Pour une "politique de fraternité"
"Politique” et “Fraternité” : ces deux mots paraissent a priori antinomiques.
D’un côté, la fraternité, ce sentiment personnel, cette capacité à reconnaître l’humanité en l’Autre, ce "lien de solidarité qui devrait unir tous les membres de la famille humaine." (Larousse)... De l’autre, la “politique” au sens de la politique publique, qui construit des cadres d’action, de la loi, du règlement. Portée par l’Etat et les collectivités, de nature plus verticale, plus descendante...
Justement ! Tout l’intérêt est de marier les deux : nous avons plus que jamais besoin d’une « politique de fraternité ».
Voici 12 bonnes raisons de passer à l'acte. Suivies par 6 exemples de mesures de "politique de fraternité".
1. Parce que c’est le troisième pilier de la République
La fraternité demeure pourtant le parent pauvre de la politique publique. Alors que les politiques publiques en faveur de la liberté et de l’égalité foisonnent (liberté d’entreprendre, d’expression, égalité des chances, des territoires, etc.). Pourquoi pas de politiques publiques d'ampleur en faveur de la fraternité, ce pilier de la République inscrit au fronton de nos 50 000 écoles ?
Cette fraternité qui s’exprime dans des moments de crise - sur les ronds-points des gilets jaunes ou après les attentats terroristes - ou de joie - quand la France gagne la Coupe du Monde de football - ne doit pas rester « cette vieille cousine fondue dans le décor, mais qui fait tapisserie et que personne n’invite » (Debray).
Une politique de fraternité pour refaire vivre pleinement toute la devise de la République.
« La principale critique que l’on peut adresser à l’Occident moderne, c’est d’avoir oublié l’idéal de fraternité en se concentrant aussi exclusivement tantôt sur les questions d’égalité, tantôt sur les libertés individuelles." Frédéric Lenoir
2. Parce que les solitudes augmentent
Plus de 5 millions de Français sont en situation objective d'isolement : un million de plus qu’en 2010 (source).
Une politique de fraternité pour recréer du lien social en proximité et casser cette vague croissante d’isolement.
3. Parce que les tensions et fractures dans la société sont de plus en plus fortes
Tous les six mois, un fait social secoue et déchire la société : gilets jaunes, voile, réforme des retraites, etc. Ces secousses sociales et sociétales s’inscrivent dans un mouvement de fond de montée des tensions dans la société : moins d’un Français sur 10 % estime que les communautés et les différentes catégories sociales se fréquentent et se côtoient sans problèmes. (source) Près de 3 Français sur 4 anticipent des tensions entre les groupes composant la société, dans les 10 ans à venir (source).
Une politique de fraternité pour résorber ces fractures sociales, territoriales, culturelles et générationnelles qui déchirent le pays. Pour inventer les lieux, les projets, les politiques publiques qui recréent du lien et des mixités qui bénéficient à tous. Réconcilions Paris, Marseille et la Creuse ! Pour que chacun trouve sa place dans la société… ou alors le risque existe de mal finir, dans l’affrontement et la violence. En un mot : “Tous ou Rien” !
4. Parce qu’on a de plus en plus de mal à comprendre et entendre l’Autre, celui qui ne nous ressemble pas
Le repli sur ses semblables prévaut - phénomène amplifié par les réseaux sociaux - le vivre séparé devient la norme, chacun vivant sur son île de la “France Archipel” (Fourquet). Mais comment se comprendre si on ne se connaît plus, si on ne se rencontre plus ?
L’altérité devient dès lors une agression : tu penses et parles différemment de moi, tu es en désaccord avec moi = tu m’agresses... Il est de plus en plus difficile de s’écouter, donc de s’entendre, au deux sens du terme - et de s’entendre y compris sur des désaccords.
Chacun veut qu’on l’écoute, qu’on le voit et qu’on le respecte ; mais personne ne veut écouter, voir et respecter l’Autre. L’intérêt collectif fait progressivement place à cet archipel d’intérêts particuliers.
Une politique de fraternité pour développer, dès l’école et tout au long de la vie, les compétences fraternelles : empathie, écoute, coopération, altruisme, bienveillance, intelligence émotionnelle, confiance, esprit de service, humilité.
5. Parce que le sentiment d’appartenance à une même communauté nationale s’érode
Symbole de cette érosion : le consentement à l’impôt n’a jamais été aussi faible en France (voir ici). Comment continuer à consentir durablement à l’impôt si chacun vit replié sur ses semblables dans un cadre de vie distinct (école, loisirs, services, culture…) ?
Riches et pauvres ne vivent plus dans le même monde : seulement 3% d’enfants défavorisés dans le secteur privé, par exemple. Et la centrifugeuse sociale du foncier/logement éloigne physiquement les classes sociales les unes des autres… La lutte des classes fait place à la séparation des classes !
Même les politiques sociales, en segmentant de plus en plus les personnes (RSA, adulte handicapé, “jeunes QPV”, chômeur longue durée, etc.) contribuent involontairement à fragiliser l’unité nationale.
Il existe enfin des dynamiques de séparatisme social, venant par exemple des très riches (voir ici) ou encore de communautarisme religieux (voir ici).
Une politique de fraternité pour régénérer nos “communs” comme par exemple la langue française ou la laïcité, deux piliers de la communauté nationale, aujourd’hui malmenés.
La langue française : à la fois levier clé d’émancipation individuelle et formidable liant collectif, ce puissant moteur d’unité est aujourd’hui enroué. La maîtrise du français est en effet loin d’être acquise pour tous. 100 000 enfants entrent encore au collège sans maîtriser le socle (lire, écrire, compter). 2,5 millions de personnes, pourtant scolarisées en France, sont en situation d'illettrisme. Des milliers de réfugiés et d’étrangers, notamment des femmes, n’arrivent pas à s’intégrer faute de maîtriser la langue. Or, on ne peut maîtriser son destin, si on ne maîtrise pas la langue. Au-delà de ces personnes plus vulnérables, le défi de la langue nous concerne tous. ¾ des actifs par exemple admettent faire des erreurs de français. Alors même que plus d’un DRH sur 2 affirme avoir déjà écarté une candidature, en raison d'une mauvaise maîtrise du français à l'écrit.
La laïcité : instrumentalisée pour diviser, opposer, entretenir la haine (anticléricale, anti-Islam) plutôt que pour rassembler et fédérer... Pour une laïcité fraternelle !
La fraternité dépasse en effet les clivages politiques. Elle est aussi à l’aise dans le champ républicain que dans le champ spirituel : la fraternité est une idée qui rassemble. Une politique de fraternité pour rapprocher et réconcilier.
6. Parce que la société fabrique de plus en plus des personnes qui ont moins... et de personnes qui ont trop !
Les deux sont en fait en difficulté : bien sûr ceux qui ont moins, qui n’ont pas le minimum vital pour vivre décemment ; mais aussi ceux qui ont trop : car le “trop” ne fait pas le bonheur ! Une étude menée aux USA par le prix Nobel d’économie Daniel Kahneman sur le bien-être de 450 000 américains montre qu’au-delà de 5000 dollars le bonheur n’est plus corrélé à l’argent gagné. « Au-delà de 75.000 dollars dans les Etats-Unis contemporains (...), une augmentation du revenu n'amène ni à ressentir du bonheur ni à être soulagé du malheur ou du stress, même si cette hausse des revenus continue à améliorer l'évaluation que les individus font de leur vie» (source)
Et pourtant, dans notre monde fou, les écarts continuent de se creuser. Les 2 153 milliardaires du globe disposent de plus d’argent que les 4,6 milliards de personnes les plus pauvres… Dans le même temps, près de la moitié de la population mondiale vit toujours avec moins de 5 dollars par jour.
En France, sept milliardaires possèdent plus que les 30 % les plus pauvres, et les 10 % les plus riches des Français concentrent la moitié des richesses du pays… A noter enfin que la France comptait 41 milliardaires en 2019, soit quatre fois plus qu’après la crise financière de 2008…(source : dernier rapport Oxfam)
Une politique de fraternité pour rapprocher ceux qui ont moins et ceux qui ont trop… pour le bonheur des deux ! La fraternité pour faire de deux problèmes une solution... Par des mesures incitatives (philanthropie par exemple) mais aussi coercitives (impôt par exemple).
7. Parce que notre système de solidarité se déshumanise
Notre système social est très développé, il délivre des prestations sociales nombreuses mais de plus en plus complexes et dématérialisées (digitalisées). Progressivement, il tend à devenir un système de distribution de prestations sans relation, un système descendant et froid dans lequel la relation humaine est dégradée. On constate d’ailleurs une augmentation du non-recours aux droits (RSA, CMU, etc.) (voir les travaux de l’Odenore)
Cette déshumanisation se retrouve aussi dans beaucoup de “lieux de vie” qui deviennent des lieux de survie, voire hélas parfois de barbarie : Ephad, instituts spécialisés pour personnes handicapées, Cada (demandeurs d’asile), lieux de gestion et d’octroi des allocations diverses (caf, Pôle Emploi, etc.), MECS (enfants placés), prisons, hôpitaux psychiatriques, HLM, etc. : nombre de ces lieux - pas tous heureusement - dédiés à la prise en charge de millions de personnes fragiles, ont en commun un déficit croissant d’humanité. De fraternité.
Une politique de fraternité pour réhumaniser l’accompagnement social des personnes vulnérables. Pour aussi prendre soin des personnes vulnérables de manière plus humaine, digne et décente. En les traitant comme des personnes à part entière (des frères !), des égaux et non comme des enfants, des victimes ou des monstres.
8. Parce que la fraternité cela marche mieux et cela coûte moins cher
La “non-fraternité” coûte cher à la société : par exemple, le coût des discriminations (handicap, femmes, immigrés...) sur le marché du travail a été récemment évalué à un manque à gagner de 150 milliards d’euros sur 20 ans.
Le traitement des personnes fragiles - personnes âgées dépendantes, handicapées, sans-abris, jeunes en difficulté, etc. - privilégie trop souvent l’isolement du reste de la société, la mise sous tutelle dans des centres spécialisés fermés et parfois infantilisants. Avec au final un coût souvent élevé et un impact mitigé.
Alors même que des alternatives moins chères et plus efficaces, basées sur davantage de fraternité - inclusion, autonomisation, citoyenneté - ont fait leur preuve, comme par exemple en Suède, avec les politiques du handicap dites de « désinstitutionnalisation » ou voir en France début de réponse alternative sur maladie d’Alzheimer avec la “Maison des Sages” fondée sur le lien social, qui coûte 30 % moins cher que les Ephad.
La fraternité coûte ainsi moins cher et est plus efficace.
Autre exemple avec l’initiative “Simon de Cyrène” qui développe et anime des maisons partagées à taille humaine, en centre-ville, où vivent ensemble des personnes valides et des personnes devenues handicapées en cours de vie (40 000 pers/an restent en vie avec de graves handicaps acquis). L’association a créé sa première maison partagée à Vanves en 2010. Trois autres ont ouvert leurs portes en 2012, depuis des maisons partagées ont été construites dans beaucoup d'autres villes françaises. Simon de Cyrène diminue le coût de prise en charge du handicap et améliore la qualité de vie de personnes handicapées (et valides aussi !).
Une politique de fraternité pour transformer la manière de prendre soin des personnes vulnérables. Une politique qui démontre que les solutions "fraternelles" coûtent moins cher à la collectivité et produisent plus de bien-être... pour tous !
9. Parce qu’il y a beaucoup de fraternités dormantes, à réveiller
Le baromètre de la Fraternité le montre bien : les gens ne « fraternisent » pas faute d’opportunité et par manque de temps, plus que par rejet ou par peur voir ici. Il faut donc « mâcher » le travail et offrir des opportunités d’engagement quasi « clé en main ». Car dans nos sociétés compétitives et nerveuses, l’élan altruiste, cette capacité fraternelle au lien social est souvent entravée, enfouie.
Par ailleurs, “SDF”, “réfugiés”, “jeunes des quartiers”, “personnes handicapées” sont des mots qui fonctionnent comme des “identités totales” qui écrasent toutes les autres identités de la personne concernée et renvoient à chaque fois à un imaginaire fermé, repoussoir et aveuglant même. Au point hélas de faire écran à LA personne en tant que telle, à sa complexité, à sa réalité et à inhiber la fraternité.
La fraternité, c’est l’art de briser ces écrans pour accéder à l’humanité des Autres.
Cette fraternité ne peut évidemment s’imposer ou se décréter. Mais en créant le bon cadre (de motivation, de rencontre, de suivi), ce potentiel peut se révéler avec sa pleine puissance.
Cela passe par des initiatives de la société civile. Exemple de l’application mobile et du « réseau de chaleur humaine » Entourage qui permet l’engagement concret des citoyens et des commerçants auprès des sans-abris, en proximité. Le réseau Entourage compte déjà plus de 40 000 membres et 3200 actions solidaires avec des sans-abris ont déjà été lancées.
Cela passe aussi par des mesures de politique publique, comme par exemple de la proposition (non retenue) du député de la majorité Aurélien Taché il y a 2 ans : une déduction fiscale pour celles et ceux qui accueillent chez eux un réfugié ou un SDF (en lien avec une association).
Une politique de fraternité pour libérer et concrétiser l’envie latente d’engagement et d'être utile d’une majorité de gens. En créant un cadre incitatif et sécurisant qui favorise le passage à l’acte des citoyens. Et en soutenant fortement le développement de ces initiatives fraternelles qui savent recréer du lien et "fabriquer du Nous".
10. Parce que les métiers fraternels sont des métiers d’avenir, à développer
Dans une société où les algorithmes vont remplacer un grand nombre de métiers (= tout ce qui est objectivable, incluant chirurgiens, experts-comptables, etc.) les métiers du lien social sont clairement des métiers d’avenir : aides à domicile, aide-soignants, auxiliaires de vie, conseillers en économie sociale et familiale, éducateurs, etc.
Dans son livre Disrpution (Dunod, 2018) l’essayiste Stéphane Mallard l’illustre bien : “vous n’irez plus chez votre médecin pour son expertise médicale. Il ne fera plus de diagnostics ni ne prescrira plus de traitements puisque l’intelligence artificielle s’en chargera. En revanche, vous irez toujours dans son cabinet parce qu’il vous écoute, vous rassure, parce que vous avez une relation empathique et de confiance avec lui : personne ne voudrait subir l’annonce d’un cancer de la part d’un algorithme.
(...) Même chose pour votre avocat (...) à terme lui aussi devra se concentrer sur l’excellence de la relation qu’il entretient avec vous et la plaidoirie qu’il prononcera devant des humains : l’humain à l’humain, la technique à la machine”. Puisque la connaissance est déjà une commodité, que l’expertise le deviendra bientôt (...) les entreprises et les individus vont devoir se différencier et apporter de la valeur sur ce qui reste une prérogative de l’humain : l’empathie”.
Une politique de fraternité pour développer ces métiers d’avenir, du prendre soin et de l’attention à l’autre. Pour aussi les réhabiliter et les valoriser (y compris en salaires) à la hauteur de leur utilité sociale réelle : beaucoup de ces “travailleurs du lien” sont en effet aujourd’hui en crise (précarité, temps insuffisant, détresse, surmenage...).
11. Parce que l’impératif écologique impose de sauver l’humanité... aux deux sens du terme !
D’abord, bien sûr, sauver l’humanité en tant qu’espèce menacée par les dérèglements climatiques.
Mais sauver aussi notre “humanité”, au sens fraternel du terme.
Il existe des courants écologistes porteur d'une vision négative de l’humain, coupable qui gagnerait au fond à disparaître ("bon débarras !"). Le risque d’une dictature verte, explorée dans le roman d’anticipation Air (Michel Lafon, 2019) n'est pas nul. Les effondrements partiels à venir peuvent provoquer la guerre de tous contre tous, ou au contraire générer un sursaut de fraternité. Comme y invite d'ailleurs le dernier livre de P. Servigne, R. Stevens et G. Chappelle "Une autre fin du monde est possible" (Seuil, 2019).
Une politique de fraternité pour humaniser la nécessaire politique volontariste de transformation et adaptation des sociétés aux dérèglements climatiques. En se souvenant, comme le dit Régis Debray dans son dernier livre le Siècle Vert “qu’on est toujours deux dans l’affaire Homme, la Nature et l’Esprit. Un Matériau et un outillage.”
12. Parce que ce concept réputé “abstrait” est reconnu juridiquement depuis 2018
Le Conseil constitutionnel a reconnu dans sa décision du 6 juillet 2018 la valeur constitutionnelle du principe de fraternité.
A l’occasion d’une “question prioritaire de constitutionnalité” (QPC) portant sur le délit d’aide à l’entrée, à la circulation ou au séjour irrégulier, souvent appelé « délit de solidarité » ou « délit d’hospitalité », le Conseil constitutionnel s’est prononcé pour la première fois sur la valeur constitutionnelle du principe de fraternité : “Il découle du principe de fraternité la liberté d’aider autrui, dans un but humanitaire, sans considération de la régularité de son séjour sur le territoire national ». Voir ici détail
Une politique de fraternité peut ainsi être fondée juridiquement.
Exemples de mesures de "politique de fraternité"
Si la fraternité relève du vécu individuel, la puissance publique peut en effet aussi créer un cadre favorable à son expression.
Voici quelques exemples de mesures existantes (à compléter !) :
→ Possibilité de faire don de ses jours de congé/RTT à un collègue dont un enfant est gravement malade ou « proche aidant ». Le don de jours de repos permet au salarié qui en bénéficie d'être rémunéré pendant son absence.
→ Le SNU, Service National Universel, en expérimentation, traduit une politique de fraternité : à la fois dans sa volonté de brassage et d’inter-connaissance social ; et dans sa volonté de développer à grande échelle le Service Civique. Pour qu’il devienne naturel pour tous les jeunes, quel que soit leur parcours (décrocheurs scolaires, demandeurs d’asile, jeunes grandes écoles...).
→ Soutenir les tiers-lieux de mixités : d’usages, de vie, de publics, comme les Grands Voisins à Paris ou Coco Velten à Marseille. Les soutenir par du financement (notamment pour la rénovation) mais aussi par de la mise à disposition de friches ou bâtiments publics vides. Dynamique existante à amplifier.
De nouvelles mesures potentielles (à compléter !) :
--> Celle déjà citée de crédit d'impôt pour des personnes qui accueillent et hébergent, même temporairement, des personnes vulnérables (sans-abris, réfugiés, etc.) en lien avec des associations.
→ Former les enseignants (et les élèves derrière) de manière systématique à l’empathie. Cela améliore les résultats scolaires des élèves, diminue la violence, le vandalisme et les discriminations de la part des élèves, ainsi que l’absentéisme et le taux de démission chez les enseignants.
→ Généraliser l’enseignement laïque du fait religieux à l’école et l'apprentissage du débat pour développer l’empathie et la compréhension d’autrui, en s’appuyant sur des initiatives qui ont fait leur preuve comme Enquête.
→ Dans le cadre de la loi grand âge à venir, revaloriser les métiers “fraternels” de l’aide à domicile, aujourd’hui dévalorisés et sous-payés. Voir la campagne Dites Leur Merci. Bien vieillir à son domicile, c’est le souhait de 97% des Français. Pourtant, alors que de plus en plus de personnes sont en perte d’autonomie, le nombre d’aides à domicile régresse ! Cette crise est le fruit d’absence de politique publique structurante depuis 20 ans.
Simples illustrations : il s’agit, avec d’autres, de travailler à élaborer une plateforme globale de propositions pour une politique de fraternité. Vos idées sont les bienvenues !
Conclusion (provisoire) : un nouvel Etat-Providence, pour une “société de l’attention”
Depuis quelques années, des intellectuels, praticiens, associations - encore peu nombreux - proposent la mise en place d’une politique de fraternité. Citons par exemple Jean-Baptiste de Foucauld, Abdennour Bidar, Jacques Lecomte, Patrick Viveret, Alain Caillé, Marie Trellu-Kane (voir ici par exemple) et dans les associations, le Pacte Civique ou encore le Labo de la Fraternité, une alliance nationale d’une quinzaine d’organisations engagées sur le sujet. Ce Labo est à l'initiative par ex d'un baromètre annuel de la Fraternité voir ici).
Je m’inscris ici volontiers dans leur sillon.
Derrière cette politique de fraternité, c’est aussi une autre vision de la société et de l’Etat Providence qui se dessine.
Un État Providence moins vertical, plus horizontal.
Moins dans le dispositif, plus dans l'affectif.
Moins dans la recherche du Bien, plus dans la recherche du Lien.
Un État Providence qui nous permette de davantage prendre soin les uns des autres (dans la logique du “care”) : l'État Providence du 21ème siècle passera davantage par l’Autre !
Il doit inviter à faire davantage attention les uns aux autres. Notre attention est aujourd’hui polluée par les réseaux sociaux, les applis, les buzz… Reprenons la main sur notre attention pour la polariser sur ce qui est important et nous rend vraiment heureux : les relations sociales.
Une politique de fraternité pour une “société de l’attention”.
A suivre ! Cet article se veut un document de travail, point d'étape, je suis à l'écoute et intéressé par toutes les idées, critiques, propositions, rebonds... A bientôt !
Secretaire général de l'établissement public d amenagement Euroméditerranée - Président de l'association des troisième concours de l'ENA et de l'INSP
7 moisNicolas Tanguy après le brunch d aujourd'hui :)
Secretaire général de l'établissement public d amenagement Euroméditerranée - Président de l'association des troisième concours de l'ENA et de l'INSP
1 ansAurélie Cousi Anaïs Cadier pour une lecture au calme à Saint cyr sur mer ou ailleurs. Voire en remission de grippe. Et y piocher des idées ou un approche dans laquelle on voudrait se faire accompagner pour écrire une stratégie Euromed de concertation - de fraternité ? - et d accompagnement des populations dans notre action... qui sait
Votre article contribue aux fondations du monde à réinventer. Recréer un sentiment de fraternité humaine passera peut-être aussi par le sentiment d'un destin commun avec le vivant. Et j'oserai proposer un cran de plus : fraternité + politique publique + monde des affaires (tiens, je ne sais même pas comment le nommer : business, économie, production des biens et des services ?...). Nous ne pouvons nous contenter de renvoyer aux citoyens et aux politiques la charge de remettre de l'humanité dans le vivre ensemble quand le monde dominant du travail promeut la compétition des égoïsmes (en interne et entre organisations). Accompagnons les (nombreux) mouvements des entrepreneurs responsables pour faire système avec l'ESS, la RSE, les "raisons d'être", les tâtonnement du management bienveillant, bref tous ceux qui cherchent une autre façon de produire et de "consommer" avec sens. Alors la fraternité sera le résultat d'une société apaisée, plutôt qu'une "cause" qui peut sembler abstraite à ceux qui n'ont pas vécu ce sentiment depuis longtemps. Merci de nous inviter à réfléchir à tout ça. Une tentative de création d'espace pour avancer ensemble : http://bit.ly/TIersLien2
Entrepreneur du bien commun
4 ansBien vu, bien dit Tarik, Il n'y a plus qu'à... je roule avec toi
Director - CISE - Centre for Innovation in Social and Ecological impact - Centre Innovation Sociale et Ecologique - ESSEC Business School
4 ansMerci Tarik . Du contenu comme toujours ! ton point 6 sur les inégalités me semble central et serait peut être la "mère des batailles". Même si le sujet ne s'y résume pas, laisser se creuser ce fossé crispe les relations entre les humains, et freine la fraternité. Et Autant je te rejoins sur les attentats ou la coupe du monde de foot comme instant de fraternité très fort, autant je ne vis pas les manifestations de gilets jaunes comme cela, plutôt le contraire ! On est plus dans l'affrontement, des somewhere contre les anywhere de Goodhart, des exclus contre les inclus. Dans les propositions, j'insisterais sur le soutien beaucoup plus fort à ceux qui créent de la fraternité (les associations locales en premier !) . Pour cela, la suppression des emplois aidés ne me semble pas aller dans le bon sens, la limitation du mécénat non plus (même s'il faut l'encadrer). J'ajoute un regret sur le voisinage, qui me semble une notion en déclin, et qu'il nous faudra faire renaitre, par exemple en gagnant la bataille de l'usage contre la possession (Liens versus biens justement !) et en poussant les voisins à partager davantage. En vous lisant, je n'ai pas pu m'empêcher de penser au discours du Bourget, "J'aime les gens je ne suis pas fasciner par l'argent", c'était quand même bien trouvé !