Petit précis de « néo-viralisation » à l’heure du grand aveuglement social media
Il est des sujets que l’on retourne dans son cerveau, le jour, la nuit aussi hélas, pendant des semaines, jusqu'à la fulgurance ultime qui pousse à le coucher d’un trait sur le papier. Vous me voyez venir ? C’est le cas de ce nouvel article. Je confesse volontiers que la « viralité » m’a toujours passionnée. Le sujet est porteur à l’heure où chacun, à son échelle, est institué producteur de contenu : un commentaire, un thread sur Twitter, une capture d’écran, un statut sur Linkedin (pas toujours très heureux d’ailleurs), le personal branding fait rage, chez les individus et les marques.
Tout est contenu … viralisable. Ah la viralisation, véritable illumination, aura sociale qui nous offre selon les cas un shoot d’adrénaline, une validation de notre statut en ligne, du business sonnant et trébuchant. Viraliser est désormais plus que le fruit d’une méthode, c’est un art. Intrigués ? Tant mieux, c’est le but ! Que faut-il savoir, maîtriser, appliquer pour que nos contenus s’envolent sur les réseaux sociaux et atteignent le stade rêvé du dark social ... qui ne se résume pas aux messageries privées et aux groupes, loin s’en faut. Sous les lumières blafardes du social media highway, des signaux un peu partout qui nous guident. Suivons-les.
La qualité : indispensable mais encore ?
La qualité est indispensable : une évidence. On se doute bien que le qualitatif permet de s’imposer ... mais est-ce réellement suffisant ? Aujourd’hui, certainement non. Demain ? Peut-être ... c’est en tout cas l’avis de Stéphane Mallard conférencier et auteur du livre Disruption avec qui j’en ai discuté récemment. D’après lui, la puissance des algorithmes et des systèmes de recommandation font que le contenu excellent émergera prochainement au détriment de tous les autres contenus moyens voire médiocres.
Hallelujah ! Reste à définir ce qu’est un contenu qualitatif à l’ère du digital. Nous avons tous une définition assez subjective de la chose.
Je retiendrai cette citation de David Kearns, ancien député américain et ex-CEO de Xerox : « Dans la course à la qualité, il n'y a pas de ligne d'arrivée. »
Vaste problématique donc à laquelle un guide de 168 pages édité par Google et mis à jour en décembre 2019 apporterait quelques réponses, définissant au passage la notion de qualité sous le prisme des moteurs de recherche (SEO). Le tout à la lumière du système d’évaluation de Google qui se base sur trois principes majeurs : l’autorité, la fiabilité et l’expertise.
Si vous avez du bon sens, pas la peine de tout lire : le document en question vous explique, entre autres éléments, qu’induire en erreur ses lecteurs est mauvais, que les subterfuges sont redoutables, les liens cassés / erronés dommageables, que la publicité intempestive doit être limitée, l’orthographe et la grammaire convenables … Rien de sorcier au final : mettez-vous à la place de la personne qui va lire votre contenu, c’est le mieux à faire. Une fois ce principe acquis et généralisé, quels sont les facteurs et ingrédients qui vont garantir la véritable mise en lumière de vos contenus sur la toile ?
De nombreux auteurs américains se sont penchés sur cette question ces dernières années ; parmi les meilleures études selon moi, Le Point de bascule de Malcom Gladwell et Contagious de Jonah Berger. J’ai également pu creuser le sujet de manière assez approfondie il y a quelques années lorsque je travaillais en institut d’études ; cinq éléments sont à retenir :
- Le contexte : « le bon contenu sur le bon canal au bon moment », un classique sur lequel je ne m’étendrai pas, vous avez tous eu vent de ces principes en catch phrase sur un PPT, keynote, tweet ...
- Les émotions : nous partageons des messages qui impliquent des émotions fortes, a fortiori sur les réseaux sociaux. Là aussi pas besoin de vous faire un dessin.
- La pertinence : une notion floue en ce qui concerne les contenus, je l’admets. La pertinence se définit par rapport à quelque chose, une marque, la recherche d’un utilisateur ... La pertinence, c'est l'adéquation du contenu avec ce qui est recherché et attendu.
- La devise sociale : une grand partie de « l’identité en ligne » est construite par la « devise sociale », à savoir ce qu’on partage avec les autres, ce qu’on leur offre. En publiant un contenu, les internautes ont besoin de mesurer l’effet produit sur leur propre image : ce « share » va-t-il les rendre cool ou démodés ? Va-t-il les engager en les amenant publiquement à une prise de position ?
- La practicité : le contenu doit être utile, voire indispensable pour l’audience visée, cela peut se matérialiser par des tutoriels, des foires aux questions ... Il est également possible de susciter un intérêt purement pragmatique avec des bons plans, réducs, ...
Travailler la forme !
Maintenant qu’on a parlé du fond ... voyons la forme. Elle importe bien plus qu’on ne pense. Laissons le débat sur « le slow content », le « less is more » ; je ne pense pas avoir atteint le seuil critique d’attention du poisson rouge, si j’ai envie de prendre le temps de lire tel ou tel article, je vais le faire, peut-être pas à la seconde près mais je le mettrai de côté pour le parcourir à un moment plus propice. Cela étant dit, je reste persuadée qu’un bon contenu demande de l’analyse, de la réflexion, de la recherche et de la mise en perspective ... or cela prend du temps.
Une stratégie éditoriale qualitative est nécessairement moins fournie ... ou alors elle coûte plus cher car il faut acheter du jus de cerveau pour effectuer la tâche. Mais même là, cela implique de trouver les bons talents - je ne parle pas des moutons à 5 pattes mais de la pluralité des compétences nécessaires pour mener à bien une stratégie de contenus : des data analysts, des infographistes, de experts SEO/AEO, des journalistes / rédacteurs (j’espère ne pas m’attirer les foudres en croisant les deux spécimens), des développeurs (qui comprennent la logique éditoriale et la construction d’un article), des créatifs, des marketeurs et j’en passe.
Certains rétorqueront que l’on peut obtenir des bons contenus sans data analyst et autres ; je suis d’accord. Reste que, si on a de la donnée de marque à exploiter dans un storytelling ancrant sa singularité, avec en prime une belle data visualisation, des temps forts orchestrés dans le déploiement en ligne et sur les différentes plateformes, bref, une stratégie menée avec les bonnes tactiques (et pas inversement), là clairement on ne joue pas dans la même catégorie. Après, il faut savoir ce qu’on veut … et s’en donner les moyens ;-).
La qualité a un prix que tous ne peuvent pas s’offrir. On peut néanmoins « faire moins mais faire mieux » et privilégier la rareté dans un monde d’abondance pour susciter l’envie.
Parenthèse fermée. Je suis dispo pour approfondir le sujet sur Twitter si besoin ;-). La forme donc, toute puissante, sujet cher à Google, (dixit la bible de 168 pages) même si, à ma grande surprise, il n’existe aucun livre ni manuel ni post exhaustif sur le sujet. Je parle bien évidemment d’un recensement des plugins et des outils facilitant le partage d’un contenu depuis un site ( oui, si vous n’avez pas compris qu’il faut réinvestir votre Owned Media à minima, je ne peux plus rien faire pour vous).
Vive les mécanismes de partage !
La forme est une chose. Mais qu’en est-il donc des outils et technologies indispensables pour faire émerger vos contenus ? Car cela va sans dire : comment voulez-vous que les gens partagent des contenus … qui ne sont pas optimisés pour le partage ? Solution : mettez-vous à la place des internautes, soyez smart et facilitez la viralité technologique de vos contenus. Ce qui suppose certains réflexes.
1- Facilitez le partage
Les boutons de partage
Je me souviens d’un petit-déjeuner passionnant avec Cyrille Franck du genre où ça fuse autour d’un café, où l’on saute de Sapiens à TechCrunch en passant par Spinoza et Kant.... pour finir, de manière terre-à-terre sur les boutons de partage en ligne. Il a d’ailleurs réalisé un slideshare sur le sujet il y a quelques années ... intéressant de voir comment les médias ont évolué à ce propos. Bref … Commençons par un peu de bon sens : coller tous les réseaux possibles dans un bouton de partage n’est pas constructif. J’ai encore vu Viadeo apparaître très récemment sur un site pourtant refait il y a peu ... Viadeo, sérieusement ?
Pensez à vos audiences ! Utilisez Google Analytics (GA) pour comprendre comment sont trouvés / partagés vos contenus et sélectionnez les bons réseaux !
Par exemple, pour une marque B2B, j’aurais tendance à miser sur Linkedin, Twitter, WhatsApp, SMS, Partage Email, et pour le côté avant-gardiste Quora et Reddit (parce que oui, je sens un grand revival, dixit l’un de mes derniers articles). Pour du B2C, sans doute Facebook, Whatsapp, Twitter en trio de tête. Une chose est certaine : il faut penser à faciliter le partage de ses contenus pour les canaux « dark social ». Un impératif !
Je vois déjà les créatifs s’exclamer : « et Pinterest ? » Encore une fois, tout dépend des usages ! Personnellement, je préfère l’intégrer dans l’image. Exemple ci-dessous avec le bouton « enregistrer » en haut à gauche.
Sinon, j’aime beaucoup le fait que Madame Figaro ait placé un bouton « commentaire » avant tous les autres, un peu comme Futura Santé ou BuzzFeed qui vous invite à être « le premier qui commente ». A mon avis, la démarche est la bonne ;-).
Less is more ? Slate ne propose que trois options : Facebook, Twitter et la possibilité de commenter ... tout comme ce site hyper intuitif, Hackernoon, qui fait un all-in sur la fonctionnalité « Tweet » ou le site Ploum.net qui valorise le partage pour les liseuses. Vous savez ce qu’on dit parfois, le mieux est l’ennemi du bien ; ici ce serait : « le trop est l’ennemi de l’efficace ».
"Embedder" ses contenus ?
Intégrer un tweet, un post Instagram à un article est devenu monnaie courante, mais avez-vous pensé à utiliser cette technique avec vos contenus ? C'est le pari audacieux de The Texas Tribune dont la barre de partage et l'onglet "republish" mènent à une page dédiée sobrement intitulée "SVP prenez nos contenus". Il est bien évidemment hors de question d'opérer n'importe comment. Le site propose un court explicatif (allez voir par vous-mêmes ici ) pour que vous puissiez intégrer ses contenus à bon escient. C'est un moyen intéressant de limiter le plagiat, de favoriser la viralité de ses contenus ; ils sont pensé à tout : on trouve un système de tracking pour suivre "l'audience déportée" et rediriger vers leur site. Smart !
Alertes, notifications, emails ...
Ne négligeons pas la base, jamais : le flux RSS (non il n’est pas mort), les push notifications, un push newsletter à chaque article ou sur une période donnée. La base, vous dis-je ...
Autre point important : pensez à la lecture mobile. Placez des boutons de partage aussi / ou juste à la fin de l’article ; souvent (moi en tout cas), on préfère partager un article qu’on a déjà lu. C’est visiblement le point de vue de la MIT Technology Review qui a désormais intégré ses boutons uniquement en fin d’article ; Futura Santé a ajouté une barre fixe en bas de page de sorte que vous pouvez partager à tout moment de votre lecture.
Ça me fait penser à un outil qui permettait de télécharger gratuitement un livre blanc en tweetant plutôt qu’en renseignant un formulaire ; le process m’avait interpellée. Partager avant d’avoir lu ? Remarquez, on pourrait faire un article conséquent sur la vacuité des réseaux sociaux ... mais là n’est pas le sujet.
2- Valorisez le partage « d’insight »
C’est indispensable! De quoi s’agit-il exactement ? De cette phrase, de ces quelques mots qui vous accrochent quand vous lisez un article … ou du texte qui annonce son partage sur les réseaux sociaux. Il existe de nombreux plugins/outils qui permettent justement de partager des extraits, ou de rajouter un lien quand un utilisateur effectue un copier/coller d’un passage ; je constate cependant qu’on les voit de moins en moins sur les sites comme le NYT. Selon moi, ils n’ont peut-être pas su trouver leur public, ou le fonctionnement n’était pas assez intuitif sur mobile. Ça vaudrait le coup de leur demander.
J’étais une fervente de la « comment section » de Medium qui pouvait s’intégrer à des passages donnés, le tout mis en relief sur le côté. J’ai été, comme beaucoup d’autres, extrêmement déçue par la disparition de cette feature. Je me suis toujours demandée pourquoi les marques et médias n’avaient pas développé le même concept. Trop visionnaire pour l’époque ?
Avec l’avènement du long form, de nombreux médias désirent faciliter la lecture sur mobile. Cela peut passer par un système de chapitre en début d’article pour accéder directement à une section particulière, c’est notamment le parti pris du magazine Psychologies dont chaque sous-titre est cliquable et mène, que l’on soit sur mobile ou PC, à la bonne partie.
Autre exemple intéressant celui du média Unhype qui a créé une section « TL;DR », « too long, didn't read », c'est-à-dire « trop long, pas lu » avec les points clés à retenir de son article
Une approche similaire à Vogue Business avec ses « key takeaways » placés en début d’article.
Des marques développent leurs propres « boutons à réaction » intégrés à certains passages dans le corps de l’article. Là-aussi pour mettre en avant le partage de l’insight.
Et parce que, parfois, les meilleurs insights sont dans les remarques, pourquoi ne pas donner la possibilité de s’inscrire pour recevoir les derniers commentaires ? Un service proposé par la société Disqus vous aide ainsi à bâtir des audiences directement sur votre site.
Autre option... des questions en lien avec l'article !
L’impact du multi-format et du « social by design »
Je vous épargne les banalités du genre : « une image vaut mille mots » ou « la vidéo doit faire partie de votre stratégie ». L’heure est désormais à l’hybridation des contenus. On prend des formats, on mélange, on adapte, on fait évoluer, bref on fait preuve de créativité, notamment lorsqu’il s’agit de formats longs dont certains rendus sont particulièrement impressionnants sur mobile. Allez lire cette rocambolesque histoire Tinder mise en scène par le tabloïd norvégien VG qui mêle de l’audio, des instagram stories, du Tinder Swipe ou encore cet article du NYT sur les écureuils en circulation à Central Park ... 2 373 écureuils, si vous voulez tout savoir.
Évidemment, n’est pas NYT qui veut, mais les marques, chacune à son niveau, devraient travailler leurs contenus pour qu’ils intègrent cette dimension multi-formats en misant par exemple sur de l’UGC : un tweet ou un Instagram post d’un utilisateur pour donner un aperçu visuel à son compte, tout en mettant en valeur ses communautés. Le suédois Acast , spécialisé dans la distribution et la monétisation des formats audio, a notamment travaillé en détail l’intégration on-site et le partage optimal du format sur les différents sites / plateformes sociales.
Mais d’autres solutions existent sur le marché pour notamment faciliter les micro-partages tout en valorisant visuellement leur contenu pour les différentes plateformes sociales. Voici plusieurs mois que je parle du « social by design », soit la manière dont tous les futurs services que l’on va utiliser vont intégrer la brique sociale dès la conception même du service. La première étape s’est vue dans le développement des outils dits collaboratifs.
Aujourd’hui, tout devient collaboratif. Deux exemples démontrent que l’on va dans ce sens : FrontApp, qui entend révolutionner vos boîtes mails, ou encore Descript, à la base un outil pour faire des transcriptions et éditer des extraits audio ... mais dont l’interface est là aussi particulièrement « sociale ».
Confluence, Dark Social... et infiltration !
Que serait une bon contenu sans l’influence ? Sans être porté par une communauté ? Le terme consacré de « confluence » est particulièrement juste. Aujourd’hui plus que jamais, le content marketing et l’influence marketing doivent se conjuguer au pluriel. Il faut savoir identifier les bons relais pour sa marque : son top management, ses employés et parmi eux les différents experts, ceux qui sont déjà présents sur les plateformes sociales. Comprendre comment ils s’engagent, quels contenus ils partagent, ce qui les motive.
Et il ne s’agit pas de penser l’influence comme un passe-plat, mais bien d’intégrer des démarches collaboratives autour de ses contenus.
Tirer partir des UGC, faire du crowd-sourcing, de la co-création, encourager les démarches collaboratives. Une composante qui se développe partout, en B2B comme en B2C. Bref du conversationnel.
Les plateformes sociales l’ont bien compris, elles qui multiplient les features collaboratives et conversationnelles : quizz, sondages, group stories ... des dispositifs que les marques pourraient très bien re-créer dans leurs écosystèmes autour de leurs contenus . Et cela peut commencer de manière subtile, dans une newsletter par exemple, comme celle du média Abacus (à droite), qui donne vie à l’éditrice grâce à des petites bulles de conversation qu’on aurait presque envie de capturer et de partager avec ses amis.
Et si on vous parlait d’ « utilité » ? Il se pourrait que ce paramètre devienne le must have des stratégies de content marketing à venir. Pourquoi ? On assiste au revival des plateformes et dispositifs de Q&A, en raison de la conjoncture actuelle, et notamment de la mutation du SEO en AEO (article complet à lire ici), mais aussi parce qu’elles constituent une excellente manière de faire du contenu utile. Cette tendance marche très bien en Chine et aux USA ; il s’agit de faire levier sur les sites des questions-réponses pour promouvoir ses contenus.
Sur Quora ou Reddit par exemple, guettez les questions qui peuvent être posées en lien avec votre expertise, et quand c’est le cas et que ça fait sens, redirigez vers un de vos contenus. Du content marketing communautaire et infiltré donc, qui peut même être porté par ses employés ! De quoi donner un nouveau souffle aux stratégies d’employee advocacy, qui aujourd’hui s’essoufflent sous le poids des contenus corporate trop lourds à diffuser, qui tout simplement ne résonnent plus.
Un élément d’autant plus important que la viralité est en passe de devenir ... invisible. On assiste actuellement à une mutation des usages vers les canaux dark social, vers les messageries privées, les newsletters long-form, des plateformes d’un nouveau genre, vers des slack, de nouveaux services de messagerie ... peu importe l’endroit tant qu’on est à l’abri des regards.
Or, pour que les marques puissent infiltrer ces conversations farouchement protégées, elles vont devoir ruser.
Migration vers les messageries
Et packager leurs contenus pour les adapter à ces sphères spécifiques : exemple ci-dessous du Washington Post qui a carrément déployé une newsletter politique faite pour « le partage sur Whatsapp » entre ses amis. Il y a une migration avérée vers les groupes et messageries privées, car au-delà de l’aspect intime, c’est un moyen de s’affranchir des algorithmes. Jusque-là, on restait dans les sphères des géants sociaux que l’on connaît, Facebook notamment, mais là aussi les lignes bougent. Telegram, Line, Viber, Dust, Signal, GroupMe... ou encore House Party, Bunch (les déclinaisons en vidéo)… on assiste à une importante atomisation des plateformes et usages qui va continuer à s'accélerer.
Cliquez ici pour voir le rendu complet de cette newsletter
Migration vers les outils collaboratifs
Or l’erreur consiste à penser que la mutation ne concerne que les messageries. Oh que non ! Certains font le choix des outils collaboratifs pour mieux s’engager avec leurs lecteurs. Ainsi le media The information ou encore MTA Martech Advisor qui promeuvent un Slack dédié à leurs communautés. Oui, communauté. Retenez ce mot. Car le défi des prochaines années est là : le marketing communautaire, comment détecter ces nouveaux canaux et comment infiltrer les conversations.
Migration vers des « salles de chat »
Discord ? Cela vous parle ? Entre le réseau social, la salle de chat et la plateforme de gaming, voici également un spécimen curieux qui prend son envol depuis quelques années. Si, à la base, la plateforme était utilisée principalement par l’univers du jeu vidéo, aujourd’hui ses usages ont varié, toujours plus originaux. Un exemple ? On ne présente plus le podcasteur PPC et ses différents podcasts, « Le Digital pour tous », « Influence Digital » ou « Pour de vrai ». Afin d’animer ses communautés de fidèles toujours plus nombreux, il a notamment créé un groupe privé pour les experts du marketing digital. Initialement sur Slack, le groupe vient de migrer vers Discord. Et pour en faire partie, il va falloir montrer patte blanche, être coopté … par des experts. Évidemment.
Pénétrons les coulisses de ce contenu communautaire fédérateur. Jean-Emmanuel Séré, un actif du groupe, m’a détaillé le process de création. Quand PPC a lancé l’idée de « Bonjour PPC », il a commencé seul puis a rassemblé un groupe de contributeurs via un DM Twitter. La première saison a été constituée ainsi, sur un Direct Message. Le principe est de co-construire l’épisode du lendemain. Depuis septembre, il a ouvert les contributions à tout le monde avec le tweet d’avant émission. Chaque nouvelle édition est accessible avec les informations et une introduction écrite du sujet sur le site « Digital pour tous ». Le slack a été monté pour ouvrir et diriger des contributions et discussions, avant de basculer tout récemment sur Discord. L’adhésion a été rapide, la communauté compte actuellement plus de 100 experts qui se donnent RDV le soir pour un live ; viennent ceux qui peuvent à partir de 18h /18h30, et là ça tchate. Un exemple à méditer.
Migration vers le « texting » et les relations one-to-one
Autre exemple qui prouve l’étendue et la complexité de la mutation à venir (eh oui, les messageries privées n’étaient in fine que la partie visible de l’iceberg ) : les SMS nouvelle génération, sujet que j’ai au demeurant évoqué dans mon rapport des tendances social media. J’y faisais allusion aux messages énigmatiques - « Just text me it’s easier »- qui parsèment les profils de stars sur les réseaux sociaux. Derrière ces messages, Community.
Présentée comme unique en son genre, cette plateforme conversationnelle veut favoriser « une communication directe, significative et instantanée à grande échelle, tout cela par le biais de la messagerie texte ». Ses fondateurs sont convaincus que les textos permettront aux artistes d'obtenir des informations sur l'identité, le lieu de résidence et les préférences de leurs fans les plus engagés, à la différence de Twitter, Instagram ou Facebook qui conservent ces données. Dans un entretien au magazine Billboard, le co-fondateur et CEO Mathieu Pelletier souligne le potentiel énorme de son service :
« 98 % des messages envoyés via Community sont ouverts dans les trois premières minutes, tandis que 90 % d'entre eux sont ouverts dans les trois premières secondes suivant leur envoi. En revanche, le pourcentage d'un public qui interagit avec un message est de 1,6 % sur Instagram, 0,48 % sur Twitter et 0,09 % sur Facebook, selon la société d'analyse des médias sociaux Rival IQ. Même lorsque les artistes et les labels dépensent des sommes à six chiffres pour des publicités visant à cibler des groupes de fans spécifiques sur les plateformes sociales, moins de 2 % des fans ciblés ont tendance à cliquer. »
Il semblerait déjà que d’autres sociétés emboîtent le pas. Subtext notamment vous permettra de suivre en direct les 2020 Tech Trends de la grande papesse du web et du digital Amy Webb, avec à la clé une discussion en one-to-one grâce à votre mobile. Le positionnement du service ? « Évitez le chaos des médias sociaux et démarrez une conversation qui compte. Envoyez des SMS sur vos sujets préférés et discutez en privé avec vos animateurs, comme vous le feriez avec vos amis. »
Infiltration servicielle
Vous avez le tournis, n’est-ce pas ? Votre post de blog vous semble soudain bien fade ? Ce n’est que le début. Si vous pensiez qu’il est difficile d’atteindre vos audiences, imaginez ce qui vous attend. La lumière est progressivement en train de s’éteindre dans les sphères sociales publiques, mais de discrètes bougies s’allument partout ailleurs sur la toile et IRL (in real life, c’est une infiltration à deux vitesses) sous des formes de plus en plus surprenantes, outils, plateformes, nouveaux réseaux communautairement forts.
L’enjeu ? Déceler le ou les leaders de la communauté. Vous faire inviter dans ces sphères. Et déchausser vos gros sabots. D'urgence.
L'enjeu va être fort autour de la créativité, du content hacking : techniques pour se jouer des algorithmes (l'obfuscation, les RT contextualisés, les « pods » à bon escient...), nouveaux positionnements de service induits par la créativité férue de certains esprits, ... Je ne vous en dis pas plus pour l'instant. Lisez cet article de Scott Belsky “Creativity is the new productivity” pour vous faire une idée précise ... et vous préparer à la suite ?
Revenons à nos moutons.
La marque va-t-elle disparaître pour être mieux personnifiée et portée par ses ambassadeurs ? Judicieuse question. Petit à petit, l’idée fait son chemin.
Il est certain que, vu le contexte, les marques n’ont plus le choix ; elles vont devoir faire de l’approche servicielle leur ADN : YOUTILITY BRANDS ! Il va leur falloir produire des contenus utiles, émotionnellement forts pour pouvoir s’infiltrer dans ces sphères hautement privées qui cherchent à les tenir à distance. Et surtout ne pas négliger une règle d’or : si la marque propose, c’est bien le consommateur qui dispose, et il n’entend pas être indisposé. Trop, c’est trop.
Au final, la vraie définition de la qualité est peut-être là. Des réponses pertinentes, des expériences pertinentes, une utilité pertinente.
Bref, sortez le popcorn, c’est parti pour swinguer, pivoter, se réinventer. Il y aura de nombreuses choses à écrire sur le sujet (un livre peut-être ?) ; je vais quant à moi m’arrêter là car je suis arrivée au bout ... de la nuit. A l’heure où je boucle cet article on est samedi, il est 5h, Paris s’éveille... et moi je vais aller me coucher, avec le doux sentiment de vous avoir secoué les méninges en multipliant les voies de réflexion social média.
Marie DOLLE
Un grand merci à Delphine Neimon, mon binôme, pour sa relecture de choc
© Dollé 2020
Essayiste, écrivain | Essai "Ce qu'il manque aux machines" | Direction de projets
9 moisMerci pour ce manuel très complet de la "viralisation". A travers ma modeste expérience sur Linkedin, j'essaie de comprendre ce qui peut paraître aléatoire dans l'impact d'une publication à côté des facteurs objectifs (qualité, audience, pertinence, contexte, forme). Des post "objectivement" comparables peuvent avoir des destins radicalement différents ; un succès fugace ou au contraire un démarrage lent, un succès exceptionnel ou au contraire végéter. Qu'est-ce qui produit ces singularité ?
Analyste stratégique et conseil en stratégie, #GoToMarket #BusinessAnalyse. Entrepreneur de la tech, conférencier, auteur, éditeur de médias digitaux.
4 anssuperbe, votre article, d'une rare générosité dans le partage : MERCI
Rédacteur et Co-Créateur de Tech-Ethic.com chez Marketor
4 ansMerci Marie pour cet article riche. Beaucoup d'idées intéressantes à creuser. Pour la prise en compte de la qualité par Google et/ou Linkedin, je reste sceptique pour l'avenir. En effet, les annonces commencent toujours par "notre nouvel algorithme va...". Or si l'on avait misé sur les algorithmes pour faire émerger Queneau, Céline, Magritte, Dali, Stromae ou Angèle... on n'en aurait jamais entendu parler ;-)
🌍 Analyste de solutions numériques de confiance et durables 🎯 Consultant - Stratégie & Accélération digitale ⏳ Interim CMO/CDO or CEO dans la Tech
4 ansBravo Marie Dollé pour ce remarquable article et à Aurélien Gohier pour avoir attiré mon attention. Laurent HERCE, cela devrait te plaire également
Executive Coach & Thérapeute - Coaching de dirigeant.e.s, d'équipes et d'organisations. - Thérapies Brèves, Hypnose, TCC
4 ansMerci Marie. Tu as bien fait de publier !