PARAGRAPHE 6 : LES SŒURS AMRANE

PARAGRAPHE 6 : LES SŒURS AMRANE

PARAGRAPHE 6 : LES SŒURS AMRANE

Le 4 décembre 1957, le village Iguersaffene est évacué par l’armée française.


Amrane Ouerdia née en 1935, sa sœur Zahra, née en 1939 se retrouvent au village Ait Bouadda, dans la région de Ait Ghobri. Elles se retrouvent chez un vieux citoyen du nom d’Ali AHADDAD, un pseudonyme qui signifie le forgeron, qui en prendra soin selon ses moyens modestes. Quelques jours après leur arrivée sur les lieux, un ratissage est lancé dans toute la région. Pendant que les soldats français rassemblaient les habitants, hommes et femmes, les deux filles étaient restées à la maison quand un harki se présenta devant le vieux Ahaddad exigeant de lui une somme de 100 francs.

«Débrouille-toi pour procurer cette somme sans quoi je ferai un malheur»

-fais ce qui te chante, lui répondit le vieillard. Nous sommes en guerre et tout ce qui peut advenir est la bienvenue, ajouta-t-il.

Safia, une des brus de Ali Ahaddad, piquée a vif par cette monstrueuse déclaration du harkis qui signifiait en fait qu’il avait l’intention de pratiquer un viol devant les yeux de tous les présents, n’a pu retenir sa rage, se mit a hurler a gorge déployée, pour ameuter les autres soldats et la population parquée dehors.

 Le harki fit un geste de fermer le portail de la mechta et s’apprêtait à faire ce qui passait par la tête » selon ses propres dires. A ce moment de soldats FSE forcèrent le portail et l’un d’eux, en constatant Safia dans cet état déplorable se saisit d’un seau plein d’eau posé la pour abreuver le bétail, lui versa le contenu la tête qui la réveilla de sa crise de nerf. Après ce geste «sauveteur» qui calma complètement Safia, le soldat s’adressa au Harki ;

-        Qu’as-tu bien pu faire à ces dames pour qu’elles se mettent à hurler comme des folles?

-        Je ne leur ai rien fait, répondit le Harki.


Le FSE s’adressa alors aux femmes :

-quand l’armée effectue des opérations de fouilles dans le village, vous devez toutes sortir de chez vous et vous rassembler a la Djemaa, en plein air. Ne restez jamais cloitrées à la maison.

Après cet incident circonscris, les femmes quittèrent la maison pour se joindre au reste de la foule rassemblée autour de la Djemaa. Sur le chemin elles rencontrent un autre groupe de soldats. L’accoutrement dévalorisant leur beauté, en ces temps de violences de toutes sortes, le ‘maquillage’ au charbon et a la cendre cachait la beauté de ces femmes pour leur épargner l’attrait sexuel que pourraient éprouver ces jeunes soldats et autres harkis pervers. L’astuce fonctionnait presque a tous les coups. Mais cela n’avait pas empêché un soldat de chercher à éveiller la curiosité d’un de ses compagnons en ironisant ‘

-        Comment peux-tu reconnaitre les jeunes des vielles?

-        Elles sont toutes moches et vieilles, lui répondit, son compagnon.

-        Imbecile1 tu es vraiment naïf. Elles se sont amochées volontairement avec du charbon de bois et de la cendre humidifies.

-        Regarde bien, je vais te montrer comment il faut procéder. Le soldat se dirigea directement vers Ouerdia et, d’une poignée de main solide lui prit la mâchoire entre le pouce et les quartes doigts, serra fort pour l’obliger a ouvrir a bouche qui fait apparaitre une dentition régulière faite de deux rangées de dents blanches étincelantes.

-        Tu vois? Fit-il à l’adresse de son compagnon en montrant le minois d’Ouerdia comme pour l’exhiber, une vieille n’aurait jamais une dentition comme celle-ci. Elle serait au mieux édentée, ajouta-t-il

Zahra qui avait observée tout ce manège n’a pas supporté ce geste dégradant. L’image d’un mouton de l’aïd lui traversa l’esprit, en train d'être foulée par un marchand de bétail les choses s’étaient arrêtées la, heureusement car Zahra n’est de nature à se laisser tripoter sans réagir violemment.

 Le Soir, elle ne manqua pas d’exprimer sa déception a sa sœur;

-        Ca te plait, ce que tu as subi, tout a l’heure?

-        Quoi donc? S’interloqua Ouerdia.

-        Ca te plait d’être touchée sans réagir de ce pervers qui a même cherche à t’isoler?

-        Que vois-tu que je puisse faire? Nous sommes en guerre, et ca concerne tout le monde.

-        Ah! Si c’était moi, tu verrais bien ce que j’aurais fait. Et bien, soit sure qu’a partir de ce moment ou je te parle, tu dois te passer de ma compagnie. Et désormais tu ne reverras plus ici, dans ce village.

Zahra se sépara du reste de la famille et de ses hôtes pour aller rejoindre le « le refuge» ou elle trouva les moussebelines a qui elle leur tint ce langage :

-        Notre village a été évacué, les hommes ont été extermines et les femmes éparpillées sur d’autres villages environnants. En ce qui me concerne. j’ai décidée de mourir au maquis. En tous les cas, je n’admettrai jamais une telle situation : ma sœur a failli être « enlevée par les soldats français

Depuis, Zahra ne donnera plus signe de vie. Elle avait pris le chemin de Draa El Mizan, troquant son métier d’infirmière a Iguersaffene contre celui de combattante;

« Je préfère combattre et donc tuer que de soigner, depuis que j’ai assisté a la mort de mes frères maquisards, et aux exactions de mes sœurs. Je me suis résolue à admettre que mon métier est de tuer et non de soigner »

Ainsi débute la vie de maquisarde intrépide de Zahra qui prendre le nom de guerre de Malika et que les services coloniaux vont bien ficher comme terroriste.

Zahra, avait tout d’une combattante sans peur. Une anecdote racontée dans son entourage immédiat et confirmée par les proches parents ne donne une idée assez précise du caractère de cette femme pourtant très discrète ;

Un jour de ratissage dans la région d’Ait Ghobri, un maquisard armé d’un MAT 49 est venu se refugier dans une maison du village fuyant les soldats français. Devant le danger imminent les femmes avaient pris l’initiative de cacher l’infortuné dans un akoufi, une gigantesque jarre en attendant que l’orage passe. Mais mal leur en prit, les bonnes femmes ont remis le couvercle et bouché les siphons empêchant l’air de passer a l’intérieur de la jarre ou était terre le combattant, le privant ainsi du précieux oxygène. Il s’en est fallu de peu que le combattant se soit asphyxie. Les femmes mirent fin ses souffrances en le libérant de sa cache, mais une fois les soldats ayant quitte les parages.

Zahra ayant appris cette anecdote n’a pas raté l’occasion de faire cette digression :

« Celui-là qui est armé d’une mitraillette et qui vient se terrer dans un akoufi et gardé par des femmes, n'est pas un maquisard. C’est un peureux. Et pour moi un maquisard ne dit jamais un peureux.» La sentence est dite, mais Zahra ne savait pas que l’homme qui avait échoue dans un akoufi, n’avait pas une bonne connaissance des lieux et des personnes de la région. Il est venu de loin et de ce fait exposer sa vie en livrant un combat douteux avec une force militaire organisée et fortement équipée serait une pure perte pour la révolution.

Plus tard, le maquisard qui avait élu refuge dans un akoufi s’avéra un authentique mais malheur lui en prit, même après avoir appris la réaction de Zahra, lui exprima son amour par messager en demandant sa main en mariage en ces termes :

«Dites à celle qui m’avait taxé de peureux que je voudrais l’épouser s’elle veut bien accepter ma main »

La réponse de Zahra montre bien qu’elle n’avait pas le temps à s’occuper de déclaration d’amour encore moins de noces.

«Dites à ce maquisard à mitraillette qui s’est cachée dans un akoufi que moi je n’épouserai jamais un peureux »

La suite de l’histoire va confirmer le caractère inflexible de cette femme hors du commun. Il suffit pour cela de jeter un regard sur son palmarès que nous avons intégré dans un autre paragraphe.


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