Pour Serge et Tigrane, son diable

Pour Serge et Tigrane, son diable

Par Claude Maurier

Serge est l’ami de longue date, particulièrement heureux de vivre en France. Il me semble évident qu’il porte et traduit l’histoire d’un peuple martyrisé et d’une famille qui a choisi notre pays. Son territoire d’accueil !

Serge est naturellement écrivain depuis très longtemps. Il mérite une belle entrée dans la famille des auteurs sensibles qui possèdent une mémoire ancestrale forte, tant il est imprégné à vie de l’histoire de l’Arménie, encore là où il réside maintenant, en Touraine. 

Il a choisi, et cela tient de l’évidence, un « théâtre » de visualisation proche de ses origines familiales. Il s’agit du Caucase de l’après première guerre mondiale, pour déployer, touche après touche, tel un peintre d’une rare précision, au ras de la terre abimée, une ample fresque humaine qui aurait pu n’être que de couleur sombre ! 

Elle est très éloignée de cela, tellement surprenante, par la force des images vivantes qui y sont déployées. Elle est intense, tellement les mots sont incrustés, compacts et ajustés dans les évocations. La lenteur descriptive devient méthode d’expression, lovée dans l’architecture du récit : il s’agit d’incarner un souvenir puissant qui va chercher jusque dans les entrailles des acteurs.

Le tout est un panorama intégré d’histoires de vies minutieusement posées, dans un tricotage délicat sans autre emphase que le rythme donné par les mots simples posés dans de courtes phrases.

Ainsi, les tableaux que Serge a élaborés nous amènent bien au-delà de ce que nous apprenons habituellement des historiens. Qui oublient de nous parler des vrais ravages de la guerre, de la désolation et des vies presque rompues.

Son personnage central ne pouvait être qu’un noble Prince resté debout dans la déraison finissante des champs de bataille. Il a son lieu de « retraite » pour sublimer ses douleurs et amorcer sa renaissance. Vous allez pouvoir imaginer pas à pas l’émergence de son destin.

Serge lui a inventé une haute origine et un patronyme extraordinaire, Tigrane de Lambron, de quasi héros. Au moment de la publication, Serge m’en a parlé un soir comme d’un être qui a réellement existé en lui.

Les quatre premières lignes sont particulièrement fortes. Elles sont là et résonnent comme un gong, donnent le ton et annoncent la dimension de l’œuvre. Regardez, envisagez les images, allez voir bien au-delà des mots. C’est fort.

C’est le premier volume d’une œuvre lancée sans fanfare qui mériterait d’être adaptée à l’écran tant le texte comporte de détails visuels, de cadrages croisés sur des vies qui se cherchent lentement leur destinée après l’horreur. Avis aux réalisateurs et cinéastes en quête d’opportunités pour leurs prochains travellings !

La Forteresse perdue – Le diable de Çildir (Ed. ID France-Loire) de S. K. Durman

ISBN 979-10-92323-36-8

Serge-Eric DURMAN

⛩️ Écrivain Rédacteur de contenu et de témoignages 📖 Accompagnant en Efficacité professionnelle 🌸 Conférencier en langage corporel

5 ans

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