Notre monde est une fiction, quelle opportunité pour la réécrire.

Qu’est ce qui distingue fondamentalement l’homme des autres espèces animales ? 

Notre capacité à raconter des histoires, à communiquer.

Nous sommes peut être la seule espèce qui réside aussi dans un “monde intérieur”, la seule espèce qui dialogue avec elle-même, la seule espèce qui a besoin d’une histoire, et c’est le moment, plus que jamais, de développer nos imaginaires, d'écrire de nouvelles histoires.

Hugues Wattebled parle de l’imaginaire avec Brio dans le dernier numéro de SocialTer.

“L’imaginaire, souvent associé à l’illusion ou à notre capacité à nous échapper du réel. 

Pourtant, une autre approche consiste à voir dans l’imaginaire un ensemble dynamique de représentations qui façonnent une vision collective du monde. 

Le bien, le bonheur, le vrai ou le mal, cessent d'être des représentations individuelles et se muent en un imaginaire collectif dès lors qu’elles deviennent partagées. 

Ce mouvement invisible se fait souvent à l’insu des individus, mais influence pourtant la trajectoire des idées des sociétés.”

Cette imaginaire, produit par l'imagination et qui apparaît très clairement dans les représentations objectives de nos sociétés.. (des symboles, des discours, des entreprises, des lois….) 

J'aime énormément revenir sur l'exemple de Peugeot que l'on trouve dans le livre "Sapiens" de Harari.

Extrait :

“En quel sens pouvons nous dire que Peugeot SA existe ? Il existe quantité de véhicules Peugeot, mais les véhicules et la société sont deux choses différentes. Même si toutes les Peugeot du monde étaient simultanément mises à la ferraille et vendues au prix du métal, Peugeot SA ne disparaîtrait pas. 

Une catastrophe pourrait tuer chacun et détruire toutes ces chaînes de montage que la compagnie n’en demeurerait pas moins intacte.

Non que Peugeot soit invulnérable ou immortelle. Si un juge devait ordonner la dissolution de la compagnie, ses usines resteraient debout, et ses ouvriers, ses comptables, ses dirigeants et ses actionnaires continuerait de vivre, mais Peugeot SA disparaîtrait immédiatement. Bref Peugeot SA semble n'avoir aucune relation essentielle avec le monde physique. Existe t’elle vraiment ?

Peugeot est une des créations de notre imagination collective qui appartient aux fictions juridiques appelées “société”.

Au cours de ces derniers siècles, ces sociétés sont devenues les principaux acteurs de l'arène économique, et nous nous y sommes à ce point habitués que nous oublions qu'elles n'existent que dans notre imaginaire.”

Peugeot est donc une magnifique histoire, une magnifique fiction qui a convaincu les gens d’y croire. 

Aujourd'hui, plus que jamais nous avons besoin d'activer notre imaginaire pour repenser la société de demain.

Les artistes, les comédiens et les compteurs sont plus que jamais utiles dans cette période, raconter des histoires efficaces, inspirantes et entraînantes n'est pas facile. 

La difficulté n'est pas de raconter l'histoire, mais de convaincre tous les autres d’y croire. Une bonne partie de l'histoire tourne autour de cette question ; comment convaincre des millions de gens de croire des histoires particulières sur les dieux, les nations, le sens de la vie ou les sociétés ?

Il est temps de combattre la dystopie, temps d’assumer notre devoir d’utopie. Il est temps d'imaginer un monde résilient et bienveillant, temps de mettre de la conscience dans chacun de nos gestes et décisions

Le combat à mener maintenant n'est pas de limiter son impact négatif mais bien de maximiser son impact positif.

Il est temps de lire et d'écrire de nouveaux récits, de nouvelles fables, de nouveaux mythes, et de tenter, coûte que coûte de les appliquer.

Que voulons nous vivre demain ? dans notre foyer et dans notre entreprise ? quel récit ? 

“Le récit est présent dans tous les temps, dans tous les lieux, dans toutes les sociétés, le récit commence avec l'histoire même de l’humanité”

Roland Barthes. 1966.

La fin d’un monde n'est pas la fin du monde, qu'allons nous imaginer et écrire collectivement qui donnera envie à tous et qui combattra les imaginaires anxiogènes ? 

Ellon Musk et Pierre Rabhi sont tous les deux des pionniers d’un monde possible, leurs récits à fait des milliers d'adeptes, tout est parti d’un imaginaire, d’un “Et si”, d'une histoire.

L’un pour conquérir Mars et plus largement créer le tourisme spatial, L’autre pour vivre une sobriété heureuse sur Terre en symbiose avec la nature.

Nous sommes le monde de demain, nous sommes le récit, nous sommes les artistes de la vie, nous sommes souverains de nos imaginaires, qu’allons nous décider de créer maintenant ? 

Je terminerais cet article, ces recherches, avec quelques mots d’Arthur Keller, enseignant dans les stratégies de résilience collective.

“Le grand combat de notre temps a commencé, et il se joue d'abord sur le terrain des imaginaires. c’est par un travail de mise en cohérence des récits par rapport aux limites naturelles, sociétales et humaines qui contraignent l'espace des futurs possibles qu'on peut espérer impulser une vague de sursauts salutaires, loin des replis, fanatismes et individualismes toxiques. Mais ces récits ne peuvent être monolithiques : inspirer le plus grand nombre requiert une divergence de formes narratives conçues pour aviver un spectre large d'émotions et symboliser de nouveaux référentiels de valeurs, raisonnables et dignes.

Pluralité des formats, et des visions de l'avenir projeté : deux conditions pour “encapaciter” les gens au delà des cercle de convaincus.”

Collaborateurs, Citoyens, Chômeurs, infirmiers, employés, retraités, agriculteurs, Sapiens, c’est à nous de penser le changement !!!