Rencontre avec Félix de Monts, fondateur de Vendredi
Félix de Monts a créé Vendredi, une plateforme qui permet aux entreprises et salariés de s’engager.
D'abord fondée en tant qu’association en 2014, Vendredi est devenue une entreprise à impact en janvier 2019. « J’ai toujours été passionné par l’intérêt général et l’entrepreneuriat », raconte cet enfant dans un ancien entrepreneur. « Mon père a été le premier en France à faire des montures de lunettes en bois. Je n’ai pas baigné dans une culture business car il n’était plus entrepreneur quand je suis né mais quand j’étais à l’école, je me voyais bien faire cela, même si je ne savais pas vraiment ce que c’était. » Pour nourrir son appétence pour les sujets liés à l’intérêt général, Félix de Monts suit alors des études à Sciences Po Paris. « Je voulais faire l’école qui me permettrait de régler des problèmes de société. »
Désabusé par l’administration française durant ses années sur les bancs de la célèbre institution, l'entrepreneur raconte à plusieurs reprises dans la presse avoir eu l’idée du projet à l’initiale de Vendredi, Stagiaires Sans Frontières, après une expérience de bénévolat en Afrique. « Ma conviction c’est qu’il n’y a pas vraiment de déclic », tient-il à préciser quand on lui évoque l’événement. « C’est plutôt un cheminement d’engagements qui a commencé plus jeune. Une série de rencontres, mon expérience dans le scoutisme, à l’étranger, ou encore l’exemple de copains ayant fait le tour du monde du microcrédit ou des entrepreneurs sociaux », détaille-t-il avant d'ajouter : « Je viens d’un bon milieu social mais ayant grandi dans un quartier populaire du 18ème arrondissement de Paris, j’ai été confronté à différents milieux dans lesquels pouvaient évoluer des amis ou des cousins. Comme ma mère était hôtesse de l’air, j’ai aussi beaucoup voyagé quand j’étais petit. J’ai été témoin d’une pauvreté très forte dans certains pays, comme dans mon quartier car on n’a pas besoin d’aller à l’autre bout du monde pour y être confronté. »
Des stages partagés au temps plein à impact
Encore étudiant, Félix de Monts pose donc déjà les bases de ce que deviendra, quelques années plus tard, Vendredi. Face au constat que de plus en plus de jeunes de son âge veulent effectuer des stages ayant du sens, il invente le concept de « stage partagé » entre des entreprises et des associations œuvrant dans l’humanitaire. L’aventure commence donc à l'international mais Félix de Monts pivote à son retour en France, quand il intègre la première promotion de Ticket for Change en parallèle de ses études. « J’y ai trouvé une énergie, je me suis reconnu dans la vision de la société. Je faisais des études très théoriques, je ne connaissais encore rien à l’entrepreneuriat et je n’avais encore jamais vraiment entendu parler d’économie sociale et solidaire. » Malgré son manque de connaissances et d’expérience, Félix de Monts réussit à transformer son projet pour proposer, non plus à des stagiaires, mais à des salariés français de s’impliquer dans des actions solidaires, humanitaires, à impact positif dans leur pays lors d’une heure, d’une journée, ou même à temps plein en fin de carrière, par exemple. « On propose plein de petits pas pour amener les gens à avoir un temps plein sur l’impact », résume ainsi l’entrepreneur.
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Évangéliser les entreprises
Aujourd’hui, Vendredi ne cesse de croître. Près de 150 entreprises ont rejoint l’aventure. 1000 associations référencent leurs besoins sur la plateforme et près de 20.000 salariés ont contribué sur leur temps libre ou temps de travail à une ou plusieurs actions solidaires. Face à cet engouement, les missions actuelles et principales de Félix de Monts sont tournées vers le recrutement. Avec cet objectif : « Consolider ses acquis » pour convaincre toujours plus d’entreprises de faire appel aux services de Vendredi et de personnes à se rendre sur la plateforme pour s’engager à leur échelle. « Il faut évangéliser les entreprises et leurs salariés sur ce qu’ils peuvent faire », souligne Félix de Monts. « Avec Vendredi, on est sur la diversité des actions : des petits gestes citoyens comme le don du sang à des missions de compétence ou encore du team building. Il y a, en France, un potentiel incroyable d’engagement : les entreprises ont envie de s'engager mais il y a plein de contraintes. Les entreprises ne savent pas forcément comment convaincre leurs salariés en interne. Il faut les aider à passer à l’action. »
Cette envie de s’engager pour une meilleure société n’est plus un sujet de niche. Aujourd’hui, de nombreuses entreprises affichent leur Raison d’être. « Mais quand on essaye de faire partie de la solution, il faut vraiment l’être », tient à préciser Félix de Monts. « En transformant sa gouvernance, ses façons de faire, ses principes fondamentaux, son rapport aux actionnaires ou la manière de faire participer les collaborateurs », énumère encore l’entrepreneur qui estime que le combat sera gagné quand la notion d’entreprise à impact et de l’économie sociale et solidaire n’existera plus. « Il faut qu’elle s’estompe, non pas pour qu’elle devienne galvaudée et qu’elle soit vidée de sa signification, mais bien pour qu’il y ait une véritable réflexion de fond autour du sujet de la transformation », estime le chef d’entreprise.
Quant aux conseils à livrer aux aspirantes et aspirants entrepreneurs de l’ESS, Félix de Monts partage ses propres erreurs et apprentissages avec sincérité (comme le fait de ne pas se lancer trop rapidement mais plutôt de tester simplement pour apprendre et adapter au besoin) mais insiste surtout sur une parole essentielle : « Devenir entrepreneur à impact n’est pas systématiquement la solution. On a aussi besoin de salariés qui changent les choses de l’intérieur, qui comprennent qu’ils sont une partie de la solution. Comment ? En faisant du bénévolat, du mécénat de compétences sur son temps de travail, en réduisant son empreinte carbone. On a besoin d’être partout. »