"Réussir vos transformations" (rideau) : la poule, le cochon et l'omelette au lard
Pour conclure les petites chroniques de la transformation que j'avais engagées avant les congés, je voudrais revenir sur un sujet qui m'interroge depuis longtemps, abordé dans la conclusion du livre : pourquoi y a-t-il un tel écart entre ce que l'on sait et ce que l'on fait ? Pourquoi les méthodes inefficaces perdurent-elles, alors que l'on sait, justement, qu'elles ne marchent pas ?
1e hypothèse : si les personnes (ou les organisations) ne changent pas, c'est qu'elles ne savent pas. Hypothèse de bon sens, a priori, mais pas toujours vérifiée. Combien de fois peut-on constater que les clients savent parfaitement - que telle ou telle chose ne marche pas, qu'il faudrait engager tel ou tel changement, qu'il faudrait s'y prendre autrement, etc. -, mais pour autant n'en tiennent pas compte. Si la connaissance était suffisante pour changer, il n'y aurait plus de fumeurs. Dans bien des cas donc, la prise de conscience - l'insight, dans le jargon des coachs - ne fonctionne pas.
2e hypothèse : si les personnes (ou les organisations) ne changent pas, c'est qu'elles ne veulent pas. Cette hypothèse connaît un certain succès, car elle rencontre le paradigme dominant aujourd'hui, consistant à tout expliquer par des facteurs individuels, psychologiques. Raymond Boudon disait qu'une idée est adoptée non parce qu'elle est juste, mais parce qu'elle rend service. On a notre coupable (le manque de volonté), l'enquête peut être close.
La conclusion du livre propose une 3e hypothèse, basée sur la métaphore bien connue de la poule, du cochon et de l'omelette au lard.
- Dans une omelette au lard, la poule est impliquée : elle donne des œufs, et c'est tout. Si l'omelette est ratée, ça n'est pas grave, elle peut donner d'autres œufs. La poule n'a pas besoin de porter trop d'attention aux compétences de celui qui fait l'omelette.
- Le cochon, lui, est concerné : ce qu'il engage dans l'omelette au lard va bien au-delà de ce que la poule y met. C'est sa peau qu'il joue dans l'affaire. Il ne peut guère se permettre de se désintéresser de la façon de faire du cuistot.
Dans les grandes organisations, le rapport aux résultats est très distendu, du fait d'une multitude de facteurs : segmentation des tâches, contradiction des objectifs, enchevêtrement des responsabilités, jeux de pouvoir, etc. En cas d'échec, on peut toujours faire porter le chapeau à quelqu'un d'autre :
- le siège (qui "ne comprend pas le terrain"),
- le terrain (qui ne "comprend rien à la stratégie"),
- les managers ("qui résistent au changement"),
- le service d'à côté,
- le "manque de ressources",
- etc.
Durant la conférence de presse annonçant le rachat de son entreprise par Microsoft (septembre 2013), le PDG de Nokia a ainsi terminé son allocution : "We didn’t do anything wrong, but somehow, we lost." Dans le monde des poules, l'échec n'invalide rien : on peut rater et pour autant continuer à avoir "raison".
Dans les petites organisations ou les petits collectifs, on n'a guère ce luxe, car l'inefficacité se paie cash. Certains secteurs d'activité le savent depuis longtemps : le sport et l'armée par exemple. Un coach sportif peut toujours dire que sa stratégie est géniale, si elle ne permet pas de remporter les matchs, il va avoir du souci à se faire. Un officier qui échoue dans sa mission et laisse des hommes sur le carreau pourra toujours rétorquer qu'il avait raison, il risque de ne plus être suivi la fois d'après. Le "c'est pas moi, c'est l'autre" que l'on apprend tous à l'école trouve des limites dans le monde des cochons.
Cette métaphore est intéressante en ce qu'elle nous donne une piste pour réussir nos transformations : développons les cochons, c'est-à-dire développons l’autonomie, la confiance, la responsabilité, la prise de décision au plus près du terrain, la vision partagée, l’entraide, le respect des valeurs humaines fondamentales.
Dans le monde des cochons, l'on n'est plus obligé de choisir entre nos valeurs et nos résultats : quand les femmes et les hommes sont placés au centre des démarches de transformation, ça marche, et ça marche même très bien.
Sociologue Ph D. | Directrice Associée Co.devenir | Change Practitioner & Exec Coach
7 ansTout à fait ! Et c'est d'ailleurs ainsi que commence (ou presque) le livre de V. Lenhardt "Mes 10 strategies de Coaching". 😉
En transition
7 ansJe recommande Arnaud, pour ceux qui ne le connaîtrait pas, et ses ouvrages ou l'essentiel à connaître est parfaitement décrit.
Responsable Communication / Formation Altros - Portage salarial
7 ansGrouick ... Grouick
Formation - Accompagnement @Evoluo Co-créatrice du jeu Evo'Leviers Praticienne en psychologie positive
7 ansUne métaphore que j'utilise très souvent pour introduire mes formations :-)
Programme de transformation / Excellence opérationnelle / Accompagnement au changement / Expérience Client
7 ansVotre livre est tres bien fait... je le recommande... 👏