Petite réflexion personnelle sceptique quant à la leçon du coronavirus !

En ces temps orwelliens de pandémie, force est de constater que si la mondialisation économico-technique a créé une indiscutable interdépendance, la mondialisation de la solidarité humaine est, elle, loin d’être acquise : il n’est qu’à voir la résurgence des replis nationaux. 

La mondialisation néolibérale en légitimant la domination des puissants et en réduisant l’être humain à sa fonction utilitaire, corrompt les États et creuse les inégalités. Comme l’a suggéré Michel Foucault, le néolibéralisme est le “passage du marché sous contrôle de l’état à l’état sous contrôle du marché”. La prédation économique et la concentration conséquentielle de capitaux réduisent de plus en plus l’être humain à son seul rang de bien matériel. Cette vocation prédatrice reconfigure l’existence en seuls termes économiques, tend à rendre l’État de plus en plus autoritaire et formate les individus à des valeurs matérialistes. La notion spirituelle de sens est complètement occultée mais l’oubli de l’esprit contient l’oubli de l’être.

Les discours politiques sont confinés dans un prêchi-prêcha court-termiste aliéné au capitalisme. Dans ce simulacre démocratique asservi à l’hégémonie du capital, les hommes foncent tête baissée au chant des sirènes, marchent hypnotiquement vers la servitude. La force gouvernante de ce monde est incapable de se questionner sur ses fondements. 

Le confinement a fait prendre conscience de nombreux dysfonctionnements et donne l’espoir de changements. Mais ce ne sont à mon sens qu’améliorations et non réelle évolution. Une vision sur le long terme exige un véritable idéalisme rationnel plus global dégagé d’un pragmatisme court-termiste conservateur. 

Peut-être serait-il temps de s’interroger sur ce qu’est être civilisé !?

La notion de civilisation s’est fondée sur le mythe du pouvoir hiérarchisant et s’est promue sur l’appétit des honneurs, la soif de pouvoir et la cupidité, qui sont, en termes kantiens, des liens pathologiques. 

Par narcissisme culturel sociopathologique, « la civilisation se base sur l’État, sur la stratification sociale et sur le règne de la loi » (Thomas C. Petterson). Inventée par les tenants du pouvoir, l’Etat crée des hiérarchies, discipline le monde et impose des lois visant à tout contrôler. Un bon citoyen est celui qui est le mieux discipliné.

Chefs de guère, guère de réflexions en amont, / L’aval obtempère à l’éternelle soumission.

Tout l’art des gouvernements consiste à programmer et orchestrer l’attachement des dominés. L’évolution des civilisations se fait en les rendant amoureux de leurs chaînes. Elles n’ont même plus besoin d’être aux chevilles, elles sont dans les têtes. Ainsi le patriotisme en est un bel exemple: aux racines fluctuant avec les frontières, il arrive même à faire renier ses ancêtres. Ses fondamentaux ne sont qu’arrogance et mépris. Bien amenés sur un plateau par conditionnement social et intoxication mentale, ils transforment les êtres pensants en machines loyales permettant aux tenants du pouvoir et de la richesse de s’organiser pour régenter le monde en bâillonnant des millions d’hommes. 

La mondialisation est une aubaine à condition qu'elle ne se limite pas à de nouvelles oligarchies et/ou ploutocraties détruisant la solidarité mais que, libre et indépendante, elle se fasse unificatrice pour participer au destin commun sur la terre patrie.

Le système monétaire n’a pas de patrie, / Les nations s’y asservissent volontairement

Et prennent des odeurs de pourri / Sous l’impérialisme machiavélique de l’argent.

Au déferlement des vagues géantes / De la mondialité techno-financière,

En victimes consentantes / Sans l’esprit des Lumières,

Les hommes succombent aux sirènes envoûtantes / Des conquérants de l’inutile éphémère.

Le conditionnement est si fort / Et l’imprégnation dogmatique si puissante

Que le cerveau s’endort / Et inhibe la réflexion consciente.

Assis au bord du lit de son infatuation, / L'homme s'étonne de ses insomnies,

Mais incapable de vivre sans ses dominations, / Perpétue l'état mental d'asthénie.

Si l’inertie mentale assure une certaine cohésion, elle empêche aussi toute évolution. La mondialisation capitaliste et le discours identitaire éclipsent le lien social. Il serait temps d’inverser sa spirale de conscientisation c’est-à-dire de sortir de la hiérarchie normative et ses iniquités, et de considérer l’être humain en tant que tel et non comme maillon d’une chaîne conservatrice d’un système.

Une pensée civilisationnelle élargie à pleine conscience se doit de rompre avec la doxa libérale, de donner sens et dignité à l’être humain, d’instituer de vrais communs et de redonner à l’argent son caractère social collectif…. Et on en est encore bien loin! Immense fumisterie que de parler du monde d’après !

Inventer le monde d'après, c'est avant tout, prendre conscience de son enfermement mental, conscientiser ses excès de subjectivité et donner à ses fondements ipséitaires toute leur quintessence !