PEUT-ON INSTALLER DES CAMERAS DE SURVEILLANCE DANS UN IMMEUBLE EN COPROPRIETÉ ?

PEUT-ON INSTALLER DES CAMERAS DE SURVEILLANCE DANS UN IMMEUBLE EN COPROPRIETÉ ?

L’installation de caméras de surveillance en copropriété est principalement régie par la loi du 21 mars 2007 réglant l’installation et l’utilisation de caméras de surveillance, dite « loi caméras », ainsi que par le Règlement général sur la protection des données (« RGPD »).

Cette loi trouve à s’appliquer dans les immeubles appartenant à une association de copropriétaires, qui sont des « lieux fermés non accessibles au public » au sens de la loi caméras (article 2, 3°).

Une caméra de surveillance est définie par la loi caméras comme : « tout système d’observation fixe, fixe temporaire ou mobile dont le but est la surveillance et le contrôle des lieux et qui, à cet effet, traite des images ».

L’article 7 de la loi caméras définit les conditions sous lesquelles l’installation et l’utilisation de caméras de surveillance fixes dans un lieu fermé non accessible au public sont autorisées.


1.      Tout d’abord, la décision d’installer des caméras de surveillance doit être prise par le « responsable du traitement ». 

La loi caméras définit le responsable du traitement comme « la personne physique ou morale, l’autorité publique, le service ou un autre organisme qui, seul ou conjointement avec d’autres, détermine les finalités et les moyens du traitement de données à caractère personnel » (article 2, 5°).

Dans le cas d’une association de copropriétaires, le responsable du traitement est l’association de copropriétaires (représentée par son syndic).

La décision d’installer et d’utiliser des caméras de surveillance n’appartient pas à un seul copropriétaire et doit donc être prévue par les statuts de la copropriété ou par une décision prise par l’assemblée générale de copropriétaires.


2.     Le responsable du traitement notifie la décision d’installer et d’utiliser des caméras de surveillance aux services de police.

Cette notification aux services de police peut être effectuée par une personne désignée par le responsable du traitement (par exemple le syndic) et doit se faire au plus tard la veille du jour de la mise en service de la/des caméra(s) de surveillance.

Le responsable du traitement est également tenu de notifier aux services de police toute modification apportée aux caméras de surveillance (par exemple l’ajout de caméras).

Un formulaire type en vue de notifier la décision aux services de police est mis à disposition par l’Autorité de protection des données et disponible via le lien suivant : www.declarationcamera.be

La Direction générale de sécurité et prévention précise encore qu’une « validation de la déclaration doit avoir lieu au moins annuellement ».


3.     Le responsable du traitement tient un registre reprenant les activités de traitement d’images de caméras de surveillance mises en œuvre sous sa responsabilité.

L’association de copropriétaires doit tenir un registre, électronique ou non, qui doit pouvoir être présenté à l’Autorité de protection des données et aux services de police sur simple demande.

Les données qui doivent figurer impérativement dans ce registre sont arrêtées par l’arrêté royal du 8 mai 2018 relatif aux déclarations d’installation et d’utilisation de caméras de surveillance et au registre d’activités de traitement d’images de caméras de surveillance. Il s’agit notamment du nom et des coordonnées du responsable du traitement, des finalités du traitement des images, etc.

 

4.     Le responsable du traitement appose un pictogramme signalant l’existence d’une surveillance par caméra.

Dans le cadre d’un immeuble en copropriété, ce pictogramme doit répondre aux prescriptions suivantes (arrêté royal du 10 février 2008 définissant la manière de signaler l’existence d’une surveillance par caméra) :

-        Avoir une dimension de 0,15 x 0,10 m ;

-        Répondre au modèle et aux couleurs du modèle repris en annexe de l’arrêté royal précité (blanc, rouge et gris)

-        Être composé d’une seule plaque en aluminium d’au moins 1,5 mm d’épaisseur ou d’un autocollant plastifié.

Le responsable du traitement est responsable de la visibilité certaine de l’information. Ainsi, il doit veiller à ce que le pictogramme soit apposé en suffisamment d’exemplaires eu égard à la largeur et à la configuration des lieux.

Le pictogramme doit également indiquer de manière visible et lisible les mentions suivantes :

-        « Surveillance par caméra - Loi du 21 mars 2007 » ;

-        Le nom de la personne physique ou morale responsable du traitement, et le cas échéant, de son représentant, auprès duquel les droits prévus par le règlement général sur la protection des données peuvent être exercés par les personnes concernées ;

-        L’adresse postale, et le cas échéant, l’adresse électronique ou le numéro de téléphone, auxquels le responsable du traitement ou son représentant peut être contacté ;

-        Le cas échéant, les coordonnées du délégué à la protection des données ;

-        Le cas échéant, le site internet du responsable du traitement, où les personnes concernées peuvent consulter toutes les informations sur le traitement d’images au moyen de ces caméras de surveillance.

 

5.     Le responsable du traitement s’assure que la ou les caméras de surveillance ne sont pas dirigées spécifiquement vers un lieu pour lequel il ne traite pas lui-même les données.

Lorsque les caméras de surveillance sont placées dans l’entrée de l’immeuble de la copropriété et que celles-ci se trouvent à front d’un lieu ouvert ou d’un lieu fermé accessible au public, les caméras de surveillance doivent être orientées de manière à limiter la prise d’images de ce lieu à son strict minimum.

En outre, les caméras de surveillance ne peuvent filmer que les parties communes de l’immeuble, à l’exclusion des parties privatives.


6.     L’enregistrement d’images n’est autorisé que dans le but de réunir la preuve d’incivilités, de faits constitutifs d’infraction ou générateurs de dommages, de rechercher et d’identifier les auteurs des faits, les perturbateurs de l’ordre public, les témoins ou les victimes.

Si ces images  ne permettent pas d’apporter la preuve d’une infraction, d’un dommage ou d’une incivilité ou ne permettent pas d’identifier un auteur des faits, un perturbateur de l’ordre public, un témoin ou une victime, lesdites images ne peuvent être conservées plus d’un mois. Il en va différemment lorsqu’une enquête judiciaire est ouverte.

Il est à noter que le visionnage de ces images en temps réel n’est admis que dans le but de permettre une intervention immédiate en cas d’infraction, de dommage, d’incivilité ou d’atteinte à l’ordre public.

Qui peut accéder aux images ?

Seul le responsable du traitement ou la personne agissant sous son autorité a accès aux images.

Par ailleurs, le responsable du traitement ou la personne agissant sous son autorité doit prendre toutes les mesures de précaution nécessaires pour éviter que des personnes non autorisées n’aient accès aux images. Ces personnes sont soumises au devoir de discrétion (article 9 de la loi caméras).

Dans quels cas ces images peuvent-elles/doivent-elles être utilisées ?

Pour autant que l’installation et l’utilisation des caméras de surveillance respectent les conditions précitées, le responsable du traitement ou la personne agissant sous son autorité :

-        peut transmettre les images aux services de police ou aux autorités judiciaires s’il constate des faits pouvant être constitutifs d’infraction ou d’incivilités et que les images peuvent contribuer à faire la preuve de ces faits ou à en identifier les auteurs.

-        doit transmettre gratuitement les images aux services de police si ceux-ci les réclament dans le cadre de leurs missions de police administrative ou judiciaire et si les images concernent l’infraction ou les incivilités constatées. Dans le cadre d’un immeuble en copropriété, le responsable du traitement ou la personne agissant sous son autorité peut exiger la production d’un mandat judiciaire.

Droit d’accès

Toute personne filmée a le droit d’accéder aux images. Pour ce faire, elle est tenue d’adresser une demande en ce sens au responsable de traitement, conformément à la réglementation relative à la protection des personnes physiques à l’égard des traitements de données à caractère personnel (article 12 de la loi caméras).

Interdictions

Il est à noter que toute utilisation cachée de caméras de surveillance est interdite.

La loi caméras définit l’utilisation cachée comme : « toute utilisation de caméras de surveillance qui n’a pas été autorisée au préalable par la personne filmée » (article 8 de la loi caméras).

Est réputée donner son autorisation préalable, toute personne qui entre dans un lieu où un pictogramme signale l’existence d’une surveillance par caméra.

Il va de soi que les caméras ne peuvent fournir des images qui portent atteinte à l’intimité d’une personne.

Enfin, la surveillance par caméras ne peut viser à recueillir des informations relatives aux opinions philosophiques, religieuses, politiques ou syndicales, à l’origine ethnique ou sociale, à la vie sexuelle ou à l’état de santé (article 10 de la loi caméras).

Sanctions

Si les conditions sous lesquelles les caméras peuvent être installées ne sont pas respectées, l’association de copropriétaires risque de se voir infliger des sanctions pénales.

Par ailleurs, la production en justice d’images collectées par des caméras de surveillance installées irrégulièrement/illégalement pourrait faire l’objet de discussions, notamment au regard de l’admissibilité de la preuve.

Si votre association de copropriétaires décide d’installer des caméras de surveillance, il est donc indispensable de se conformer aux exigences légales qui régissent leur installation et leur utilisation ! A défaut, leur installation risquerait d’être privée de toute utilité..

Laurent Verbraken et Eline De Mol

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