Profiter d’un arrêt de travail pour maladie pour assister à une réunion politique médiatisée justifie un blâme
Par Lucy Bateman, le 16/10/2020 - Lire la dépêche en ligne
La cour administrative d’appel de Versailles confirme le 8 octobre 2020 le blâme infligé à un fonctionnaire d’une mairie de l’Essonne qui s’était rendu à une réunion politique très médiatisée en Moselle, où il avait été filmé, alors qu’il bénéficiait d’un arrêt de travail pour la journée qu’il avait justifié en invoquant de graves inquiétudes pour sa santé. L’agent, alors directeur de l’école d’art de la ville, a "commis une faute de nature à justifier légalement la sanction disciplinaire de blâme qui lui a été infligée", estime la CAA.
Un fonctionnaire qui a obtenu un arrêt de travail pour maladie d’une journée en invoquant de graves inquiétudes pour sa santé ne peut profiter de ce congé pour se rendre à une réunion politique publique et médiatisée, où il sera de surcroît filmé et photographié derrière l’homme politique en visite dans une usine. C’est ce que juge la cour administrative d’appel de Versailles dans un arrêt du 8 octobre 2020.
Dans cette affaire, un fonctionnaire territorial qui dirige l’École des Arts de la ville de Marcoussis (Essonne), conteste le blâme qui lui a été infligé par le maire. Il lui est reproché, alors qu’il se trouvait en arrêt de travail pour maladie le 12 octobre 2016, d’avoir assisté à une manifestation publique organisée en Moselle à 300 km de là. Il s’agissait de la visite très médiatisée de l’usine British Steel d’Hayange par un homme politique, suivie d’une réunion publique à Pont-à-Mousson. Sa présence lors de cet évènement montre qu’il ne se trouvait manifestement pas dans l’impossibilité d’exercer ses fonctions, estime le maire. Il lui est également fait grief d’avoir fait preuve d’une attitude contraire aux obligations des agents publics, notamment ceux de dignité, intégrité et probité.
Heures de sortie autorisées
Dans un premier temps, le tribunal administratif lui donne raison et annule le blâme. Le tribunal observe que l’agent a sa résidence principale en Moselle, et qu’il s’est rendu sur les lieux de la visite politique pendant les heures de sortie autorisées par son arrêt de travail. Les juges relèvent en outre que la commune, qui "n’a pas fait procéder à une contre-expertise médicale, n’est pas fondée à soutenir que l’intéressé n’était pas dans l’impossibilité d’exercer ses fonctions ni d’ailleurs, à remettre en question les termes de l’avis médical".
La cour administrative d’appel de Versailles, saisie par la ville de Marcoussis, censure ce raisonnement et approuve le blâme. Les juges d’appel constatent que l’agent "a fait valoir que dans la soirée du 11 octobre 2016, il ne se sentait pas apte à la poursuite de son activité professionnelle du lendemain". Il a "consulté un médecin à Marcoussis à 19h00 afin de pouvoir, muni d’un arrêt de travail d’une journée, rentrer le lendemain 12 octobre 2016 à son domicile de Bousse, en Moselle, où il avait sa réserve de médicaments". Il devait "surtout, consulter son médecin de référence".
Filmé derrière l’homme politique
Ainsi, le fonctionnaire "était à ce point inquiet de son état de santé qu’il estimait urgent de consulter son médecin de référence le 12 octobre 2016, sans attendre ses congés débutant le 13 octobre 2016". La cour d’appel relève cependant que l’agent n’apporte "aucun élément probant relatif au traitement médical dont il se prévaut", et "n’établit pas, ni même n’allègue, qu’il aurait effectivement consulté son médecin de référence ce 12 octobre 2016, alors même qu’il s’agissait, ainsi qu’il vient d’être dit, de l’objectif prioritaire de sa journée".
Au contraire, constate la cour d’appel, "ce 12 octobre 2016", il a "mis à profit son temps libre pour se rendre" à "deux réunions publiques à caractère politique". Il a même fait "état, auprès de son employeur, de sa présence à ces évènements publics pendant cette journée d’arrêt de travail". Les juges d’appel ajoutent que sa présence "a été médiatisée", l’agent "ayant été filmé à ces deux occasions car il se tenait devant les caméras, juste derrière" l’homme politique. Il "est même apparu coiffé d’un casque de chantier comme celui-ci lorsqu’il l’accompagnait au cours de la visite de l’usine British Steel d’Hayange".
Dans ces conditions, "l’intéressé a commis une faute de nature à justifier légalement la sanction disciplinaire de blâme qui lui a été infligée", conclut la cour d’appel.
Cour administrative d’appel de Versailles, 8 octobre 2020, n° 19VE02175
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