Réminiscence selon Catherine Eby
Autodidacte, Catherine Eby a toujours eu une seule et même passion : la peinture et la création. Mais, si elle aime peindre, sa très grande particularité est de privilégier les petites surfaces, pour ne pas dire les surfaces minuscules. Grâce à son carnet de croquis, qui l’accompagne en permanence, elle conserve soigneusement les traces de toutes les merveilles qu’elle peut observer au détour de promenades et de rencontres : maisons décorées, oiseaux, insectes, plantes, arbres... elle scrute tout de son œil attentif, puis redécouvre les objets de son attention par les tracés de ses dessins, leur offrant au passage une plus-value poétique.
Habituée de Pôle Bijou depuis plusieurs années déjà, cette alsacienne de naissance et de cœur aurait dû être parmi nous à l’occasion des Journées Européennes des Métiers d’Art, et aurait sans nul doute émerveillé le public avec ses pinceaux, ses jeux de couleurs et ses minuscules formats.
Catherine Eby
Son immense attrait pour les tous petits formats, l’a amené naturellement à exercer ses talents sur des bijoux renouant en cela avec toute une tradition de la peinture miniature telle que la définit le Littré : « sorte de peinture délicate qui se fait à petits points ou à petits traits, avec des couleurs très fines, détrempées d'eau et de gomme, sans huile. ». Dès la Renaissance, la miniature quitte les seuls parchemins pour venir orner bijoux et autres petits objets, elle est à la source d’un immense engouement qui ne se tarira qu’au milieu de 19ème siècle lorsque l’art de la photographie viendra la détrôner. Découvrons maintenant comment notre peintre miniaturiste exerce son talent !
En tout premier lieu, Catherine Eby transpose dans ses créations, ses propres dessins. Chacun est réalisé à main levée et toujours au crayon de papier. Il est ensuite adapté sur un support beaucoup plus petit, destiné à devenir la pièce maitresse du bijou. Ce petit support est préalablement façonné en pâte polymère végétale et adapté au motif à réaliser.
Ensuite entre en scène son petit pinceau à trois poils ! Recouvert d’une peinture acrylique noire, il vient alors définir les contours du dessin préalablement réalisé au crayon.
Ensuite, pour lui donner vie, la pièce « dessinée » est enrichie de couleurs (toujours à la peinture acrylique). La peinture fine et légère, le trait fin et précis, offre une multitude de détails, nous invitant à l’observation attentive, nous incitant à faire jouer notre œil.
Un soin tout particulier est ensuite accordé aux finitions. La peinture, une fois terminée, est enduite de plusieurs couches de vernis ce qui va permettre tout à la fois de faire ressortir les couleurs, mais aussi de préserver la petite œuvre des ravages du temps. Arrive alors le montage du bijou… choisir l'apprêt, le lien qui permettra de le porter… Catherine va toujours chercher à créer une homogénéité entre le dessin et la pièce finalisée pour que l’image capturée vienne vivre une nouvelle vie sur le corps du porteur… mais soit aussi comme une « petite toile miniature » à emporter avec soi…
A l’occasion des Journées Européennes des Métiers d’Art, elle s’était elle aussi prêtée au jeu du sujet Réminiscence, voyant là une belle occasion de rendre hommage à tout un pan de l’histoire de l’Art : le mouvement Rococo ou Rocaille.
Ce mouvement artistique, qui émerge vers les années 1715 et qui va traverser le siècle, touche de nombreuses formes d’expression, influençant l’architecture, les arts décoratifs mais aussi la peinture et la sculpture. Très fortement implanté en Lorraine, ce nouveau style vient rompre avec le classicisme et sa très grande formalité. Ici, les lignes sont courbes, asymétriques, rappelant les volutes des feuillages... les grilles en fer forgé de Jean Lamour qui entourent la Place Stanislas de Nancy en sont une grandiose illustration.
Dans le monde de la peinture, le style Rococo amène un goût prononcé pour les couleurs pastellisées, les formes curves, les compositions asymétriques, le goût pour l’exotisme, les emprunts à la mythologie, le plaisir de la galanterie et l’attrait pour les Fêtes Galantes, les scènes pastorales... univers empreint de légèreté et d’un certain sentimentalisme. Il est parfaitement illustré par les œuvres de quelques grands peintres tels Antoine Watteau (1684-1721), est considéré comme le premier grand peintre rococo. Il a eu une influence sur ses contemporains : François Boucher (1703-1770), Carle Van Loo (1705-1765), Jean-Honoré Fragonard (1732-1806) ou encore les italiens Giambattista Tiepolo (1696-1770) et Francesco Zuccarelli (1702-1788).
C’est autour de ce style Rococo que Catherine Eby a travaillé pour créer une collection spécifique « Réminiscence », jouant avec les décors fleuris, végétaux, bucoliques, les décors lumineux sur fond ombragé, ou encore avec les décors en grisaille... ou encore en s’inspirant directement d’artistes qu’elle admire, comme par exemple la peintre Elisabeth Louise Vigée Lebrun (1755-1842), trop rare femme artiste peintre reconnue, considérée en son temps comme l’une des plus grande portraitiste qui soit. On lui doit entre-autre les 5 variantes de Marie-Antoinette à la rose, portraits intimistes de la Reine, dont l’un en robe dite « gaule » (linge de corps) fera scandale. Catherine Eby lui fait un clin d’œil à travers le temps via une petite bague ornée d’une main tenant bouquet...
Espérons que toutes ces pièces pourront vous être dévoilées sous peu...