Psyché & Déclic : Mensonge & Vérité
Dan comme il se fait appeler, alors que ses parents le nomment Dany et qu'il est Daniel pour l'état civil, parade devant un auditoire conquis par sa faconde et son jeu de scène, car il est en représentation permanente. Constamment à l'affut de ce qui peut, de près ou de loin, servir son récit, il réécrit constamment l'histoire, son histoire et l'histoire de son histoire.
Certains l'ont qualifié d'hystérique, car il se donne sans cesse à voir et cherche constamment à se faire entendre. Un diagnostic à l'emporte-pièce, qui a pour avantage de stigmatiser et d'humilier, sans vraiment chercher à comprendre. Comprendre Daniel et comprendre ce que dit Daniel. Comprendre en contextualisant le texte qu'il déclame.
Depuis l'enfance, Daniel est seul au monde. Des parents trop occupés par leurs promotions professionnelle et sociale respectives, pas de fratrie car l'enfant unique c'est bien pratique, des besoins matériels comblés au delà de toute espérance au point de rechercher le manque pour se sentir un peu exister, il a grandi dans un décors de cinéma hors du monde réel et de la vraie vie.
Ce qui eut pour effet désastreux, de fonder sa personne et de structurer sa personnalité, sur des bases totalement factices. Ceci bien sûr à son insu, car étant lui-même un fake, il ne peut exister que dans le mensonge qui de fait devient immédiatement pour lui vérité. C'est bien en cela que réside le drame de la mythomanie, le sujet étant alors la première victime de son mensonge.
Chose totalement impensable et incompréhensible pour ceux du dehors, car ne mesurant pas l'immensité du vide intérieur ressenti par Daniel. Vide duquel il se protège, par un habile tissu de mensonges, sorte de garde-fou le préservant de la chute accidentelle dans son propre néant. Daniel n'est pas hystérique, car il ne joue pas à se faire peur, mais il a peur, très peur.
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C'est justement pour cela qu'il s'invente une vie aux multiples facettes, un quotidien extraordinaire, un parcours aux incessants rebondissements car il doit absolument jeter des ponts au dessus de sa propre vacuité, cette dernière constituant pour lui une menace permanente. Mais il n'est pas " Jakob le menteur" et son existence n'a rien de comparable à "Train de vie".
Le réel c'est quand on se cogne disait Lacan, or là Daniel s'est méchamment cogné. Manifestations visibles et hideuses du réel, tel un équipage de vénerie les huissiers le poursuivent. C'est à bout de forces, comme un animal forcé par les chiens, qu'il avait décidé de supprimer femme et enfants avant de se suicider. Mais après avoir accompli la première partie de son plan, il s'est ravisé.
Arrêté à l'issue du longue cavale, confronté aux faits qu'il s'obstine à nier, Daniel est en attente d'expertise psychiatrique et de jugement, mais il n'en pérore pas moins pour si peu, car la médecine et le justice il en fait son affaire, lui qui a étudié l'une à Boston et l'autre à Paris...
Avertissement : L'unique ambition de cette série #psychéetdéclic est de contribuer à la réflexion collective sur le sens du soin en psychiatrie. Construites sur le modèle des chroniques de Baptiste Beaulieu, ces vignettes cliniques synthétisent plusieurs situations pour en restituer une version romancée. Ainsi aucune des personnes présentées ici, dans des contextes au demeurant plausibles et réalistes, n'existe ou n'a réellement existé en tant que telle.