Mireille Faugère, mettre l'usager au centre de l'offre de service
Deuxième billet de notre série « Gouvernance inclusive : quel intérêt ? Exemple de l’inclusion des usagers dans le secteur de la santé », produite suite à la conférence éponyme organisée par YourVoice, à l’occasion du Forum mondial Convergences.
La carrière de Mireille Faugère est marquée par ses expériences en direction d’entreprises publiques et privées. Nommée directrice de la gare Montparnasse en 1991, Mireille Faugère devient directrice générale de la branche grande vitesse de la SNCF, puis présidente de voyages-sncf.com en 2003, et travaille alors avec les associations d’usagers et de personnes en situation de handicap sur l’accessibilité des trains et des gares, avant de prendre la tête de l’Assistance Publique-Hôpitaux de Paris.
« De cette expérience très riche au sein de la SNCF, je retiens ma découverte du handicap et la difficulté pour les associations de trouver un accord sur un cahier des charges commun d’accessibilité. »
« En fonction des handicaps, l’usage du lieu n’est pas le même et ce qui peut être bien pour l’un ne le sera pas pour l’autre. Sur la gouvernance, c’était très intéressant car il revenait à la SNCF de faire la synthèse des demandes des associations. J’ai alors pris conscience que ce que nous faisions pour les personnes en situation de handicap se révélaient utiles aussi pour les personnes qui ne sont pas atteintes d’un handicap ou d’une maladie invalidante. Cette expérience m’a beaucoup éclairée sur ce que signifiait véritablement mettre l’usager et le client au centre de l’offre de services. »
Forte de cette expérience, Mireille Faugère crée une Université du service, au sein de la SNCF, pour contribuer à la professionnalisation de la relation avec les clients et les associations d’usagers. En 2010, elle devient directrice générale de l’Assistance Publique-Hôpitaux de Paris où elle crée la première direction du service aux patients.
« Mon objectif était de mettre le patient au cœur des décisions en prenant réellement en compte sa voix. »
« Au sein de l’AP-HP, j’ai été confrontée à la rencontre du monde médical, porté par les médecins, et de la voix des patients, ce qui peut donner lieu à de véritables tensions. Quand les premiers supportaient mal que l’on interroge leur légitimité, les seconds peinaient à faire comprendre qu’en tant que patients – surtout pour les patients chroniques – ils connaissaient eux aussi le milieu hospitalier, mais d’un autre point de vue. J’ai donc créé une direction au service du patient pour conduire un travail de fond sur tout le parcours patient à une époque où il n’existait pas encore de formations sur et par les patients dans les formations médicales. En quinze ans, beaucoup de progrès ont été faits, mais nous n’y sommes pas encore. »
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Depuis son départ de l’AP-HP, Mireille Faugère a porté différentes responsabilités au sein de gouvernances associatives et d’entreprises privées. Elle est membre du conseil d’administration d’Emeis, présidente de son comité d’éthique et RSE et administratrice de la Fondation l’Oréal et de l’Institut Français des Administrateurs. En parallèle, Mireille Faugère est présidente France de l’AMREF, une ONG africaine de santé publique.
« Le premier piège de l’ESS et du médico-social est de croire que, parce que son objet social est nativement tourné vers les patients, leur bonne prise en charge est assurée, ce n’est pas vrai. »
« Le secteur associatif représente en 2022 plus de 3% du PIB français et compte 22 millions de bénévoles contre moins de 2 millions de salariés et les responsabilités de chacun ne sont pas si faciles à caler. J’ai remarqué aussi qu’à l’entrée dans le CA d’une association ou une fondation, beaucoup le faisaient pour la mission, avec le cœur, mais pouvaient perdre leurs réflexes de bonnes gestion et gouvernance, même des patrons reconnus ! A la Cour des comptes, que j’ai rejointe après l’AP-HP, une chambre est spécialisée dans le contrôle des associations et des fondations, et notamment sur la bonne utilisation des subventions publiques et de la générosité publique (les dons individuels). L’enjeu est fort car perdre la confiance des financeurs c’est entraîner les associations à leur perte. Pour aider à une bonne gouvernance, nous avons créé avec l’institut français des administrateurs IFA un guide des bonnes pratiques à destination des administrateurs ».
Riche de ces expériences, Mireille Faugère porte une vision forte et unique pour améliorer le fonctionnement des gouvernances associatives et les rendre plus inclusives.
« On progresse dans la gouvernance quand on casse l’entre-soi. On pêche en performance quand on se ressemble tous. »
« Casser l’entre-soi amène une véritable pluralité des points de vue dans les conseils d’administration, évitant qu’ils ne soient préemptés par une minorité. Le président et son bureau ne doivent pas faire le hold-up du projet associatif par exemple, et ils doivent intéresser les autres membres du CA à prendre des responsabilités. Cela favorisera l’assiduité et l’engagement de tous. Et il est utile d’interroger chacun sur les motivations à être bénévole, pour s’assurer que l’engagement ne soit pas guidé par de mauvaises raisons, dont les conséquences seraient délétères pour l’organisation. Enfin, il faut inscrire dans les statuts la conduite de mandats courts, avec des renouvellements décidés. »
Merci pour cette série d'articles au service de l'#inclusion YourVoice Paris