Quelles conséquences peut avoir la démission du gouvernement Barnier sur le secteur de l’immobilier ?

Quelles conséquences peut avoir la démission du gouvernement Barnier sur le secteur de l’immobilier ?

La démission du gouvernement Barnier plonge la France dans une instabilité politique dont les répercussions risquent d’être lourdes pour de nombreux secteurs, notamment l’immobilier. Déjà fragilisé par la hausse des taux d’intérêt, une demande en berne, et des dispositifs fiscaux incertains, le secteur doit désormais composer avec un vide décisionnel à un moment critique.

Alors que les professionnels espéraient des réformes pour soutenir le marché, cette situation illustre une réalité implacable : dans ce domaine, comme souvent, ils ne peuvent compter que sur eux-mêmes pour affronter les défis.

Le gouvernement Barnier avait prévu une réforme fiscale importante pour alléger la pression sur les propriétaires, avec notamment la suppression progressive de la taxe foncière sur les résidences principales et une révision des droits de mutation à titre onéreux (DMTO), qui grèvent les transactions immobilières. En outre, un projet d’exonération fiscale sur les donations immobilières était en préparation pour faciliter la transmission de patrimoine.

Mais cette réforme reste en suspens, suscitant des inquiétudes parmi les professionnels du secteur. Sans ces ajustements, les droits de mutation élevés continueront de freiner les projets d’acquisition, alors que l’accession à la propriété devient de plus en plus difficile.

Les primo-accédants, notamment, voient leur rêve de devenir propriétaires s’éloigner. En cinq ans, la proportion de ménages de moins de 35 ans propriétaires a chuté de 20 %, et sans réforme, cette tendance pourrait se renforcer.

Le gouvernement Barnier travaillait également sur une réforme des aides à la rénovation énergétique, dans le cadre du plan « France verte ». Cette initiative visait à encourager les propriétaires à rénover leurs biens pour répondre aux exigences du DPE (Diagnostic de Performance Énergétique).

La démission du gouvernement suspend ces avancées, laissant des milliers de dossiers en suspens et des propriétaires face à des échéances rigides. Les logements classés F et G, qualifiés de « passoires thermiques », sont particulièrement touchés, car leur mise en location sera progressivement interdite.

Un exemple concret : dans certaines régions rurales, où 40 % des logements locatifs sont concernés par ces restrictions, les propriétaires peinent à trouver des financements pour les travaux. L’absence de soutien clair aggrave cette crise et pourrait entraîner une pénurie de logements à louer dans les zones les moins favorisées.

Le gouvernement Barnier avait amorcé un dialogue avec les acteurs financiers pour dynamiser le marché de l’immobilier locatif privé, en facilitant l’accès au crédit et en assouplissant certains dispositifs. Avec cette démission, ces discussions s’interrompent brusquement.

Les investisseurs, déjà échaudés par des taux d’intérêt en forte hausse, risquent de se détourner davantage d’un marché jugé instable. Conséquence directe : la construction de nouveaux logements pourrait chuter encore plus brutalement.

À titre d’exemple, le nombre de permis de construire délivrés sur les 12 derniers mois est déjà en recul de 15 %. Ce phénomène entraîne des délais de livraison de plus en plus longs et un déséquilibre croissant entre l’offre et la demande, particulièrement dans les zones tendues comme l’Île-de-France et la région PACA.

Face à ce vide politique et à l’absence de mesures immédiates, les professionnels de l’immobilier se retrouvent une fois de plus seuls pour faire face à la tempête. Cette démission rappelle, de manière presque cruelle, une réalité devenue familière : l’État ne peut pas toujours être un allié fiable.

Certes, l’immobilier est un secteur résilient, et les acteurs du marché ont maintes fois prouvé leur capacité à s’adapter. Mais cette résilience a ses limites. Avec un marché déjà en crise, la demande qui s’effondre, et des investisseurs qui fuient, la situation actuelle ressemble à un défi de taille.

Alors que la France attend un nouveau gouvernement, les agents immobiliers, promoteurs, et investisseurs n’ont d’autre choix que de se retrousser les manches. Comme toujours, ils devront compter sur leur propre ingéniosité pour survivre dans un contexte où les perspectives d’amélioration semblent, pour le moment, encore lointaines.

Et pour ceux qui espéraient enfin un soutien décisif des pouvoirs publics, cette démission résonne comme un rappel amer : dans l’immobilier, la solidarité de l’État reste, hélas, une promesse rarement tenue.

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