Paradis fiscaux : ces milliards qui échappent aux administrations fiscales
Les révélations du consortium international des journalistes d’investigation sur les panama papers ont démontré que l'absence d'harmonisation fiscale internationale permet aux paradis fiscaux d'exister et de se multiplier. Mais comment enrayer les paradis fiscaux? Sur ce point, malgré l'existence d'institutions internationales, la gouvernance mondiale ne semble qu'une illusion.
Le Consortium international des journalistes d'investigation (ICIJ) a annoncé que près de1, 2 milliard de dollars ont été récupérés dans le monde en lien avec les panama papers. Le fisc britannique arrive en tête de peloton, avec 252 millions récupérés, suivi de l'Allemagne, avec 183 millions, et la France, avec 136 millions récupérés. En France, on a dénombré plus de 500 contrôles fiscaux depuis août 2016, ce qui a permis d'identifier quelque 415 fraudeurs potentiels. L'Agence du revenu du Canada (ARC) aurait identifié environ 900 personnes, sociétés canadiennes et fiducies dans les Panama Papers. Il y aurait cinq enquêtes criminelles sont en cours sans aucune accusation jusqu'à maintenant et 116 vérifications ont été effectuées, et 15 millions de dollars ont été récupérés. Des documents de l’ARC dénombrent la présence de centaines de milliards de dollars provenant du monde entier et protégés dans des paradis fiscaux.
Les paradis fiscaux fragilisent le capital mondial. Ils créent de très fortes inégalités dans les taux de prélèvements fiscaux mondiaux. Ils permettent aux acteurs de la finance de développer en toute liberté des activités à haut risque et insensées. Les principaux dérapages de la finance mondiale ont pour dénominateur commun les paradis fiscaux
Sur le plan mondial, l'absence d'harmonisation fiscale internationale permet aux paradis fiscaux d'exister et de se multiplier. Mais comment enrayer juridiquement les paradis fiscaux? Sur ce point, malgré l'existence d'institutions internationales, la gouvernance mondiale ne semble qu'une illusion. Elle est même hypocrite. La question de la gouvernance mondiale est très délicate. Mais il faut dénoncer sa forme actuelle, qui n'est ni démocratique, ni adéquate. Il est clair que la régulation mondiale n'est plus du tout à la hauteur des problèmes du monde. En effet, les états sont dans l'incapacité totale d'aboutir sur des solutions efficaces.
La difficulté d'aboutir à une réglementation internationale est évidente. Par exemple, les États-Unis exigeaient de la banque suisse UBS la levée du secret bancaire en menaçant la Suisse alors que l'État du Connecticut intégrait le secret bancaire dans sa législation, et l'État du Delaware reste un paradis fiscal à l'intérieur des États-Unis. Le développement de la mondialisation économique a incité de grands pays à être des utilisateurs des paradis financiers à des fins commerciales, et dont ils apprécient la confidentialité. Ils sont prêts à tout, même à l'utilisation des paradis fiscaux, pour sauver un marché à l'exportation.
La gouvernance mondiale est en effet un véritable paradoxe. De nouvelles organisations sont mis sur pied, et il se tient des sommets sur tout et n'importe quoi. Des efforts considérables sont menés pour de maigres résultats. Voilà le symptôme d'une gouvernance mondiale illusoire. Le fait de faire beaucoup de sommets ne signifie pas que ce sont des avancées, puisque le seul fait d'être présent n'obligerait pas à trouver des solutions plus intelligemment.
L'administration américaine a affiché une volonté ferme à combattre l'évasion fiscale internationale en coopération avec l'Europe avec le projet FATCA ( Foreign Account Tax Compliance Act). C'est un projet majeur. Il marque une volonté de rendre effective la coopération internationale dans le domaine de la lutte contre la fraude et l'évasion fiscale. Espérant encore une fois que ce ne sont pas que des déclarations d'intention, quand on sait que la lutte contre les paradis fiscaux avait reçu un coup fatal en septembre 2001 quand l'administration américaine s'est désolidarisée des travaux de l'OCDE, visant à combattre les pratiques fiscales dommageables.
Il va falloir aller vers la règlementation des paradis fiscaux, la transparence des grandes banques mondiales, des multinationales et la règlementation des professions utilisatrices de ces paradis fiscaux. Toutes les actions à mener pour y arriver doivent dépasser de simples déclarations d'intention. Le droit d'ingérence international doit avoir une totale légitimité sur les paradis fiscaux.