Procédures collectives pour une structure esportive : quelles conséquences ?

Procédures collectives pour une structure esportive : quelles conséquences ?

Tout d’abord, il est important de rappeler que l'industrie de l'esport est relativement nouvelle et en constante évolution.

 

Bien que l'esport soit en pleine expansion depuis plusieurs années, l’écosystème économique et juridique nécessaire pour soutenir l'industrie n'est pas encore complètement en place. Cela peut conduire à des difficultés économiques et financières pour les entreprises qui opèrent dans ce domaine.

 

Dans un premier temps, nous vous proposons d’aborder les difficultés économiques classiques en droit français et les procédures collectives existantes pour faire face à ces difficultés (1/).

 

Dans un second temps, il sera intéressant d’examiner les difficultés spécifiques aux entreprises de l'esport (2/).

 

1/        REPONSE DU DROIT COMMUN AUX DIFFICULTES ECONOMIQUES RENCONTREES

 

En France, les entreprises en difficulté peuvent, sous certaines conditions, bénéficier de procédures dites collectives, qui ont pour objectif principal de les aider à surmonter leurs difficultés, de permettre à l'entreprise en difficulté de retrouver une situation financière saine, et de leur éviter la dissolution de l’entreprise. Elles sont soumises à des conditions strictes et leur mise en place doit être effectuée par un juge.

 

En ce sens, différentes procédures collectives sont prévues par le droit français :

 

1/A.   LA PROCEDURE DE SAUVEGARDE

 

La procédure de sauvegarde permet de suspendre le paiement des dettes de l'entreprise pendant une période maximale de 18 mois, afin de lui permettre de se réorganiser et de trouver des solutions pour redresser sa situation.

 

Elle est régie par les articles L620-1 et suivants du Code de commerce, mais de nombreuses dispositions prévues dans les articles relatifs à la sauvegarde tendent à s’appliquer également pour les deux autres formes de procédures collectives (redressement judiciaire et liquidation judiciaire).

 

Pour bénéficier de cette procédure, l’entreprise ne doit pas être en cessation des paiements et doit justifier de difficultés financières qu’elle n’est pas en mesure de surmonter seule.

 

Le tribunal compétent sera, en fonction de la situation du débiteur, soit le Tribunal judiciaire (activité libérale), soit le Tribunal de commerce (activité commerciale ou artisanale).

 

Il est à noter que la procédure de sauvegarde commence par une période d'observation, permettant au juge de dresser un bilan économique et social de l'entreprise, mais aussi d'étudier ses possibilités de rétablissement. Durant tout le temps de la sauvegarde, l'entreprise continue son activité, même si le tribunal peut, à tout moment, ordonner la cessation partielle de l'activité.

 

1/B.   LA PROCEDURE DE REDRESSEMENT JUDICIAIRE

 

La procédure de redressement judiciaire vise à permettre la poursuite de l'activité de l'entreprise tout en assurant le règlement de ses dettes. Elle est prévue par les articles L631-1 du Code de commerce et suivants.

 

Pour bénéficier de ce type de procédure, l’entreprise doit être en état de cessation des paiements. La procédure sera alors ouverte par le tribunal compétent (en fonction de l’activité du débiteur) et devra permettre la poursuite de l’activité de l’entreprise, le maintien de l’emploi et l’apurement du passif.

 

Le débiteur, en état de cessation des paiements, doit demander l’ouverture de la procédure de redressement judiciaire dans un délai de 45 jours après l’état de cessation des paiements de son entreprise. A défaut, il pourra se voir sanctionner par une interdiction de gérer ou à combler le passif de l’entreprise pour faute de gestion.

 

La procédure peut également être demandée par tout créancier y ayant intérêt ou par le Ministère public.

 

A la suite de l’ouverture d’une telle procédure, une période d’observation sera ouverte par le jugement, afin de réaliser un diagnostic de l’entreprise et préparer un plan de redressement. Durant la procédure, le dirigeant restera dirigeant, sa rémunération étant maintenue, même si l’administrateur judiciaire pourra demander au tribunal de la modifier.

 

Cette procédure peut aboutir à la cession de l'entreprise ou à sa liquidation. Elle peut prendre fin également lors de l’adoption d’un plan de redressement judiciaire, permettant la poursuite de l’activité de l’entreprise. Ce plan précisera différents éléments, tels que les modalités de règlement des dettes, les mesures pour restructurer l’entreprise (éventuellement des licenciements économiques, etc.), les modifications inhérentes à l’entreprise (modification de l’objet social de la société, etc.), mais aussi l’échelonnement du paiement des dettes.

 

1/C.   LA PROCEDURE DE LIQUIDATION JUDICIAIRE

 

La procédure de liquidation judiciaire met fin à l'activité de l'entreprise et permet la vente de ses actifs pour rembourser ses dettes. Ce sont les articles L640-1 et suivants du Code de commerce qui l’encadrent.

 

Cette procédure est la plus préoccupante pour une entreprise car elle concerne celles en état de cessation des paiements et dont le rétablissement est manifestement impossible. Autrement dit, la procédure tend à mettre fin à l’activité de l’entreprise : les biens de celle-ci seront vendus afin de permettre le paiement d’un maximum de créanciers.

 

La liquidation judiciaire peut être demandée par le Procureur de la République ou par l’un des créanciers de l’entreprise.

 

Le tribunal compétent (selon les règles de l’activité exercée par le débiteur) prononcera un jugement d’ouverture et désignera un juge-commissaire et un liquidateur judiciaire. La liquidation judiciaire aura pour conséquence immédiate la cessation de l’activité de l’entreprise et le dessaisissement des fonctions du dirigeant (la gestion de l’entreprise sera alors confiée au liquidateur judiciaire).

 

Il est important de noter que, dans certains cas, il peut être autorisé le maintien de l’activité, pour une durée maximale de 6 mois si :

-      La cession totale ou partielle de l'entreprise est envisageable ; ou

-      L'intérêt public ou celui des créanciers l'exige.

 

Il existe plusieurs effets au jugement prononçant la liquidation judiciaire, les plus importants étant notamment : la rupture des contrats de travail, l’arrêt des poursuites contre l’entreprise, et le règlement des créanciers avec les ressources de l’entreprise qui sont exigibles.

 

Dans la plupart des cas, la fin de la liquidation judiciaire sera prononcée lorsque l’entreprise n’a plus assez d’actifs pour rembourser son passif (les créanciers ne seront alors pas tous payés).

 

 

Ces différentes procédures collectives sont applicables pour toute entreprise, même celles agissant dans le secteur de l’esport qui feraient face à des difficultés (2/).

 

 

2/       DIFFICULTES SPECIFIQUES A l’ESPORT

 

L'esport est une industrie en plein essor.

 

Néanmoins, ce secteur peut également rencontrer des difficultés économiques et financières particulières, en raison des multiples facteurs tels que mis en exergue dans les deux articles (le premier de Team aAa, le second du magazine L’Equipe), dont les liens se trouvent ci-après, qui peuvent expliquer les défaillances d’une structure esportive, notamment :

 

-            La concurrence : l'esport est un marché très concurrentiel, avec de nombreuses entreprises qui cherchent à attirer les joueurs et les sponsors. Les entreprises doivent donc faire preuve d'innovation et de créativité pour se démarquer de leurs concurrents.

 

-            L'instabilité du marché : l'esport est un marché en constante évolution, avec de nouveaux jeux et de nouveaux joueurs qui apparaissent régulièrement. Les entreprises doivent donc s'adapter rapidement aux changements de tendances pour rester compétitives.

 

-            La dépendance aux sponsors : les entreprises d'esport sont souvent très dépendantes des sponsors pour leur financement. En cas de rupture de contrat ou de changement d'orientation stratégique du sponsor, l'entreprise peut alors se retrouver en difficulté financière.

 

-            Les coûts de développement : les jeux vidéo utilisés pour les compétitions d'esport sont souvent coûteux à développer et à maintenir. Les entreprises doivent donc investir des sommes importantes pour s'assurer que leur jeu est compétitif et attractif pour les joueurs.

 

-            La volatilité des investisseurs : l’esport étant en pleine expansion, de nombreux investisseurs sont intéressés pour amener de l’argent frais dans les structures. Cependant, il peut arriver que ces investisseurs, n’ayant pas de retour sur investissement rapidement, décident d’arrêter d’investir, ce qui complique alors la situation de la structure.

 

A titre d’exemple, dans la situation présentée par le journal L’Equipe, il est intéressant de relever que l’ouverture de la procédure de liquidation judiciaire de la structure, a été précédée d’actions prud’homales, concernant des retards de paiement dans le cadre de l’exécution de contrats de travail à durée indéterminée de deux membres du staff, qui ont exposé les difficultés financières de la structure.

 

Compte tenu de tout ce qui précède, dans un secteur en plein essor, nous ne pouvons exclure le risque que certaines entreprises rencontrent des difficultés économiques et financières qui entraineraient l’ouverture d’une procédure collective.

 

Dès lors, nous invitons les entreprises spécialisées dans ce secteur à faire preuve d'adaptabilité et à s’attacher les services d’un conseil juridique pour surmonter ces difficultés et rester compétitives.

 

Pour aller plus loin :

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