits mots doux, enchaîne-t-elle, ils seraient dans mon nez, pour qu’à chaque fois que tu m’inspires, ils viennent à t’entêter, pour les journées, les semaines, les mois, les années à venir...

- Mes p’tits mots doux, ils seraient sur la plante de tes pieds, pour qu’ils te permettent de parcourir des kilomètres et des kilomètres, et abolir la distance qui nous sépare, sans plus ressentir de fatigue…

- Mes p’tits mots doux… »

Nouvelle pause. Le sourire a disparu, mais pas l’intensité, accrue, de son regard. Ô mon Dieu, ce regard !

Elle poursuit : « …ils seraient sur mon ventre. Pour te dire combien j’aurais aimé porter un enfant de toi… »

Son sourire s’estompe à son tour. Ils ne se regardent plus, ils se boivent. Un frisson furtif qui la parcourt l’amène instantanément à l’enserrer de ses bras. Il entend ce qu’elle est à lui dire. Voudrait y répondre, en sachant que c’est impossible.

Alors il lui dit simplement :

« En fait, mes p’tits mots doux, ne seraient visibles que de toi et de personne d’autre, parce que ce ne peut être que toi, et personne d’autre, et que je n’aime que toi, et personne d’autre ». Sa voix qui chevrote, sur la fin ; mais il s’en fout. Ses larmes, se révéler ainsi, c’est le cadeau qu’il lui offre. Qu’il sait être apprécié à la hauteur de ce qui les a déclenché.


Le voilier a disparu. La nuit les enveloppe de ses draps de satin noir, seule parure indiquée à les couvrir. Les vagues ont ralenti leur mouvement hypnotique, un rythme lent mais régulier, comme une pulsation, une respiration. Ils ne disent plus rien, car l’essentiel a été énoncé, et le reste se traduit bien mieux dans les silences et les regards…


© Christophe POISSON – Février 2o19

Tous droits réservés

__________________________________________________________________________

Un texte venu à la suite de la lecture du post de Morgane A. Preseghin, sur « Le pouvoir des mots doux » (par ici) et dont la publication relevait d’un défi personnel.

Inspiration mais aussi retranscription en sont ici les bases… 😋

Véronique Ebel

assistante au projet et au parcours de vie

5 ans

Magnifique défi personnel . Morgane A.a ce pouvoir de faire naître des mots doux . Les vôtres le sont ; doux mais également amoureux , gourmands d'amour , de désir , de sensualité , d'unicité, de promesse. Au plaisir de vous lire Christophe Poisson.

Dominique Delaire 🔎

Correctrice-Relectrice /proofreader freelance. Conseillère technique de vos textes avec « La marche des mots ».

5 ans

C'est magnifique ! délicieux et tout, très évocateur, je les ai ressentis, sur la plage, tous les deux. comme on aimerait le vivre...

Patricia Wendling

DRH, Autrice du livre ''Télétravail Mode d’emploi’’, Linkedin Top Voices 2020, Linkedin Top Voices Emploi 2021

5 ans

Juste magnifique Christophe ! Je me suis laissée doucement effleurer, puis doucement porter, transporter. Merci pour ce doux voyage. Excellent week-end.

Christophe, Ton article est passé entre les mailles du filet, quelle joie en consultant ton profil ce matin de le découvrir ! Tout d’abord, merci pour la mention. Je suis particulièrement honorée qu’un si court billet ait pu t’inspirer cette ode à l’amour, celui de l’esprit, celui du corps. Ensuite, je te félicite pour la douceur et la complicité qui émane de ton texte, on déroule le fil de ce récit et on s’enveloppe de chaque paragraphe, on s’habille de chaque ‘petit mot doux’ jusqu’à n’être plus que ça. Un mot d’amour vivant, avec un cœur qui bat, de la chaleur dans les mains, des étoiles dans les yeux, des rêves, des espoirs et des craintes plein la tête. Un mot d’amour qui respire, et qui prend tout sa dimension lorsqu’il s’accompagne des adjectifs de l’Autre, un mot d’amour qui grandit et devient lettre d’amour 💌 ... C’est beau !!!!

Merci pour ce partage Christophe... et félicitations pour ce défi et cette inspiration ! Un bien bel écrit remplit de douceur, et qui nous invite à rester rêveur. Excellente semaine à toi.

Identifiez-vous pour afficher ou ajouter un commentaire

Plus d’articles de Christophe THALLER

  • 1986

    1986

    18h10. Il se tient, debout, sur le trottoir, tout près de l'arrêt de bus, ses cheveux légers balayés par le vent qui…

    41 commentaires
  • De l'Engagement

    De l'Engagement

    "Tu perds ton temps. Tu gaspilles tes belles années.

    12 commentaires
  • Où la Source et le But alors se confondent

    Où la Source et le But alors se confondent

    Capitaine rescapé naviguant hors de vue, harassé, égaré, la barre au gré des égarements sans plus de cap, d'une vie…

    15 commentaires
  • Complétude

    Complétude

    Ce soir, l'inspirée Morgane A. Perseghin a publié un court texte, mais intensément dense.

    19 commentaires
  • Leurs quotidiens au singulier - 1

    Leurs quotidiens au singulier - 1

    06:17 A travers ses paupières encore fermées, elle distingue tout de même la lumière. Le soleil est déjà entré dans la…

    9 commentaires
  • Le parfait à compliments

    Le parfait à compliments

    Ne reste que le petit paquet, le plus petit. Des monceaux de papier argentés, dorés, aux motifs à effet holographique…

    63 commentaires
  • Révélation à la croisée des chemins

    Révélation à la croisée des chemins

    "La croisée des chemins" : Situation d’une personne qui doit faire un choix, dont la vie pourrait être sur le point de…

    33 commentaires
  • Oser sa Singularité...?

    Oser sa Singularité...?

    "Les circonstances sont les coups de fouet que nous donne la vie. Certains d'entre nous sont contraints à les recevoir…

    51 commentaires

Autres pages consultées

Explorer les sujets