Qui pour payer la sélection variétale fruitière ?
Quelles seront les variétés fruitières de demain ? C’est la question à laquelle se proposait de répondre l’édition 2016 du Végépolys symposium, qui se tenait le 12 janvier dernier dans le cadre du Sival. Les enjeux, nous le savons, sont réels : mondialisée et, de fait, très concurrencée, l'arboriculture fruitière se doit également de répondre à des considérations sociales, sociétales et environnementales majeures. À cet égard, la variété reste à la base de tout.
Mais comment hiérarchiser aspect, productivité, tolérance aux bioagresseurs, coloration, tenue après récolte, qualité gustative ? C’est parfois la valse des critères de sélection. Ainsi, accusée de préférer la productivité à la qualité gustative, la profession a revu sa copie pour offrir au consommateur le plaisir gustatif tant attendu, bien que l’opération soit presque perdue d’avance : l’appréciation du goût est, en effet, totalement subjective.
Doubler les surfaces d'essai
Les modes passent mais les réalités restent : c’est donc la Charte variétale, mise en place par l’Inra, CEP Innovation, le CTIFL et la FNPF, qui fixe le cadre du processus d’évaluation des nouvelles variétés. Depuis trois ans, des experts travaillent d’ailleurs à sa remise à niveau. La volonté aujourd’hui partagée par tous est d’approfondir les connaissances sur la sensibilité des nouvelles variétés aux bio-agresseurs. Or, si certains peuvent être étudiés en verger de comportement sans pénaliser les résultats agronomiques du verger, d’autres engendreront des dégâts importants, rendant difficile la cohabitation entre performances agronomiques et évaluation de la sensibilité variétale. Il faudrait donc doubler les surfaces d’essai : un verger conduit avec des IFT (Indicateur de fréquence des traitements) classiques d’un côté, et un verger à faibles intrants de l’autre. Deux niveaux d’évaluation, en somme. Mais pour le même budget ! Le danger est là, l’impasse est financière : la Charte fruitière risque de n’évaluer que très peu. L’Inra a déjà fait savoir sa volonté de se retirer du dispositif si la transition agro-écologique n’était pas plus affirmée.
En réalité, la question qui se pose est celle de savoir qui paye. En l’état actuel des choses, il ne serait pas stupide d’envisager l’instauration d’une contribution financière de la part des pépiniéristes. Le réseau d’évaluation s’émeut parfois d’assumer une étape de sélection primitive, estimée comme étant du ressort de l’éditeur. Et, à l’autre bout de la chaîne, c’est bel et bien le producteur qui teste – qui trinque ? -, en conditions réelles.
Alors, s’il fallait émettre un vœu pour cette année qui commence, espérons que la nouvelle mouture de la Charte fruitière soit à la hauteur des enjeux que nous connaissons tous. Dommage que le Ministère, qui promulguait il y a peu son « An I de l’Agroécologie », n’ai pas prévu de rallonge afin de permettre à nos experts d’identifier les variétés peu sensibles et, de fait, peu gourmandes en intrants.
Une contribution des pépinéristes ne serait pas illogique. Pas de raison que seul le producteur, qui teste les variétés en conditions réelles, trinque !