Réformer le paritarisme
La gestion paritaire, qui s’est développée au sortir de la Seconde Guerre mondiale (création de la Sécurité sociale en 1945, de l’Agirc en 1947, de l’assurance chômage en 1958), est aujourd’hui à bout de souffle et présente des incongruités très dommageables au développement économique et social de la France :
• Un évident déficit de représentativité avec moins de 5% d’adhérents à un syndicat dans le privé et 15% dans le public, contre 80 % en Suède ou encore 25 % en Grande-Bretagne.
La représentativité française devrait continuer à reculer compte tenu de la faiblesse du taux de syndicalisation des plus jeunes salariés (3% pour les moins de 30 ans dans le secteur privé). Essentiellement perçu comme protestataire, le syndicalisme français pêche en matière de services apportés à ses adhérents et donc d’attractivité auprès des salariés
• Des ressources déconnectées des cotisations des adhérents. La part des cotisations des adhérents, qui devraient garantir l’indépendance des syndicats, n’est que de 40% en moyenne pour les syndicats de salariés et de 32% pour les syndicats patronaux
• Des mécanismes de financement des organisations syndicales et professionnelles structurellement opaques. Outre les cotisations des adhérents, le financement des syndicats repose sur les organisations qu’ils contrôlent – Unedic, Agirc et Arrco, formation professionnelle…
• Un nombre de mandataires considérable - estimés à 200 000 - alors que la démocratie politique en compte 500 000
• Une gestion sclérosée et complexe qui, à travers les multiples caisses (assurance maladie, retraites, formation professionnelle), renchérit considérablement les coûts de gestion du système social français
• Un manque de contrôle puisque les organismes syndicaux échappent aux contraintes réglementaires imposées aux entreprises privées et à celles applicables aux entités publiques.
En dépit de ces anomalies, les partenaires sociaux jouissent de prérogatives de gestion sur plus de 6% du PIB national, essentiellement à travers le chômage, les retraites, la formation professionnelle, le logement et la santé au travail. De plus, ils interviennent dans les conseils de prud’hommes, les tribunaux de commerce, les CCI, le CESE, les CESER et une multitude d’autres organismes (Direccte, IUT, rectorats d’académie…).
Sur le plan économique, les résultats, même s’ils ne sont entièrement attribuables à la gestion paritaire, sont peu flatteurs : un marché du travail sclérosé, une dette abyssale pour l’Unedic (30 Md€), des déficits techniques des régimes Agirc-Arrco…
Le paritarisme français est une exception européenne où, pour l’essentiel, la gestion de la protection sociale obligatoire est gérée par l’État.
Il est donc essentiel de mettre en œuvre rapidement une réforme du paritarisme en France dont les grands axes seront les suivants :
• Localiser la négociation sociale dans l’entreprise au plus près des réalités du terrain, permettre les candidatures libres à la représentation sociale et donner la possibilité de recourir au referendum d’entreprise
• Transférer à l’État ce qui relève de sa responsabilité, par exemple l’assurance chômage et les prestations familiales, et confier au marché ce qu’il pourra réaliser de manière plus efficace comme l’accompagnement des demandeurs d’emploi externalisé en délégation de service public, les protections sociales complémentaires, la formation ou le logement
• Contrôler le financement des organismes syndicaux en rendant obligatoire la présentation d’un budget annuel faisant apparaître clairement l’ensemble des recettes (cotisations adhérents, subventions, détachement des salariés) et des dépenses (et singulièrement du premier poste de dépenses que sont l’organisation de séminaires et les frais de déplacement)
• Mettre fin aux organisations paritaires inutiles comme le CESE et les CESER.