avec ou sans ordinateur l’art est toujours « la pittura e cosa mentale L. DE VINCI)» et le peintre « doctus pictor » . Alliance de la technique et de la réflexion.
Introduction.
Le numérique évoque beaucoup de fantasmes, qui ont la peau dure… Aussi, un peu d’histoire des ordinateurs nous aidera sûrement … C’est dans les années 70 que les ordinateurs sont développés pour devenir plus compacts et personnels, et entrer dans les maisons ; c’est donc naturellement au début des années 80 que les applications se sont diversifiées. Dans les applications domestiques, il y eut très vite des bases comme la comptabilité ou le budget familial, des jeux video ou de la musique… Les supports d’alors étaient des K7, des disquettes de la taille d’une assiette pour conserver quelques données, et les premiers disques durs coûtaient un an de salaire moyen. Malgré cela, ces nouveaux outils étaient fascinants à plusieurs titres. D’abord l’outil peut porter plusieurs autres outils et permet à ces autres outils d’échanger leurs données, car ces données sont rendues compatibles entre elles du fait d’être dématérialisées et portées par un médium commun.
Très vite, les gens pouvaient reprendre à l’infini un travail et le corriger à volonté, la seule limite étant la taille du disque de sauvegarde.
Dans les années 90, les capacités des ordinateurs n’ont cessé de se démultiplier et les constructeurs se sont livrés a une concurrence sans merci. La créativité qui a été développée à cette époque était réellement incroyable, il n’y avait pas une semaine sans qu’un laboratoire présente un nouveau standard, une nouvelle technologie ou un nouvel algorithme. La curiosité était tellement exacerbée que bientôt il n’y avait plus un seul lycée, ni école sans son club d’informatique. La particularité de cette période d’exploration intense était le partage de cette passion pour comprendre et appréhender ces nouvelles dimensions. Aujourd’hui, cette dimension se superpose à chaque recoin de notre réalité - y compris l’art . Aujourd’hui ces dimensions font partie de notre réalité et l’art se les approprie.
Le rôle de l’art dans la société est un sujet que je préfère laisser a des sachant comme Noêl Coret, mais je crois pouvoir dire que l’un des rôles ou l’une des facettes des artistes qui s’emparent de ces dimensions réside dans le questionnement et la traduction de concepts en œuvres : les artistes sont des pionniers.
Alors, si l’art, du fait même de l’usage du numérique perd sa matérialité, comment l’artiste peut-il réagir et comment le public peut-il l’aborder ?
Nous avons donc essayé de relire les différentes étapes d’un travail artistique et de les superposer avec les différentes étapes d’un travail numérique afin d’identifier les particularités de l’artiste numériste ; nous allons essayer de comprendre comment la notion de démarche classique intervient, car il y a des artistes qui utilisent des outils dont le numérique et il y a des artistes « numéristes » … mais gardons-nous d’être trop manichéens.
D’abord, une création artistique, une œuvre, commence avec une idée, un désir, une intention initiale ; cette initiative est intime ; nous pouvons juste en dire qu’elle est propre a l’auteur, qu’elle le définit et inversement.
Ensuite, que ce soit à travers une correspondance, un travail d’atelier ou même une commande extérieure, l’intention initiale va se figurer sur des croquis, se concevoir à travers des esquisses ; ces premières représentations vont permettre à l’artiste de projeter son œuvre.
Les artistes ont un rapport particulier avec leurs outils ; il y a, je crois, un crayon qui dessine mieux, un pinceau qui glisse avec plus de légèreté - Il en va de même avec les différents organes qui composent un ordinateur ou un système numérique, scanner, micros, écran, souris, logiciels, imprimantes, enceintes, etc...
Notre numériste va donc instinctivement mélanger ses outils, créer ainsi ses propres liens, créer son propre univers. Son ordinateur s’élargit naturellement aussi naturellement que dans son atelier au sens large et classiques.
Les esquisses et ingrédients de cette création vont être importés dans l’ordinateur par les outils de saisie comme autant de sens : Ouïe, Vue, Touché, Odorat, Goût. À l’intérieur de ce complexe, le numériste sera devant une dématérialisation totale des ingrédients et de son projet ; ces données sont dans cette « boite noire » où chacun des médias numérisés partage son absence de matérialité, si ce n’est sous forme d’impulsions… Les échanges possibles perdent leurs rapports physiques habituels : par exemple un son peut devenir une image, qui peut devenir une musique, qui peut devenir une animation, qui peut devenir un volume… Le Numériste doit donc devenir le chef d’orchestre et le directeur de cet univers et choisir parmi ses outils ceux qui lui permettront de mener à bien son œuvre. Là, il est dans la re-création de la palette, il devient lui-même l’outil et maîtrise sa facture originale ; c’est par cette capacité d’abstraction que le numériste fabrique son propre outil ou méta-outil. Là il rejoint le travail classique alliance de technique de réflexion « cosa mentale »
Mais si l’œuvre est en place, la représentation du travail n’est pourtant pas encore au contact du public. Une œuvre présente à l’écran de l’auteur n’est pas encore réellement ni diffusée, ni mise en scène. Il faut donc publier et, là encore, la présentation ou la production doit être gérée ou même fabriquée par notre numériste ; la publication de son projet ou sa « re-matérialisation » est la dernière étape de son œuvre. Vraisemblablement la plus délicate. Que le public ou l’audience y voit une œuvre réalisée avec des moyens numériques importe peu, la seule vraie réalisation est comme pour nimporte quel artiste le chemin réalisé par le numériste depuis son intention première jusqu’au vernissage avec intégrité.
Voici donc une (un essai ?) tentative de définition des artistes numériques ou Numéristes ; la prochaine fois, nous nous pencherons sur les artistes complets ou complexes …
Bonsoir Jerome, pouvez-vous développer cette affirmation : « Une œuvre présente à l’écran de l’auteur n’est pas encore réellement ni diffusée, ni mise en scène. »
— N’est-ce pas une vision trop « photographique » (repérage, notes, croquis, cadrage, temps de développement; - pause -, « editing/sélection », tirage, installation, vernissage, exposition/vente) de “l‘œuvre” ?
Pierre Bézier, Bill Atkison, Ivan Sutherland, John Warnock, Charles Geschke, Henri Gouraud, Bùi Tường Phong, Alan Turing, Tim Berners-Lee, Vinton G. Cerf (et tant d’autres !) ont donc œuvré pour que nous soyons dépendants des « marchés » et institutions du monde de l’Art, et ce — malgré les possibilités créatives quasi infinies qu’ils nous ont léguées en héritage. Le moindre Smartphone de base, mis entre les mains d’un esprit créatif, offre des possibilités ahurissantes dans tous les domaines du multimédia et sans les contraintes « du camion » si cher à Steve Jobs.
Une visite sur le site d’art génératif Shadertoy.com ou celui de la communauté Codepen.io permet à tous les internautes d’admirer des « œuvres » générées ou interprétées, avec le privilège d’avoir accès au cheminement mental (le code source) des auteurs.
Que penser du cas des VJ ? De celui des DJ, qui ont depuis plus d’une décennie accès à des consoles de mixages visuelles et platines virtuelles pour leurs prestations ?
Idem pour les compositeurs : lorsque Steinberg fait sa révolution avec la technologie VST à la fin des années 90, les artistes manipulent (à bas coût, Digidesign ProTools est inaccessible au commun des mortels home-studistes à cette époque) : consoles de mixage multipiste, forme d’ondes, données MIDI, instruments virtuels (un peu cheap dans un premier temps), samplers en Direct-To-Disk, automation, etc.
Si j’observe votre raisonnement à la lettre : ce que je mixe sur Traktor, Live ou Serato produit un son; qui reste inaudible.
Un dessin réalisé avec Procreate existe; mais ne se voit pas.
Si ces 2 performances artistiques sont liées à une envie d’instantanéité : pourquoi « attendre » une mise en scène ou une éventuelle « diffusion » ultérieure ?
Ah : les joies du Polaroid !
Merci pour votre initiative et au plaisir de vous lire ;-)
Artiste Kreyol Pop! Exopéen
8 ansBonsoir Jerome, pouvez-vous développer cette affirmation : « Une œuvre présente à l’écran de l’auteur n’est pas encore réellement ni diffusée, ni mise en scène. » — N’est-ce pas une vision trop « photographique » (repérage, notes, croquis, cadrage, temps de développement; - pause -, « editing/sélection », tirage, installation, vernissage, exposition/vente) de “l‘œuvre” ? Pierre Bézier, Bill Atkison, Ivan Sutherland, John Warnock, Charles Geschke, Henri Gouraud, Bùi Tường Phong, Alan Turing, Tim Berners-Lee, Vinton G. Cerf (et tant d’autres !) ont donc œuvré pour que nous soyons dépendants des « marchés » et institutions du monde de l’Art, et ce — malgré les possibilités créatives quasi infinies qu’ils nous ont léguées en héritage. Le moindre Smartphone de base, mis entre les mains d’un esprit créatif, offre des possibilités ahurissantes dans tous les domaines du multimédia et sans les contraintes « du camion » si cher à Steve Jobs. Une visite sur le site d’art génératif Shadertoy.com ou celui de la communauté Codepen.io permet à tous les internautes d’admirer des « œuvres » générées ou interprétées, avec le privilège d’avoir accès au cheminement mental (le code source) des auteurs. Que penser du cas des VJ ? De celui des DJ, qui ont depuis plus d’une décennie accès à des consoles de mixages visuelles et platines virtuelles pour leurs prestations ? Idem pour les compositeurs : lorsque Steinberg fait sa révolution avec la technologie VST à la fin des années 90, les artistes manipulent (à bas coût, Digidesign ProTools est inaccessible au commun des mortels home-studistes à cette époque) : consoles de mixage multipiste, forme d’ondes, données MIDI, instruments virtuels (un peu cheap dans un premier temps), samplers en Direct-To-Disk, automation, etc. Si j’observe votre raisonnement à la lettre : ce que je mixe sur Traktor, Live ou Serato produit un son; qui reste inaudible. Un dessin réalisé avec Procreate existe; mais ne se voit pas. Si ces 2 performances artistiques sont liées à une envie d’instantanéité : pourquoi « attendre » une mise en scène ou une éventuelle « diffusion » ultérieure ? Ah : les joies du Polaroid ! Merci pour votre initiative et au plaisir de vous lire ;-)