Présidentielle ivoirienne octobre 2020 : on prend les mêmes et on recommence ?

Présidentielle ivoirienne octobre 2020 : on prend les mêmes et on recommence ?

Le lundi 14 septembre 2020, par la voix de son président, le magistrat Mamadou Koné, le Conseil Constitutionnel divulguait la liste définitive des candidats jugés apte - en conformité avec le code électoral - à participer au scrutin présidentiel du 31 octobre 2020. Sur un total de 44 dossiers de candidatures réceptionnés au préalable par la Commission Électorale Indépendante (CEI), seuls 4 dossiers ont été jugés recevable par le Conseil Constitutionnel. La compétition électorale opposera ainsi les candidats suivants : Alassane Ouattara (ADO) du Rassemblement des Houphouëtistes pour la Démocratie et la Paix (RHDP), Henri Konan Bédié (HKB) du Parti Démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI-RDA), Pascal Affi N’Guessan (PAN) de la tendance du Front Populaire Ivoirien (FPI) reconnue par la justice ivoirienne et enfin Kouadio Konan Bertin (KKB) en tant qu’indépendant. 

A travers la divulgation de cette liste définitive, le Conseil Constitutionnel vient ainsi trancher l’intempestif débat qui cristallisait les tensions sur la scène politique ivoirienne et qui se structurait autour de l’éligibilité ou non du Président ADO à une troisième candidature. En effet, pour les acteurs de l’opposition, une troisième candidature d’ADO serait anticonstitutionnelle à la lecture de l’article 183 de la nouvelle constitution votée en 2016 et qui dispose que « la législation actuellement en vigueur en Côte d’Ivoire reste applicable sauf l’intervention de textes nouveaux, en ce qu’elle n’a rien de contraire à la présente constitution ». Ainsi, pour l’opposition, vu que l’article 55 de ladite constitution qui dispose dans son premier alinéa que « le Président de la République est élu pour cinq ans au suffrage universel direct. Il n’est rééligible qu’une fois », n’a pas été modifié, ce dernier demeure applicable et empêche de facto ADO de pouvoir se présenter à nouveau à une élection présidentielle. Cette interprétation de la loi fondamentale n’est évidemment pas partagée par le parti au pouvoir qui quant à lui affirme que le vote de la constitution en 2016 ouvre le champ d’une troisième République qui autorise ainsi le Président ADO à être candidat en vue de l’obtention d’un premier mandat de la 3ème République. 

Au-delà de la recevabilité de la candidature d’ADO par le Conseil Constitutionnel, le traitement des autres dossiers de candidatures attire l’attention. Tandis que bon nombre de dossiers ont été jugés irrecevables faute d’avoir pu mobiliser les 50 millions de FCFA (environ 76 000 euros) nécessaires pour la caution, d’autres acteurs majeurs de l’opposition à l’instar d’Albert Mabri Toikeusse, Mamadou Koulibaly ou encore Marcel Amon Tanoh n’ont pu figurer sur la liste définitive des candidats car ces derniers – selon le Conseil Constitutionnel - n’ont pu récolter le nombre de parrainages nécessaires à la constitution de leurs dossiers de candidatures. En effet, le nouveau système de parrainage contraignait les différents candidats à obtenir les signatures d’au moins 1% des électeurs dans la moitié des régions de la Côte d’Ivoire, c’est à dire dans au moins 17 des 31 régions.  

Quant à l’ancien président Laurent Gbagbo (LG), actuellement en liberté conditionnelle en Belgique et dont la candidature a été déposée par la plateforme Ensemble pour la Démocratie et la Souveraineté (EDS) ainsi que l’ancien président de l’Assemblée Nationale, Guillaume Kigbafori Soro (GKS) du mouvement politique Générations et Peuples Solidaires (GPS), leurs dossiers de candidatures ont également été rejetés par le Conseil Constitutionnel en raison de leurs radiations de la liste électorale relative à leurs condamnations tous les deux à 20 ans de prison par la justice ivoirienne, respectivement pour le « braquage de la BCEAO » lors de la crise post-électorale de 2010-2011 et pour « recel de détournement de deniers publics et blanchiment de capitaux ». 

Par ailleurs, un argument supplémentaire – quoi que fort questionnable - a été avancé par le Conseil Constitutionnel pour justifier l’irrecevabilité de la candidature de l’ancien Président LG. En effet selon l’institution, LG en sa qualité d’ancien Président de la République est de facto membre du Conseil Constitutionnel et n’ayant pas renoncé à ses fonctions au sein de l’institution, il ne peut être candidat à l’élection présidentielle. Néanmoins ce qui interpelle davantage, c’est que l’article 132 de la Constitution de 2016 dispose « qu’aucun membre du Conseil constitutionnel ne peut, pendant la durée de son mandat, être poursuivi, arrêté, détenu ou jugé en matière criminelle ou correctionnelle qu’avec l’autorisation du Conseil, sauf les cas de flagrant délit ». Bien que le Conseil constitutionnel ne se soit pas prononcé, LG a bel et bien été condamné par la justice ivoirienne à 20 ans de prison. Cette décision à géométrie variable du Conseil Constitutionnel contribue à entacher significativement sa crédibilité aux yeux des partisans de l’opposition. 

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Concernant le cas de GKS, une nouvelle décision de la Cour Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples (CADH) en date du 15 septembre, « ordonnait » aux autorités ivoiriennes de « lever immédiatement tous les obstacles empêchant Guillaume Soro de jouir de ses droits d’élire et d’être élu, notamment lors de l’élection présidentielle d’octobre 2020 ». Pour rappel, dans un arrêt publié le 22 avril dernier, la CADH avait également ordonné à l’État ivoirien de « surseoir à l’exécution du mandat d’arrêt émis contre Guillaume Soro ». La réaction du gouvernement ivoirien ne s’était pas faite attendre : le 28 avril, il annonçait avoir décidé « de se retirer de la déclaration de compétence prévue au protocole relatif à la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples ». Dès lors, les autorités ivoiriennes ne se sentent pas concernées par les injonctions de la CADH. Il serait donc invraisemblable qu’elles mettent un terme aux poursuites à l’encontre de GKS. 

Néanmoins, galvanisé par cette nouvelle décision de la CADH, GKS a réaffirmé vouloir maintenir sa candidature tout en assurant qu’il n’y aura pas d’élection présidentielle le 31 octobre prochain. Pour ce dernier, une « unité d’action » des principaux acteurs de l’opposition est nécessaire afin de faire front à la nouvelle candidature de ADO. 

Loin de décrisper l’atmosphère à quelques semaines du scrutin présidentiel, la mise à l’écart d’acteurs majeurs de l’opposition ivoirienne et qui a été entérinée par le Conseil Constitutionnel est assez inquiétante et n’augure rien de positif pour la suite du processus électoral. Quand bien même le déroulement des processus électoraux en Côte d’Ivoire semble être un éternel recommencement, force est de constater que les acteurs qui rythment la vie politique ivoirienne depuis de longues années peinent encore aujourd’hui à capitaliser sur les expériences du passé afin d’aborder l’avenir avec davantage de sérénité. Pour rappel, lors du scrutin présidentiel de 2000, Tia Koné, président de la Cour Suprême au moment des faits, rejetait la déclaration de candidature des principaux adversaires politiques du Général Robert Guéï à savoir ADO et HKB. Seule celle de LG avait été jugée recevable. En septembre 2002, lors de la tentative de coup d’État contre LG, le Général Robert Guéï a été assassiné. 

A l’aune de ces derniers rebondissements, il convient de constater qu’à force d’être constamment personnifiées, les institutions de la République finissent par souffrir du manque de crédibilité de leurs cadres dirigeants. Le manque de consensus de la classe politique ivoirienne autour de la composition de la CEI et à présent la remise en question des décisions du Conseil Constitutionnel sont des indicateurs importants à considérer et qui laissent présager une contestation future des résultats des élections voir un boycott du scrutin présidentiel. Par ailleurs, la prorogation jusqu’au 30 septembre par les autorités ivoiriennes de la mesure de suspension des marches, sit-in et autres manifestations sur la voie publique et ce sur toute l’étendue du territoire national, contribuerait de facto à accroitre les tensions à l’approche d’une échéance électorale décisive pour l’avenir de la Côte d’Ivoire. 

Pour l’heure, et bien que tous les principaux voyants d’analyse de la situation socio-politique soient clairement au rouge, l’élection présidentielle devrait bel et bien se tenir le 31 octobre 2020. Il serait ainsi intéressant de faire un état des lieux des différentes forces en présence ainsi que d’analyser leurs éventuelles stratégies afin de (re) conquérir pour certains et conserver pour d’autres, le pouvoir d’État. 

Alassane Ouattara – Rassemblement des Houphouëtistes pour la Démocratie et la Paix (RHDP)

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Lors de son traditionnel adresse à la nation du jeudi 6 août à l’occasion du 60ème anniversaire de l’indépendance de la Côte d’Ivoire - 7 août, le Président ADO a annoncé sa candidature au prochain scrutin présidentiel prévu le 31 octobre 2020. Principal argument avancé justifiant cette décision : un cas de force majeur lié à la mort soudaine - le 8 juillet dernier - du candidat désigné par le parti au pouvoir le RHDP, le Premier Ministre Amadou Gon Coulibaly. Ce rétropédalage du président ivoirien ne relève en rien d’une véritable surprise, tant les appels de pied des cadres de son parti en faveur d’une nouvelle candidature se faisaient de plus en plus incessants.

Néanmoins, cette décision du président ivoirien a reçu un écho qu’on pourrait qualifier d’ambivalent. Les scènes de liesses des partisans du parti au pouvoir ont rapidement cédé la place à des séries de manifestations localisées dans plusieurs communes d’Abidjan notamment la commune de Yopougon (bastion électoral du FPI) et de Port Bouët ainsi que dans plusieurs villes du pays à l’instar de Bonoua, Divo ou encore Daoukro – village natal de l’ancien président et candidat à la présidentielle, HKB. Ces manifestations émaillées de violences ont causé la mort de plusieurs individus et ravivé des tensions communautaires comme ce fut le cas notamment à Divo. 

Investi par son parti le samedi 23 août au stade Félix Houphouët Boigny d’Abidjan, le Président ADO s’est ensuite envolé pour Paris afin de prendre part le vendredi 4 septembre à un déjeuner de travail avec le Président français Emmanuel Macron. A quelques semaines du scrutin présidentiel, cette visite du président ADO à son homologue français a été interprétée par l’opposition ivoirienne comme étant une tentative du parti au pouvoir de faire adouber le projet d’une nouvelle candidature du président ivoirien par les autorités françaises, de quoi alimenter le débat autour de l’influence dont jouirait encore la France au sein des processus électoraux de ses anciennes colonies. En effet, après avoir salué la « décision historique » du Président ADO de ne pas vouloir se présenter à la prochaine élection présidentielle, le rétropédalage de ce dernier n’a fait l’objet d’aucun commentaire de la part du locataire de l’Élysée. L’adage « qui ne dit mot consent » prenait ainsi tout son sens, en l’occurrence pour les acteurs de l’opposition ivoirienne, qui tenaient à ce que le Président Emmanuel Macron se prononce ouvertement sur le sujet. 

A la suite de ce déjeuner de travail, le Président ADO se réjouissait d’une « convergence de vues sur la situation économique et politique en Côte d’Ivoire, notamment l’élection présidentielle du 31 octobre 2020, dans un climat de paix ». Bien qu’aucune communication officielle n’ait fuité du côté de l’Élysée, il semblerait que le Président Français ait suggéré à son homologue ivoirien un report du scrutin afin d’ouvrir un dialogue avec ses deux principaux opposants LG et HKB devant aboutir au retrait de leurs candidatures respectives et ainsi opérer le changement générationnel initialement promis par ADO. 

Finalement, il semblerait que cette « convergence de vue » ne soit pas effective comme le mettent en exergue les visites d’États aux allures de pré-campagne qu’a initié le président ivoirien dans la région du Moronou (centre du pays) du 9 au 12 septembre. Pour rappel un communiqué du président de la CEI en date du 17 septembre 2020 fixe la période officielle de la campagne électorale du jeudi 15 octobre 2020 au jeudi 29 octobre 2020 à minuit. 

Dans la perspective du scrutin présidentiel du 31 octobre, le RHDP apparaît de plus en plus isolé et affaibli. La totalité des partis politiques qui composaient cette alliance ont grossit les rangs de l’opposition à tel point que le RHDP pourrait être directement assimilé au Rassemblement des Républicains (RDR), parti initial du président ADO. Néanmoins, cela n’empêche pas les cadres du parti à tabler sur une victoire de leur candidat dès le premier tour des élections avec près de 65% des voix. Selon la lecture du RHDP, ce résultat sera atteignable grâce à l’abstention des régions traditionnellement fidèles à l’ancien Président LG. Cependant, il est important de rappeler que la configuration des élections de 2020 diffère totalement des scrutins de 2015 et de 2010. En effet en 2015, ADO remportait les élections avec près de 83% des voix et ce d’une part grâce à l’alliance du RHDP et le fameux « Appel de Daoukro » qui invitait les cadres et sympathisants du PDCI à se rallier derrière l’unique candidature d’ADO et d’autre part grâce à l’abstention massive de la tendance du FPI qui est demeuré fidèle à LG et qui avait décidé de boycotter l’ensemble des scrutins. Bien que le FPI soit actuellement divisé, les différentes tendances du parti ont invité les partisans à s’inscrire massivement sur les listes électorales afin de pouvoir participer au vote. 

Par ailleurs d’un point de vue statistique, une victoire du candidat du RHDP dès le premier tour apparaît fort questionnable :

Présidentielle de 2010

Premier tour 

·       Inscrits : 5 784 490 personnes

·       Votants : 4 843 445 personnes soit 83, 73% de participation

·       Laurent Gbagbo : 1 756 504 soit 38,04% des voix

·       Alassane Ouattara : 1 481 091 soit 32,07% des voix

·       Henri Konan Bédié : 1 165 532 soit 25,24% des voix

·       Autres candidats : 4,65% des voix

Second tour

·       Inscrits : 5 784 490 personnes

·       Votants : 4 689 321 personnes soit 81,12% de participation

·       Alassane Ouattara : 2 483 164 soit 54,10% des voix

·       Laurent Gbagbo : 2 107 055 soit 45,90% des voix

La première conclusion fait état d’un report de voix des autres candidats ayant soutenu la candidature d’ADO (en majorité ceux du PDCI-RDA) de l’ordre de 1 002 073 de voix.

Présidentielle de 2015

·       Inscrits : 6 301 189 personnes

·       Votants : 3 301 189 personnes soit 52,86% de participation

·       Alassane Ouattara : 2 618 229 soit 83,66% des voix

·       Pascal Affi N’Guessan : 290 780 soit 9,29% des voix

·       Autres candidats : 7,05% des voix

Entre le second tour des élections de 2010 et l’élection de 2015, ADO a pu bénéficier uniquement de 135 065 voix supplémentaires. 

Pour remporter l’élection présidentielle de 2020 dès le premier tour, ADO va devoir recueillir à lui tout seul et ce sans l’appui des autres partis qui composaient l’alliance au cours des scrutins précédents, environ 4 000 000 de voix ce qui paraît invraisemblable vue la recomposition du paysage politique ivoirien qui s’est effectuée. Pour rappel la nouvelle liste électorale, bien que provisoire, comporte près de 7 500 000 potentiels électeurs, soit une hausse de plus de 900 000 nouveaux électeurs comparés à celle de 2018. 

Enfin, afin de séduire à nouveau l’électorat ivoirien, le RHDP - à l’instar des autres partis politiques engagés dans la compétition électorale – devrait être en mesure de divulguer son programme de gouvernance et ainsi proposer le nouveau contrat social qu’il souhaite nouer avec les populations ivoiriennes. Pour l’heure, force est de constater que les louanges des réalisations des deux derniers quinquennats prennent largement le pas sur les projets de gouvernance pour le futur, censés adresser des solutions concrètent et pérennes aux maux qui continuent de gangréner la société ivoirienne. 

Henri Konan Bédié – Parti Démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI-RDA)

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C’est sur la place Jean Paul II de la capitale politique de la Côte d’Ivoire, Yamoussoukro, qu’HKB a été investit candidat du PDCI-RDA le samedi 12 septembre dernier. Bien qu’ayant affirmé que l’élection de 2010 était son dernier combat politique, HKB, du haut de ses 86 ans, figure bel et bien sur la liste définitive des candidats à l’élection présidentielle du 31 octobre 2020. Pour rappel, sa candidature a été possible à la suite de la levée du verrou de la limite d’âge lors du vote en faveur de la nouvelle constitution en novembre 2016.

Néanmoins, quelques interrogations demeurent quant à la candidature de l’ancien président. Agé de 86 ans, HKB ne jouit clairement plus des mêmes capacités physiques qui étaient les siennes des années auparavant et qui lui permettaient de mener ses différents combats politiques. Sa capacité à pouvoir tenir des meetings de campagne successifs est tout à fait questionnable. Par ailleurs, dans un pays ou l’âge médian s’établit à environ 20 ans, le candidat HKB apparaît de prime abord comme étant le moins apte à parler le « langage des jeunes ». Au sein des rangs du parti, la stratégie qui se dessine est de mettre davantage en avant la jeunesse de l’équipe (Jean Louis Billon, Thierry Tanoh etc…) qui porte la candidature de HKB et qui serait plus enclin à séduire les jeunes qui composent l’électorat ivoirien.

Néanmoins le principal défi que devra relever le candidat HKB, serait de réussir à se positionner comme étant le véritable chef de file de l’opposition et ainsi fédérer tous les mouvements d’opposition autour de sa candidature dans le cadre d’un hypothétique second tour face au candidat de la majorité présidentielle. Un « accord cadre » a été signé avec la branche du FPI restée fidèle à l’ancien Président LG et qui est dirigée par un de ses proches collaborateurs Assoa Adou. Des pourparlers ont également été engagés avec d’autres acteurs de l’opposition à l’instar de GKS ou encore d’Albert Mabri Toikeusse, ce qui n’a pas empêché ce dernier à mettre sur pied le 11 septembre dernier, une plateforme rassemblant des organisations politiques, des acteurs de la société civile, des syndicats et des leaders d’opinion afin de soutenir et porter sa candidature à l’élection présidentielle.

Faisant de l’anticonstitutionnalité de la candidature de ADO son principal cheval de bataille, l’opposition ivoirienne y compris le PDCI-RDA n’a pu se démarquer en investissant le champ des débats d’idées et en accordant une place de choix aux programmes de gouvernance. Conscient de ce retard accumulé, le candidat HKB a décliné les grandes lignes de son programme de société lors de sa cérémonie d’investiture et qui se déclinent en quatre grands volets :

1.     L’Etat de droit, la démocratie apaisée et participative

2.     La citoyenneté, le civisme, l’éducation, la formation et le bien-être pour tous

3.     Les grands travaux et l’aménagement du territoire national

4.     Le développement économique et social durable

Ainsi, afin de pouvoir espérer reconquérir le pouvoir d’Etat, HKB dont le nouveau combat politique était jugé par ses adversaires comme émanant d’un sentiment de revanche d’une part à la suite du coup d’Etat contre son régime en décembre 1999 et d’autre part d’un sentiment de fierté lié à la fin de l’alliance avec ADO - qui lui aurait promis une alternance en sa faveur pour le scrutin du 31 octobre 2020 - devrait réussir à fédérer tous les mouvements d’opposition autour de sa candidature et de son projet de société afin de parler d’une seule voix et d’incarner une alternative crédible au candidat du parti au pouvoir.

Pascal Affi N’guessan – Front Populaire Ivoirien (FPI)

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Initialement prévue pour le vendredi 19 septembre, l’investiture du candidat de la branche légale du FPI a été reportée au 26 septembre prochain. Pour rappel, une rencontre entre ce dernier et l’ancien Président LG à Bruxelles, les 3 et 4 janvier 2020, était censée conduire à l’organisation d’un congrès unitaire du parti et mettre fin aux antagonismes entre la tendance des «rénovateurs » d’une part, dirigée par PAN et la tendance «GOR » (Gbagbo ou Rien) demeurée fidèle à l’ancien Président et dirigée par Assoa Adou. Cependant, la signature d’un accord cadre entre la tendance «GOR » et le PDCI-RDA de HKB sans avoir consulté la tendance des « rénovateurs » du parti a mis un terme à tout projet de réconciliation au sein du parti. 

PAN intègre ainsi la compétition électorale avec l’appui d’un parti divisé. Lors du scrutin présidentiel de 2015,ce dernier avait recuillit que 9,29% des suffrages et n’avait pu mobiliser les voix des partisans de l’ancien Président LG qui avaient décidé de boycotter toute élection en l’absence de leur leader. Dans la perspective des élections du 31 octobre 2020, l’enjeu demeure le même pour PAN d’autant plus que le mot d’ordre lancé par la tendance « GOR » à ses partisans est de s’inscrire massivement sur la liste électorale afin de participer au vote. 

Afin de séduire la base militante pro-gbagbo, PAN pourrait s’appuyer sur l’ex première dame Simone Gbagbo, membre fondateur du parti, mais dont la voix est constamment muselée au travers de directives données par LG qui tente de s’en détacher. N’ayant pu conclure pour l’heure aucune alliance électorale, tout l’enjeu pour PAN est de pouvoir séduire cet électorat « GOR » déçu du traitement réservé à l’ex première dame. 

Kouadio Konan Bertin – Indépendant 

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La relation entre KKB et sa chapelle politique initiale qu’est le PDCI-RDA est du moins que l’on puisse dire quelque peu volatile. En effet, au cours du scrutin présidentiel de 2015, KKB – ancien président des jeunes du PDCI-RDA -s’était dissocié de la ligne de conduite du parti qui allait dans le sens du soutien à la candidature de ADO et qui s’était matérialisé en 2014 par « l’Appel de Daoukro » du Président HKB. KKB protestait contre le fait que le plus vieux parti de Côte d’Ivoire ne présente aucun candidat à une élection présidentielle. C’est dans cette optique qu’il s’était présenté en tant qu’indépendant et avait recueilli que 3,88% des voix. 

En 2018, après la rupture de l’alliance entre HKB et ADO, KKB va renouer contact avec son mentor et être nommé par la suite au poste de conseiller. La normalisation des relations entre les deux hommes politiques ne sera que d’une courte durée. En effet, après avoir affirmé soutenir une éventuelle candidature du Président HKB à l’élection présidentielle d’octobre 2020, KKB s’était rétracté et avait décidé de se porter candidat contre son mentor HKB, à la candidature du PDCI-RDA dans la perspective des élections d’octobre 2020. Sa candidature a pourtant été rejeté car ce dernier ne remplissait pas tous les critères d’admissibilité notamment la présence au Bureau Politique du parti depuis 10 ans, expérience que seul le Président HKB détient au sein du parti. 

Dans l’incapacité de pouvoir compétir sous la bannière de son parti traditionnel, KKB s’est ainsi présenté en tant qu’indépendant au scrutin présidentiel du 31 octobre 2020. Etant à nouveau en désaccord avec HKB, il serait intéressant d’observer un éventuel rapprochement entre KKB et le candidat du parti au pouvoir ADO en quête d’alliance électorale. La concrétisation de cette éventuelle alliance contrasterait drastiquement avec la position adopté par KKB 5 ans auparavant. Ne dit-on pas que la politique est la saine appréciation des réalités du moment ? 

Unité d’action & désobéissance civile : vers un report des élections du 31 octobre ?

Au cours d’une conférence de presse tenue à Paris le 17 septembre, GKS lançait un appel aux acteurs de l’opposition ivoirienne afin de convenir d’une « unité d’action » pour faire barrage à une nouvelle candidature du Président ADO. Cet appel lancé depuis Paris par GKS a bien été entendu aux abords de la lagune ébrié. En effet, le 20 septembre, plusieurs partis et groupements politiques (CDRP, EDS, GPS, URD, LIDER, UDPCI) se sont associés au PDCI-RDA afin d’exiger un certain nombre de requêtes au préalable jugées indispensables à la tenue du scrutin présidentiel du 31 octobre 2020. Les principales exigences sont les suivantes :

1.     Le retrait de la candidature d’ADO

2.     La dissolution du Conseil Constitutionnel

3.     La dissolution de la CEI

4.     L’audit de la liste électorale 

5.     La libération de tous les prisonniers politiques 

6.     Le retour des exilés avec à leur tête le Président LG

A cette série d’exigences a été couplé un appel à la « désobéissance civile ». Des manifestations se sont ainsi tenues le 21 septembre dans la région du Tonkpi (l'Ouest du pays), plus précisément dans les localités de Danané et de Zouhan Hounien, fief électoral d'Albert Mabri Toikeusse. L’objectif de l’opposition est clair : faire pression sur le pouvoir en place afin d’obtenir un report du scrutin présidentiel. En effet, avant cette déclaration, la posture des principaux acteurs de l’opposition était quelque peu ambiguë. Ces derniers ne pouvaient continuer à prendre part au processus électoral tout en jugeant anticonstitutionnelle la candidature de ADO. Se préparer à battre campagne contre un candidat dont on remet en cause l’éligibilité reviendrait finalement à cautionner de manière implicite sa candidature.

C’est dans cette optique que le PDCI-RDA ainsi que le FPI ont refusé de prendre part à l’élection des représentants des commissions électorales locales qui a débuté le 15 septembre dernier. Bien que le PDCI-RDA ait finalement désigné le 1er août dernier le représentant du parti – Siaka Bamba - au sein de la CEI, ce dernier n’a pas répondu présent à la cérémonie de prestation de serment au Conseil Constitutionnel le 17 septembre. Il s’agit ainsi d’une manœuvre politique du Sphinx de Daoukro qui vise à retarder le processus électoral et mettre la pression sur les autorités afin d’obtenir un report du scrutin. 

L’absence d’un acteur s’est tout de même faite remarquer lors de ce rassemblement de l’opposition : il s’agit de celle d’Affi N’guessan, candidat du FPI et qui n’a pas été convié à la réunion par HKB. Une rencontre est prévue entre les deux acteurs dans les prochains jours. Comme susmentionné, HKB afin de se positionner comme le chef de file de l’opposition devrait être apte à fédérer autour de sa candidature tous les acteurs de l’opposition, y compris Affi N’Guessan. Sans inclusion, cette unité d’action voulue par l’opposition ne pourrait être effective. 

 


Anne Campagna

Collaboratrice de l'Agence Québec Presse

4 ans

excellent!

Chrysostome Nkoumbi-Samba, M.B.A 🟢 Officiel

Président chez AFRIK@CYBERSECURITE / Comité Scientifique CYBERAFRIKTOUR2063

4 ans

#risqueafricain #risques

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