Retour sur expérience de ChatGPT
Un cafouillage monstre en vue !
(Last man in Europe, huile sur toile d’origine humaine, 80x122cm, 2023)
Avertissement : ce texte est généré par une intelligence naturelle… la mienne, hormis quelques fragments mis entre guillemets où je cite explicitement la réponse de ChatGPT.
Il y a 20 ans, j’avais 20 ans et je caressais le temps, mais surtout, lorsqu’il s’agissait d’en connaître plus sur un sujet, j’ouvrais un, deux ou trois livres. Je les dévorais et je m’adonnais à croiser les idées des auteurs pour forger ma connaissance. J’en profite au passage pour remercier certains professeurs qui m’ont bien orienté. Ils m’ont sensibilisé notamment en ce qui concerne les sources que l’on utilise, s’agissant de restituer un quelconque savoir. À cette époque on perdait des points dans un travail de recherche si l’on citait Wikipédia. La plateforme s’est considérablement améliorée depuis, mais je reste néanmoins prudent dans son utilisation, n’y puisant que des données factuelles. Puis l’Internet est monté en puissance. Le moteur de recharge Google s’est imposé par sa simplicité et son efficacité. Plus besoin de bouquiner et de sentir la poussière toute caractéristique de la bibliothèque et de ses grimoires. On pouvait avoir accès à plus de contenu tous les jours. Mais comment pourrions-nous qualifier les informations de l’Internet ? Cette question, quoiqu’indirecte, servira à la réflexion qui concerne le retour sur expérience de ChatGPT.
L’un des enjeux de l’Internet était de développer une société plus informée et plus consciente. Cette technologie de réseaux a aussi permis une expansion massive de la finance jusqu’à faire de l’ombre sur les pouvoirs des États. Le monde des réseaux de l’Internet a profondément bouleversé nos modes de vie, mais comme toutes évolutions n’arrivent que successivement, il faut faire de grands efforts rétrospectifs pour s’en rendre vraiment compte. Mais au bout du compte, justement, et quelques dizaines d’années plus tard, est-ce que l’on peut affirmer que nos sociétés sont plus informées grâce à l’Internet ? Si oui, pourquoi alors le sujet de la désinformation prend-il autant de place dans le débat public ?
On pourrait en rester là, mais force est d’admettre que de nouveaux acteurs font trembler les géants de l’Internet. L’un de ces acteurs est OpenAi qui a développé ChatGPT. Le principe est simple. On pose une question à la plateforme en attendant une réponse générée par l’intelligence artificielle. À la question : qu’est-ce que ChatGPT ? On obtient la réponse suivante en quelques secondes : « ChatGPT est un modèle de langage développé par OpenAI. Il a été formé en utilisant des données de texte sur Internet pour être capable de générer du texte en réponse à des questions et des demandes d’informations. […] ChatGPT peut être utilisé pour de nombreuses applications, telles que la génération de réponses en ligne, la traduction automatique et la génération de contenu. » La plateforme est aussi très performante pour générer du code informatique dans de nombreux langages puisqu’elle puise aussi ses connaissances dans la plateforme GitHub (bien connue des informaticiens), ce qui pose des questions éthiques abyssales et de droits à la propriété intellectuelle, mais ce n’est pas l’objet de ce papier et on ne peut pas combattre sur tous les fronts.
Maintenant que le cadre est à peu près posé (on pourrait en dire tellement plus), venons-en à ses possibilités d’utilisation et le cafouillage possible (que je crois bien inévitable) en vue. Je vais utiliser la métaphore du serpent se mordant la queue. Je m’explique…
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ChatGPT génère lui-même la réponse, à savoir qu’il puise ses sources sur les données de texte de l’Internet. À l’heure où j’écris ce papier, ses sources se limitent aux données collectées jusqu’en 2021. J’ai entrainé à l’aide de « prompt » un « chat » sur une question que je porte depuis un certain temps. Je suis très curieux en matière de physique et d’astronomie. Je pourrais dire que je comprends philosophiquement les grandes lignes de l’astrophysique sans bien évidemment en saisir les subtilités mathématiques qui me permettraient d’en apprécier le sens profond, ce qui n’est pas le cas ! Pour autant, je m’amusais à imaginer une expérience selon laquelle nous pourrions pointer un rayon laser en direction de Proxima du Centaure. Avant d’utiliser ChatGPT, j’avais listé un certain nombre de contraintes qui seraient à prendre en compte dans l’équation : la distance de 4,246 années-lumière nous séparant de la plus proche étoile après le soleil, puissance du laser, déformation du rayon lumineux par la gravité des objets massifs, distorsion de l’espace-temps entre le moment de l’émission et celui de la réception plus de 4 ans après… Puis, j’ai posé la question à ChatGPT. La plateforme a flatté mon orgueil en reprenant un certain nombre de variables que j’avais déjà identifiées en y adjoignant d’autres qui ne m’étaient pas venu à l’esprit. Mes connaissances à ce sujet sont bien évidemment limitées et c’était bien là tout le problème. Je n’avais et je n’ai toujours pas les compétences pour donner du crédit aux variables que j’avais identifiées. Un physicien se rirait fort probablement de la simplicité de mes hypothèses et même des erreurs commises par la plateforme. Je devais donc éprouver ChatGPT sur un autre terrain qui m’est cette fois-ci bien connu, celui de la philosophie.
Depuis plus de 20 ans maintenant, je navigue dans les méandres de la philosophie. Je discute avec Kant ou Nietzsche quand ce n’est pas Rousseau qui me donne un indice sur la réponse. J’ai à cœur la philosophie et elle me le rend bien. J’ai donc posé la question suivante à ChatGPT : saurais-tu me donner le lien entre Nietzsche et Sartre ? J’avais bien évidemment des réponses en tête, notamment qu’il s’agit de deux philosophes du soupçon. Je voulais savoir si la plateforme allait les corroborer mes connaissances. D’abord, ChatGPT m’a donné des réponses très généralistes : « Friedrich Nietzsche et Jean-Paul Sartre sont deux philosophes importants du XIXe et du XXe siècle respectivement. Bien que leurs philosophies soient différentes sur de nombreux points, il existe certaines similitudes entre eux. » Pas franchement surpris par la réponse, la suite allait me faire sourciller : « Tout d’abord, Nietzsche et Sartre ont tous deux critiqué la métaphysique traditionnelle et la religion, prônant une vision plus existentialiste de la vie. » Sur le fond, cette affirmation du logiciel n’est pas tout à fait fausse. Les deux hommes sont deux grands critiques. La vision existentialiste ne peut cependant pas être attribuée à Nietzsche. C’est une clé de lecture de Sartre qui apparaitra un demi-siècle après Nietzsche, même si cette vision peut être considérée comme parente de la pensée de Nietzsche. Une subtilité, me direz-vous ! Soit, mais au fil de la lecture, je relevais d’innombrables erreurs et contresens qu’un néophyte ne saurait relever.
En matière de physique et d’astronomie, quoique curieux, je suis de ces néophytes. Force est de l’admettre. Dans tout ce que ChatGPT m’a offert comme éléments de réponse, je ne saurai pas discriminer les erreurs et les contresens. Loin de moi l’idée saugrenue d’utiliser le contenu généré par la plateforme pour en faire une quelconque publication. Mais est-ce que tous auront le même scrupule intellectuel et méthodologique ? Ma connaissance de l’homme m’en fait douter.
Alors j’en reviens à la métaphore du serpent se mordant la queue. Le modèle de ChatGPT et des autres plateformes de génération de contenu va probablement évoluer. Je suis vieux jeu, je l’admets. Je privilégie les savoirs académiques qui peuvent bien évidemment être issus de l’Internet. Tout n’est pas à exclure. J’anticipe néanmoins une nouvelle vague de contenus plus qu’approximatifs qui déferlera sur Internet. Contenu généré par des utilisateurs de plateformes génératives de contenu, telles que ChatGPT. Ils pourront être de bonne volonté, mais la bonne volonté ne rime pas nécessairement avec la vérité. Dans les versions qui viendront de ces plateformes de contenus génératifs, on peut supposer que ces contenus approximatifs entreront dans l’analyse des réponses. Le serpent se mordant résolument la queue. On peut aussi se douter que les ingénieurs de cesdites plateformes intègrent déjà dans les algorithmes on ne peut plus complexes des mécanismes de validations, mais comme tout le reste, on peut continuer à douter.
Bref, vieux jeu comme je suis, je n’ai qu’un conseil à donner. Retournons aux bons vieux grimoires poussiéreux. Créons avec la force de nos connaissances et de nos esprits. Publions largement le fruit de nos réflexions humaines pour le bien de l’intelligence dite naturelle ! J’irai même plus loin. En m’inspirant des labels de qualité comme les AOC et les AOP, proposons un label d’origine créative humaine : l’OCH qui pourrait peut-être contribuer à développer une société plus informée et plus consciente d’elle-même. Qui sait ? ChatGPT ?