Quel Manager êtes-vous? Le Management Situationnel
Le management des Hommes : un sujet riche, passionnant mais souvent compliqué.
Les expériences managériales sont de celles qui ont le plus marqué ma carrière : comme source de tension (parfois), comme source de remise en question (souvent), comme source de satisfaction (aussi). Voir un collaborateur grandir, s’épanouir, prendre confiance, monter en compétence, prendre votre place quand vous partez : quelle reconnaissance du travail accompli !
J’ai commencé à bosser au début des années 2000, à un moment où le management des collaborateurs était encore relativement peu enseigné dans les formations post-bac. Ce point évolue et c’est tant mieux ! Mais des générations de « managers » se sont retrouvés lancées sur le terrain sans connaissance du sujet.
Beaucoup de salariés se retrouvent propulsés à des rôles de managers parce qu’ils ont démontré de belles aptitudes techniques sur leur poste. C’est une reconnaissance de leurs compétences mais encore faut-il les accompagner dans cette transition de la posture de « technicien » à la posture de « manager ».
Le management n’est pas qu’une question « feeling ». Il nécessite une boite à outil, des techniques pour donner de la légitimité et de l’assurance au manager. Avec cette série d’article, je vous propose de décortiquer 3 outils clés du manager :
- Le management situationnel
- L’Écoute active
- L’Entretien de recadrage / Savoir dire non
PARTIE 1 : LE MANAGEMENT SITUATIONNEL
Quel Manager êtes-vous ?
Un peu d’histoire pour commencer… En 1943, Abraham MASLOW pose les fondements de sa célèbre pyramide. Maslow hiérarchise nos besoins selon 5 niveaux :
Il explique que « les motivations d'une personne résultent de l'insatisfaction de certains de ses besoins ». Appliqué au monde du travail, je peux illustrer :
- PHYSIO : Le travail m’apporte une rémunération pour acheter nourriture, logement, etc…
- SÉCURITÉ : Le travail me procure un salaire régulier, des horaires définis et contribue à un environnement stable et prévisible
- SOCIAL : Le travail me permet de créer du lien social et un sentiment d’appartenance
- ESTIME : Le travail que j’accomplis m’apporte de la reconnaissance (mon patron, mes clients…)
- ACCOMPLISSEMENT : Le travail donne un sens à ma vie, un sentiment d’utilité à la société, au monde.
Bien que critiquée et critiquable, la théorie de Maslow met en évidence un point clé du management : nos besoins et nos motivations sont différents selon des critères qui nous sont propres.
Dans les années 60, d’autres universitaires (américains eux aussi) vont continuer à théoriser le Management. Parmi eux, les célèbres Paul Hersey et Ken Blanchard avec leur théorie du Situational Leadership ® (ou management situationnel en bon français...)
Le management situationnel pose quelques principes clé pour l’efficacité managériale :
1. Le Manager se doit de faire grandir les personnes de son équipe
2. Le Manager doit adapter son style de Management en fonction de la « maturité » du collaborateur
3. Le Manager doit créer les conditions propices à la progression de ses collaborateurs
Alors, c’est parti ! A la découverte du Management Situationnel…
Évaluation des collaborateurs
La première chose à faire est d’avoir une grille pour évaluer ses collaborateurs.
Imaginons un graphe à 2 axes :
- sur un axe, nous allons évaluer la compétence : SAIT FAIRE / NE SAIT PAS FAIRE
- sur l’autre axe, nous allons évaluer la motivation : VEUT FAIRE / NE VEUT PAS FAIRE (ou n'a pas envie de faire)
Évaluons désormais un collaborateur selon cette grille.
ATTENTION : nous devons évaluer le collaborateur pour une situation donnée (un projet, une tache…) à un moment donné. Nous touchons là un principe fort du Management situationnel : le Manager évalue en permanence ses collaborateurs.
Appliqué au terrain, c’est facile à comprendre. Notre collaboratrice Julie, Responsable de Prod, peut à la fois être :
- Compétente et motivée pour la planification de prod,
- Compétente mais pas motivée pour le recrutement de ses équipes,
- Pas compétente mais très motivée par un projet de mise en place d’un logiciel de suivi des temps d‘arrêt machine.
Nous pouvons ainsi définir 4 degrés différents d’autonomie (ou dit de « maturité ») :
Ces 4 niveaux de maturité sont :
M 1 : le collaborateur n’est pas compétent, il est résistant ou insécurisé ==> Manque de connaissance, de compétence ou de confiance pour travailler par soi-même.
M 2 : le collaborateur n’est pas compétent, il est volontaire ou confiant ==> Envie de faire mais il n’a pas toujours les compétences pour le faire avec succès.
M 3 : le collaborateur est compétent, il est résistant ou insécurisé ==> Envie de faire, d’aider. Il y a plus de compétences que le groupe M2, mais pas toujours confiance dans les capacités.
M 4 : le collaborateur est compétent, il est volontaire ou confiant ==> En mesure de travailler de sa propre initiative. Investit dans les taches à réaliser.
NB : je tiens à revenir ici sur la notion de Maturité. A replacer dans le contexte : il s’agit de la maturité à traiter une tache, un projet. Et certainement pas de la maturité au sens de la capacité de réflexion et de jugement.
On garde tout cela dans un coin de la tête et on y revient…
Évaluation du style de Management
Le manager doit cette fois ci prendre conscience de ses capacités instrumentales et relationnelles.
Selon Hersey et Blanchard :
- Les comportements instrumentaux ont pour but d'organiser et de définir les rôles des collaborateurs. Le « leader » explique à chacun des membres les activités qui lui incombent, à quel moment il doit agir, comment s'organiser et collaborer avec les autres. Le comportement instrumental définit une structure d'organisation, formalise les procédures et les modes opératoires pour accomplir les tâches ou encore définit des indicateurs de performance. On peut schématiser par le degré organisationnel du manager.
- Les comportements relationnels intègrent toutes les relations personnelles qui existent entre le leader et ses collaborateurs.
Là aussi, créons une grille selon ces 2 axes :
Évaluons le Manager selon ces 2 critères. Nous arrivons à 4 styles de leadership qui vont impacter notre management.
- S 1 : STYLE DIRECTIF ==> Organisationnel ++ / Relationnel - -
Objectif : structurer, diriger. Le Manager décide, donne ses instructions. Il utilise sa force hiérarchique, il impose, organise et contrôle (JE). Il forme.
- S2 : STYLE PERSUASIF ==> Organisationnel ++ / Relationnel ++
Objectif : Persuader, mobiliser, coacher, entrainer. Le Manager donne des instructions précises, explique ses choix. Il utilise sa force de persuasion et de conviction (JE). Il forme.
- S3 : STYLE PARTICIPATIF ==> Organisationnel - - / Relationnel ++
Objectif : Associer, encourager, soutenir. Le Manager écoute, donne son avis, partage la décision. Il utilise sa force de conseil et de négociation (NOUS).
- S4 : STYLE DELEGATIF ==> Organisationnel - - / Relationnel - -
Objectif : Responsabiliser, déléguer. Le Manager reste en retrait et accompagne selon les besoins. Il utilise sa force de délégation et transmet les responsabilités (VOUS).
ATTENTION : chaque manager va se retrouver préférentiellement dans un style. Certains sont plus naturellement directif, d’autres participatifs. UN STYLE N’EST PAS MEILLEUR QU’UN AUTRE ! Il faut par contre savoir sortir de son style de confort comme nous allons le voir dans la dernière partie de cet article.
Faire correspondre style de management et maturité du collaborateur
Dernière étape !
Vous l’aurez compris, le manager efficace sait adapter son style de management à la situation du collaborateur (pour une tache donnée, à un moment donné, je me répète 😉).
2 erreurs à ne pas commettre :
- S’enfermer dans un style de management, son style de « confort » ==> le management délégatif peut faire des ravages pour le collaborateur qui n’est pas prêt. Un management uniquement directif peut être source de démotivation.
- « Cataloguer » un collaborateur à un degré de maturité donné ==> le manager efficace réévalue la situation d’un collaborateur en permanence et adapte son style de management
Le manager efficace doit donc adapter son attitude à chaque situation. Reprenons dans l’exemple du début d’article pour notre collaboratrice Julie, Responsable de Prod :
- Compétente et motivée pour la planification de prod ==> je lui délègue plus de responsabilités dans la planification, je reconnais son excellence dans ce domaine.
- Compétente mais pas motivée pour le recrutement de ses équipes ==> je l’associe au recrutement, écoute son avis et nous décidons les recrutements ensemble. Au passage, cela me permettra certainement aussi de comprendre pourquoi elle manque de motivation pour cette tache ! Si je lève ce verrou, je pourrai lui déléguer complètement le recrutement.
- Pas compétente mais très motivée par un projet de mise en place d’un logiciel de suivi des temps d‘arrêt machine ==> je l'accompagne dans la gestion de ce projet et la forme si besoin pour qu’elle en retire de nouvelles compétences. Je contrôle ses résultats après des instructions précises. Si elle est en réussite, lors d’un projet suivant, je lui laisserai un peu plus d’autonomie.
Résumé dans un dessin, cela donne :
Et donc…
Il n’y a pas de style meilleur qu’un autre : il y a par contre un style adapté à la situation d’un collaborateur. Il faut donc rester ouvert et entrainer notre capacité d’évaluation en prenant le temps d’analyser quelques cas concrets jusqu’à ce que ça coule de source. Cette souplesse n’est pas naturelle, elle se cultive.
Gardons aussi à l’esprit que les théories Hersey et Blanchard ont plus de 50 ans et elles montrent quelques limites. Elles présupposent une hiérarchie de type pyramidale qui sont maintenant remises en cause par d’autres théories sur le management et les organisations (organisations matricielles, quête de sens, Agilité, Holacratie…).
Ces théories érigent en vertu cardinale la capacité d’adaptation du manager. Doit-il tout le temps s’adapter ? Je ne crois pas… Il doit aussi cultiver sa capacité à accompagner le changement et aider ses équipes à « sortir du cadre » lorsque c’est nécessaire.
Le Management situationnel n’est cependant pas périmé, bien au contraire ! C’est un outil puissant pour aider un manager à adopter un management efficace. L’objectif reste le même : faire grandir nos collaborateurs dans un environnement sain.
Vous trouverez d’autres articles concernant le management, les leviers de motivation et bien d’autres encore sur le blog de Semer & Grandir.
Semer & Grandir vous accompagne pour améliorer votre performance managériale et aller ensemble vers le Mieux Vivre en Entreprise.