Où en est-on de la réorganisation du marché de l'énergie en cours en France?

Où en est-on de la réorganisation du marché de l'énergie en cours en France?



Suite au conflit entre la Russie et l’Ukraine, une énorme réorganisation du marché de l’énergie est en cours ! Mais sait-on très bien quels sont les nouveaux pays avec lesquels des deals ont-été passés, d’où importe-t-on notre gaz, liquéfié et non-liquéfié, et dans quelles proportions ?


Petit point sur la situation actuelle ![1]


Du côté des pays scandinaves, la France importe une partie de son gaz à la Norvège. Et elle redistribue une partie de ces importations à l’Allemagne. Cependant, en échange de ce deal, elle importe de l’électricité à l’Allemagne, dont on imagine qu’elle provient de ses centrales à charbon.
 

Fin août, après le voyage d'Emmanuel Macron en Algérie, la question de l'augmentation des importations de gaz algérien en France a été mis sur la table.

S’est ensuivie à la mi-octobre la visite de la Première Ministre française Elisabeth Borne, la Directrice générale d’Engie Catherine MacGregor, puis de la Commissaire européenne à l’Energie Kadri Simson.

Des discussions sont actuellement en cours entre le groupe Engie et Sonatrach, le groupe pétro-gazier public algérien sur l’importation et le prix du gaz liquéfié algérien.


Une grosse partie du gaz français est importé aujourd’hui des Etats-Unis (gaz liquéfié), qui pratique des prix à l’exportation assez élevés, ce qui donne lieu à d’âpres négociations pour faire baisser ces derniers.


Sur le continent africain, le Sénégal fait aujourd’hui partie des nouveaux eldorados gaziers avec la Mauritanie et le Mozambique. La France leur importe donc également du gaz, et soutient par ailleurs de nouveaux projets de forage de gaz en Afrique.

 
Début septembre s’est déroulée une mission diplomatique de l’Union Européenne au Qatar, orchestrée par le Président du Conseil européen Charles Michel, sachant que le Qatar est l'un des plus grands producteurs de gaz naturel liquéfié (GNL) au monde, avec les Etats-Unis et l'Australie. L'Europe, qui s'était longtemps opposée aux accords à long terme demandés par le Qatar en matière d’importation de gaz, a revu aujourd’hui ses contrats d’importation à la hausse, le conflit en Ukraine ayant complètement changé la donne !


En Méditerranée Orientale, la France et les Etats-Unis se sont accordés sur une délimitation des zones de contrôle respectives des ressources gazières maritimes du Liban et d’Israel, lors d’un accord historique signé début octobre.
 
Enfin, concernant ses échanges avec la Chine, il est avéré que l’Europe achèterait non seulement du gaz à un prix assez élevé à l’Empire du milieu, mais que ce dernier proviendrait en réalité de Russie !!

Ainsi, le gaz russe, qui n’arrive plus en Europe via les gazoducs habituels, revient en Europe via la Chine, a un prix bien supérieur ! Alors que l’Europe tente de sortir de sa dépendance énergétique à l’égard de la Russie, elle crée une nouvelle forme de dépendance à l’égard à la fois de la Russie et de la Chine !

Lors d'un sommet économique avec d'autres pays d'Extrême-Orient, Vladimir Poutine a d’ailleurs évoqué des discussions sino-russes autour d'un nouveau gazoduc entre de la Chine à la Russie passant par la Mongolie, d'une capacité équivalent à Nord Stream 1, et baptisé le Power of Siberia 2 !

Vladimir Poutine mise sur la carte chinoise sur fond de convergence anti-Occident, même si l'économie russe a davantage besoin du marché chinois que l'inverse. La construction devrait débuter en 2024. Une transition a été faite pour effectuer les paiements pour les livraisons de gaz russe à la Chine en devises locales, le rouble et le yuan. Comme son nom l'indique, ce gazoduc sera le deuxième de la famille. En effet, depuis 2019 fonctionne "Force de Sibérie 1" qui connecte, sur 3 000 kilomètres, la Sibérie au nord-est de la Chine.

En parallèle de cet axe sino-russe, Poutine a en outre récemment proposé à Erdogan un "hub gazier" en Turquie pour exporter du gaz russe à l'Europe.

La France a donc rebattu les cartes de ses importations de gaz et revendique d’aller vers plus de souveraineté et d’indépendance énergétique, notamment vis-à-vis d’un conflit auquel elle a pris parti, comme toute l’Europe, et qu’elle a décidé de soutenir en rompant sa relation commerciale avec l’un de ses anciens importateurs principaux de gaz, la Russie.


Cependant, l’interconnexion figurait parmi les maîtres-mots du Président Macron lors de sa dernière allocution en Prime Time aux français mercredi dernier. Entre un fort désir d’indépendance de la France et l’appel à plus d’interconnexions et de solidarités entre les peuples pour se fournir en gaz et ne pas manquer d’énergie, on peut se demander où mettre le curseur politique, économique et démocratique pour se fournir en gaz sans se compromettre.

 

 

 

 

 




[1] Pour rappel, la Russie a coupé le flux NordStream (Pologne, Allemagne etc.) en avril dans le cadre du conflit en Ukraine, puis l’a limité à 40% en juin, puis à 25% en août. Aujourd’hui les pays européens ne veulent plus acheter de gaz russe pour ne pas prendre le risque que ce dernier ne finance leur effort de guerre.        

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