Projet de voiture électrique ou de fin de la voiture individuelle ?

Projet de voiture électrique ou de fin de la voiture individuelle ?

Car ceci est leur projet…

Parfois un projet informatique, ou organisationnel, est porté par des décideurs avec un objectif qui peut paraître fédérateur.

Ensuite, les moyens alloués à certaines fins qui permettaient l’adhésion de certaines personnes impliquées, car plus fortement impactées, ne sont pas libérés par les décideurs...

Au final, le projet peut atteindre l'objectif, initialement caché, des décideurs, et par contre décevoir les nombreuses personnes qui, au final, perdent plus qu’ils ne gagnent, contrairement à ce qui leur a été « vendu », et qui, comme le petit Gibus, pourraient entonner : « si j'aurais su, j'aurais pas venu ».

Ci-dessous, dans cette perspective, une réflexion avec un regard de chef de projet sur le projet de fin programmée de véhicules thermiques en Europe, et le résultat final en fin de projet, à savoir la disparition, pour nombre de consommateurs, de voiture individuelle.

Cadre juridique de disparition des voitures thermiques : l’objectif déclaré du projet

En juillet 2021, la Commission européenne fixait un cap majeur, à haut impact négatif sur l’économie européenne, dont l’industrie automobile à moteur thermique constitue pourtant un fer de lance, à savoir la fin de la vente de véhicules thermiques (essence, diesel ou gaz) en 2035 : « toutes les voitures neuves immatriculées à partir de 2035 seront des véhicules à émissions nulles », donc électriques.

Le 27 octobre 2022, cet objectif a été confirmé via un accord européen, qui, comme l’exprime le vice-président de la Commission européenne chargé du « Pacte vert » de l’UE, Frans Timmermans, « envoie un signal fort à l’industrie et aux consommateurs: l’Europe prend le virage de la mobilité sans émissions ».

Le fournisseur qui va livrer la solution, en l’occurrence des voitures électriques : européen ?

Est-ce que la production européenne sortirait gagnante si un cahier des charges de fourniture de véhicules électriques était confié aux prestataires du marché selon leurs capacités ?

Pour le moment, il est permis d’en douter : le marché semble dominé par les géants asiatiques, en particulier la Chine, qui a acquis de l’expertise dans la production de batteries électriques, et, surtout, est dans un fauteuil pour ce qui a trait à l’accès aux ressources, à savoir les terres rares.

A moins d’une innovation majeure qui permettrait, via processus de « scaling up » extrêmement court, aux acteurs européens, qui, de plus, devraient s’associer, de produire à une énorme échelle industrielle à la dimension de l’Union Européenne, les parts du marché « Europa First » risquent d’être minoritaires.

Le coût du produit pour les consommateurs : le frein des batteries

Alors qu’un véhicule thermique est encore accessible pour un couple de consommateurs disposant du salaire moyen en Wallonie, il en est différemment pour un véhicule électrique.

En effet, le moteur s’avère, certes, plus économe à fabriquer, avec moins de pièces mobiles ; de même que l’absence d’échappement. Le principal coût de production supplémentaire par rapport aux voitures thermiques s’avère la batterie : de l’ordre d’un quart à un tiers, oscillant, actuellement, entre environ 3.500 à plus de 35.000 euros, selon les modèles.

Voici qui réduirait le périmètre du nombre d’usagers. Toutefois ce n’est pas le principal frein à l'usage par le consommateur moyen.

Les moyens rabotés pour le projet : par le manque de bornes de chargement électrique

Ce qui est condition nécessaire à une automobile pour être automobile, c’est sa source d’énergie embarquée, à savoir une batterie… chargée !

Or, le réseau de bornes de chargement est insuffisant, et, sans investissement massif sur l’ensemble du réseau routier européen, à savoir pas uniquement dans les métropoles, tout un chacun ne pourra charger, sans file interminable de plusieurs dizaines de minutes, voire plusieurs heures.

Voire pas du tout en l’absence de borne en campagne « oubliée » (aka peu rentable et donc volontairement oubliée).

Pour l'instant, le « sponsor » du projet n’émet aucun plan d’investissement pour ce moyen indispensable à l’atteinte de l’objectif du projet.

Enfin... si la vision de ce projet est comprise comme « tout consommateur actuel d’un véhicule thermique roulera avec un véhicule électrique ».

Mais peut-être que le réel objectif de projet n’est justement pas cela…

Les moyens rabotés pour le projet : par la volonté politique de diminution de consommation électrique

Pour que les bornes, qui doivent encore être installées, puisse remplir leur rôle, encore faut-il qu’elles soient suffisamment approvisionnées en électricité.

Et là, sans surprise pour personne depuis une année de crise énergétique, où le prix de l’électricité a flambé, et où des moments de non-alimentation « black out » ont été envisagés, il faut pour cela disposer d’unités de production en suffisance.

En Wallonie, avec la décision politique de moins recourir à l’énergie nucléaire, il n’est pas garanti, à ce stade, de disposer de suffisamment de capacité pour répondre à cette demande.

De plus, avec l’usage de centrale à gaz, l’objectif de diminution d’émission de gaz carbonique ne serait pas atteint : il faudrait des sources pilotables en suffisance, ce qui, si le nucléaire est exclu, rend le projet directement irréalisable en 20 à 30 ans.

Mais peut-être que le projet est autre…

Le projet pourrait donc ainsi être une diminution nette des émissions de gaz carbonique via l’emploi de voitures à « zéro émission » (il faut toutefois prendre en compte la production des batteries, leur recyclage, et surtout la production électrique, donc sans gaz ni charbon…)… en réduisant le nombre de voitures !

Conclusion : disparition de voitures individuelles pour les consommateurs lambda

Certains responsables politiques ont l’honnêteté d’exposer cette vision, qui pourrait donc être la bonne interprétation de l’objectif réel du projet, à savoir la disparition de voitures individuelles pour les consommateurs lambda.

Ainsi, je cite le Ministre wallon de la mobilité, qui déclarait dans la presse ce 28 janvier : « Au niveau wallon, nous soutenons le développement de la venue des véhicules électriques, avec notamment l’installation de bornes sur le territoire et le développement du transfert modal vers le transport en commun. Mais il ne va pas suffire de remplacer les véhicules thermiques par des véhicules électriques parce que ça reste encore une très grosse consommation d’énergie. Si on doit atteindre 100 % d’énergies renouvelables d’ici 2030, on devra diminuer notre consommation, et donc réduire la part de la voiture individuelle. »

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