Pourquoi ils courent ?

Les avez-vous remarqué ces nouveaux habitants des villes : super équipés, seuls ou en bande, ils courent dans la ville, les jardins et parcs publics, les forêts « urbaines », au petit matin, le soir, été comme hiver… avez-vous remarqué qu’on en voit chaque année de plus en plus ? Mais qui sont- ils ? Pourquoi et après quoi courent ils ?

Il y a toujours eu des joggeurs du dimanche mais ceux dont on parle là sont des runners, à ne surtout pas confondre avec nos joggueurs du dimanche. Eux sont des vrais coureurs, ils s’entraînent au moins un fois par semaine, souvent deux, voire plus, et aiment bien se tester en participant à des compétitions.

Quelques chiffres :

on comptait 12M de personnes en France qui courent au moins une fois par semaine en 2015 alors qu’ils étaient 6M en 2000. 4,8M d’entre eux ont participé à l’une des 7500 ( !) courses répertoriées par la FFA (source : étude FFA Sportlab et SL Event).

Toutes les générations courent même si l’âge moyen reste jeune (35 ans), et les femmes sont de plus en plus nombreuses à courir, même si la majorité des runners sont encore des hommes.

On est donc bien dans un vrai phénomène de société, une vraie tendance lourde. Leurs motivations affichées ; 1- améliorer sa condition physique  2- être en bonne santé  3- perdre du poids.

Pour essayer d’en savoir plus j’ai interrogé des participants à une course dans la région parisienne (TechniTrail).

Quelques données générales qui valent à la fois pour les hommes et les femmes : courir « ça fait du bien », ça permet d’évacuer le stress et d’améliorer sa condition physique. Aucun ne parle de perte de poids parce que les vrais runners sont au-delà de cela, ils sont pour la plupart déjà très « fit ». Ils évoquent tous le côté très pratique de la course à pied qui ne demande rien à la base qu’une bonne paire de chaussure. On y va quand on veut, le jour ou la nuit, on peut s’organiser facilement avec le boulot et la vie de famille c’est finalement le sport le plus « compatible » avec la vie des actifs d’aujourd’hui. Alors, la course à pied, sport idéal pour la société contemporaine ? Oui probablement.

Ils soulignent tous très vite le côté addictif de la course à pied. On commence petit puis on s’aperçoit qu’on peut faire plus, alors on pousse plus loin, voire plus vite. Courir permet de libérer des endomorphines et nombreux sont ceux qui disent « si je ne peux pas courir, c’est la déprime ! ». il semble bien donc que courir soit devenu pour eux une vraie composante de leur équilibre, efficace et indispensable pour lutter contre une vie trop active, trop connectée, dans laquelle on a de moins en moins de temps pour soi et qui comporte de plus en plus de facteurs de stress. Alors, la course à pied remède contre le stress ? Pourquoi pas ?

Une différence se dessine toutefois entre les hommes et les femmes : les hommes expliquent souvent qu’ils sont passés à la course après avoir pratiqué d’autres sports. Chez eux on sent très fortement le goût du challenge, du défi, du dépassement de soi qui leur est procuré par n’importe quel sport. Sauf qu’avec le running les possibilités offertes sont extraordinaires : semi marathons, marathons et surtout le trail. Le trail, course nature, leur permet « d’augmenter la dose » car on allie la distance au dénivelé et là, ça peut vraiment devenir de la haute performance : 80kms en montagne avec 2500mêtres de dénivelé ça vous pose un Homme quand même ! 

Les femmes, elles, commencent la course parfois entraînées par leur conjoint, pour améliorer leur condition physique et souvent parce que c’est effectivement le sport le plus facilement compatible avec la vie professionnelle et la vie de famille. Elles s’aperçoivent alors, à leur grand étonnement, qu’elles progressent assez vite si elles pratiquent la course régulièrement. Elles se mettent alors à faire une compétition et voient là aussi qu’elles arrivent à finir (« finisher » c’est le premier objectif quand on débute), voire à performer. Et c’est alors, on le sent bien, une formidable opportunité de gagner de la confiance en soi et de s’affirmer dans leur couple, dans leur vie même, surtout lorsqu’elles ont un travail qui ne les met pas spécialement en valeur. Alors, la course à pied, levier de valorisation de soi ? sans nul doute…

La course à pied c’est aussi du lien social. Ceux qui pratiquent le running le disent tous : ils sont souvent en association, en club car c’est plus sympa de s’entrainer à plusieurs et ça stimule. Et je vous conseille d’aller assister à un départ de course pour mieux comprendre le phénomène running : vous serez forcément pris par l’émotion au milieu de tous ces gens super bien équipés, pleins d’envie et d’enthousiasme, qui se lancent tout à coup dans la course. Il y a de la musique, le « count down », le « GO » et on se sent vraiment au cœur de quelque chose. Dans notre monde qui parle sans arrêt « d’expérience » eh bien ça c’en est une ! Surtout lorsqu’il s’agit d’un trail en pleine forêt ou en montagne. On est alors pris à la fois par la beauté du paysage et par cette communauté de gens rassemblés l’espace du temps de la course par ce même esprit sportif et joyeux. Alors certes si on prend les mêmes à la fin de la course certains semblent avoir plus souffert que pris du plaisir mais vous verrez, une heure après ils vous diront que c’était dur mais qu’ils ont envie de recommencer ! Oui faire une course c’est une vraie Expérience Humaine !

Le danger ou la consécration du toujours plus : graal ultime des runners les plus « accros » : l’ultra trail (beaucoup de km (plus de 100) et beaucoup de dénivelé (plus de 3000m), genre UTMB, Diagonale du Fou…). Ces projets-là peuvent soit casser des couples soit les « surconsolider ». Les casser si c’est seulement un conjoint qui le pratique. Car alors l’incompréhension s’installe : ce type de compétitions est d’une exigence extrême, elles demandent un entrainement et une hygiène de vie au quotidien qui deviennent vite incompréhensibles voire insupportables pour celui qui ne partage pas et subit. Pourquoi se faire du mal comme ça ? Franchement c’est ça qu’on pense quand on n’est pas dedans… Il faut donc être très compréhensif et s’intéresser un minimum à la chose si on ne veut pas qu’un fossé bientôt infranchissable ne se creuse. Par contre certains couples en font un projet commun et là c’est très fort. Avoir terminé ensemble un UTMB ou une Diagonale du Fou, je vous le garantis c’est une expérience à deux extraordinaire. Rares sont ceux qui le font mais pour ceux qui y arrivent c’est à la fois inracontable et inoubliable. Alors, la course à pied, fracture ou ciment des couples ? A vous de voir…

Pour conclure je dirais que le running est devenu un vrai phénomène de société en France et que l’engouement pour cette pratique est probablement une réponse à la vie souvent très stressante des urbains actifs de tous âges. C’est très certainement un excellent facteur de prévention des maux de notre société contemporaine : dépression, obésité, burn-outs, malaises cardiaques…

Alors, qu’attendez-vous pour vous y mettre ?