Dataïsme vs "biodiversité" des évaluations
On nous prédit donc encore une fois, sans doute pas la dernière, que tout va changer, que tout va bouger, que rien ne sera jamais plus comme avant. Freelancing généralisé, accélération de l’histoire, généralisation du calcul intensif, avec la gouvernementalité algorithmique absolue en ligne de mire, bref tout ce que nous croyions savoir du fonctionnement de l’économie et des relations de travail est en train d’expirer sous nos yeux.
Cette illusion de la mutation totale, de l’événement permanent, du bougisme continu est évidemment une occasion unique de réfléchir à nouveau à ce que nous croyons savoir de l’économie, et faire table rase, peut-être, des égarements du passé; cette mutation est une excellente nouvelle pour la réflexion et l’analyse prospective. Car nous savons bien en effet que c’est seulement lorsque nous avons la pleine maîtrise du monde qu’alors il devient proprement imprédictible : c’est lorsque les lois de l’économie sont parfaitement connues par les acteurs du marché, qu’ils se mettent chacun à tenter de se différencier au point qu’alors les règles changent, et que la connaissance que nous pensions en avoir s’est du même coup évanouie. Mais cette opportunité de penser le monde économique à nouveaux frais ne vient évidemment pas sans quelques tiraillements. Nous pouvons mettre en évidence, en nous appuyant notamment sur une approche philosophique des questions posées, au moins trois facteurs-clés :
- le premier point, c’est la montée en puissance du chiffre, du nombre, du « digit » dans le monde qui vient. La dataïsme est-il un humanisme ? Hélas non, pas vraiment.
- le second élément est largement lié au développement de l’intelligence artificielle. Comment créer des emplois, des professions, qui ne soient pas immédiatement rendus inutiles, ou surannés, par l’IA ?
- le troisième point, c’est le risque, lié à l’automatisation, de ne plus savoir ce que nous faisons et pourquoi nous le faisons.
Derrière ces différents aspects se cachent au fond un phénomène préoccupant que j'appelerais le discrédit opposé au discernement humain, la perte de notre souveraineté au fond. La gouvernance algorithmique a pour but de suppléé nos insuffisances certes ; le problème, c’est que ce type de gouvernance se montre incapable d’appréhender l’événement, ne peut s’imaginer que parfois nos choix, notamment moraux ou esthétiques, divergent de nos choix antérieurs. Bref que notre passé ne dit pas tout de notre futur. Il dit même souvent l’inverse d’ailleurs, pour peu qu’on soit créatif et imaginatif, comme c’est le cas des entrepreneurs qui se contentent le plus souvent, par agilité dit-on, de prendre le contre-pied des conformismes ambiants qu’incarnent les sociétés leaders du marché.
Pour relever ces défis, nous devrons d’abord :
- retrouver la voie d’une "biodiversité" des évaluations,
- sortir à tous les niveaux des indicateurs exclusivement quantitatifs qui ne peuvent appréhender notre complexité.
Peut-être est-ce au fond le management, cette science première, qu’il convient dorénavant de réinventer de fond en comble. Or les ressources infinies de notre propre culture européenne, ce point fixe qui seul nous permet d’établir, d’attester, qu’il y a mouvement lorsque quelque chose bouge, ou s’agite, peut contribuer à nous y aider. Le repère immobile du mouvement, c’est encore et toujours en effet l’art, l’histoire, la philosophie, ces arrière-plans de nos connaissances implicites qui échapperont toujours à l’ordinateur et qui nous permettent de combiner finalement force de calcul, émotions et souci de soi. Les Grecs utilisaient pour cela des notions qui peuvent nous inspirer comme le metron–le sens de la proportion-, le kaïros – le sens de l’opportunité-, la phronésis – une certaine sagesse pratique- ou encore la mètis, cette ruse de l’intelligence qui caractérise Ulysse, le premier grand personnage de notre littérature. Sans quoi les acteurs de la scène économique que sont les managers auront tôt faits d’être remplacés par leurs avatars au sein de la grande Odyssée numérique.
Expert Ruby on Rails
6 ansSi on veux évité la gouvernance algorithmique il faut des loi international comme on l'a fait avec les armes nucléaire et le clonage humain. Pour les armes nucléaire nous avions des vidéo qui nous montrait l'horreur et le danger de la chose mais pour le clonage humain nous n'avions aucun exemple avant de l'interdir. Donc pour ce qui est de l'IA il y a bien un discourt qui pourrai etre mise en place pour les qualifiés comme dangereuses et en limité la porté.
Professionnels Agriculture)
6 ansSi je comprends bien, et ce n'est pas très évident de lire cet article, c'est une alerte à bien garder les pieds sur terre, au bon sens que les nouvelles technologies ne peuvent avoir, un conseil à ceux qui tirent les ficelles de ce monde de ne pas se laisser prendre à leur propre "jeu" ... ? Isn't ?
Cardoso chez TPG Public Transport of Geneva
6 ansOn est entré dans une fase de élimination de l’être humain en tant que humain Ou alors il va falloir reculer et je pense impossible !!! C’est comme l’avion qui a pris l’envol et cherche l’aéroport pour descendre !!! Sauf que dans nôtre civilisation o n’est en plein vole et pas d’aéroport à l’horizon Bon week-end à vous
Deputy Director of Mines-ParisTech Sophia Antipolis, Professor of Fluid Mechanics at Mines-ParisTech
6 ansL"humain que je suis regrette son statut de bipède pour ne pas pouvoir vous applaudir des quatre mains. J'en profite tout de même pour lever les deux pouces opposables et vous dire : bravo !
Ingenieur automatisme chez Lead Technology Ltd
6 ans"Sans quoi les acteurs de la scène économique que sont les managers auront tôt faits d’être remplacés par leurs avatars au sein de la grande Odyssée numérique ." Les vrais managers ont déjà été remplacés par des gérants / gestionnaires qui ne sont pas beaucoup meilleursque leurs équivalents IA ....